dim.
23
juin
2013
Ici, sur l'île de Pâques :
- Quand il pleut, c'est un peu comme quand vous ouvrez le robinet de votre douche. En trois secondes, il se met à tomber des cordes, sorties de nulle part, au milieu de la journée ou de la nuit, dans un boucan d'enfer, et tout à coup, cela s'arrête
- Les routes sont en assez mauvais état, souvent en terre, pleines de trous et d'immenses flaques d'eau. Certaines deviennent rapidement impraticables lorsqu'il a plu
- Maintenant les gens ne croient plus aux moais à cause du christianisme. Certains croient un peu aux esprits, mais si quelque chose ne va pas, ils prient Jésus. Leur ancienne religion s'est diluée dans le christianisme
- Chaque année, lors des grandes fêtes de février, où est élue la reine de l'île, deux clans de l'île s'affrontent dans des épreuves sportives, comme par exemple des descentes le long d'un volcan assis sur une feuille de bananier en guise de luge. La reine de l'île est choisie parmis le clan vainqueur
- Alvaro, pendant son enfance, avait l'habitude d'aller dans une grotte, en compagnie d'autres enfants ou adolescents qui venaient par exemple y passer le week-end, éclairés à la bougie et réchauffés par des couvertures, occupés à faire du feu et à aller à la pêche. Le mercredi, ils allaient a l'aéroport pour voir les touristes, car ils ne connaissaient pas ces nouveaux visages. C'était aussi le jour où le courrier arrivait, et où tout le monde se précipitait pour savoir si une lettre était arrivée. Lui allait collectionner les timbres
- Un "Manavaï", c'est une construction circulaire en pierres, d'environ deux mètres de diamètre, où les plantes étaient cultivées pour les protéger du vent
- Lors des mariages, une musique spéciale est diffusée à un moment, pendant lequel les invités dansent autour des mariés, et déposent un billet sur un drap pour leur porter bonheur et leur donner un peu d'argent.
- Les Rapanuis trouvent stupides d'aller prendre le soleil sur la plage de sable, car il n'y à rien a faire. Ils préfèrent aller là où il y a des rochers, car ils peuvent y marcher,
pêcher...
- Il y a en tout 8000 chevaux sur l'île
- La vitesse est limitée sur l'île à 50km/h, et la plupart respecte cette limite. Du coup, parfois, ça traîne en longueur.
- Les pizzas sont faites avec une pâte semblable à celle des buritos mexicains
- Le litre de diesel coûte 561 pesos (0,83 euro), soit environ 1 USD, car l'essence est subventionnée et moins chère qu'au Chili
- L'île a une forme de triangle de 36x17x16 environ un périmètre de 69km, et 166km²
Pourquoi vous allez aimer :
- Pour faire partie des rares personnes à avoir vu les Moais de leur yeux
- Pour connaitre la sensation d'être sur l'endroit le plus éloigné de toute zone habitée sur Terre (Pôle sud excepté)
- Parce que ça peut être sur le chemin de la Polynésie française, et donc aller plus facilement à Tahiti
- Parce que vous en avez marre des destinations classiques et cherchez quelque chose de différent et d'inédit
- Parce que vous comprendrez les mystères de cette civilisation perdue
- Car ici, les embouteillages, c'est une petite dizaine de voitures qui tentent de passer, et ils ne durent jamais plus de 5 minutes
- Parce que vous plongez et souhaitez aller voir le Moai au fond de l'eau
- Parce que vous pourrez faire du cheval en toute liberté
dim.
23
juin
2013
Moment fort de la journée : se faire prendre en voiture par des locaux sans rien demander pendant une longue montée à vélo
Dernier jour complet sur cette île un peu mythique et fascinante. Pas question de ne rien faire bien sûr. Après avoir réservé notre guesthouse à Santiago pour demain soir - un endroit dans
le quartier central ouvert il y a deux ans par un surfeur californien - et passé un peu de temps pour mettre à jour le blog (on rattrape petit à petit notre retard, même si les vidéos
et les photos de la Polynésie sont loonnngguuees à charger ici...), nous partons parcourir la rue principale pour louer un vélo. Nous essayons une première "boutique", essayons de
négocier un prix pour 5 heures au lieu de 16 (les vélos sont à rendre le lendemain matin), sans succès (malgré la faible demande en cette période basse), et payons le prix fort dans un
autre endroit, après être partis du premier un peu fiers et pas contents. Après tout, c'est notre seule et dernière chance de pouvoir de nouveau nous balader un peu partout, revoir
Tongariki (l'endroit où 15 Moais sont alignés), et profiter de l'île. Cela vaut donc le coup de prendre les vélos, et finalement de profiter de la chance que nous avons d'être là. Et
finalement, ce fut la bonne décision, car nous n'aurions jamais pu faire tout ce que nous avons fait à pieds. C'est simple, à 13h, sandwichs en poche, sans le savoir, nous partons pour
35km de vélo. Dernière promenade.
Nous mettons tout d'abord le cap vers le Nord, là où nous n'avons pas été avant-hier, en haut du volcan Puna Pau, que nous atteignons après 6km. Dejà, nous aurions mis deux heures à arriver là à pieds, et en plus, la marche n'aurait pas brillée par la variété du décor. Route, végétation, et quelques maisons tout au plus. Une petite montée qui nous oblige à descendre nos vitesses au minimum, et nous y sommes. Ca donne chaud. Ici, c'est l'endroit où les Pukaos (vous vous souvenez ?) étaient construits. La roche est rouge, quand elle n'est pas recouverte d'herbes. Quelques coiffes sont là, au milieu de rien, témoignant d'un arrêt soudain de leur construction ou de leur transport. De ce point un peu haut, nous apercevons l'autre côte de l'île, et pourrions aussi voir la troisième si le mont d'en face ne bouchait pas la vue. Regardez la vidéo et vous verrez. Ce qui nous étonne, c'est que l'endroit est assez éloigné des sites où les Moais sont disposés. Du coup, inlassablement, la question de savoir comment les habitants transportaient ces blocs de plusieurs tonnes revient. Peut-être les faisaient-ils glisser sur des rondins de bois, ou quelque chose du genre (d'après la légende, les Moais "marchaient", mais les Pukaos étaient terminés et fixés sur leur tête à destination, pas avant. D'ailleurs le site de construction des Moais est distant de l'endroit où nous sommes).
Une fois terminé, nous reprenons les vélos, faisons marche arrière, puis coupons à gauche pour emprunter une longue descente (le bonheur), à suivre la route menant à Tongariki, là où
nous étions allés avec Alvaro le premier jour. Il fait assez beau, nous avons de la chance après la semaine de pluie d'il y a 6 jours. La route est longue, et nous croisons sur le
chemin différents Moais, tous couchés face contre terre, par groupe ou en solo. L'estomac criant famine, nous nous arrêtons et nous asseyons sur la roche volcanique face à l'océan, à
regarder les vagues en avalant nos sandwhichs jambon-beurre. Des familles sont installés parfois entre les rochers, à différents endroits, pour pique-niquer ou pêcher, un fil à la main.
Il reste pas mal de chemin à parcourir pour arriver à Tongariki, et nous n'allons pas très vite à cause de montées un peu longues et fatigantes. Cela fait bien deux heures et demi que
nous avons commencé à pédaler. Pas habitués, nos muscles ne nous font pas de cadeaux. Et au bout d'un moment, en réalisant qu'il nous reste encore 6km à faire, qu'il est 15h30, et que
nous devrons refaire tout le trajet en sens inverse (soit 20km, dont cette montée qui était si agréable à descendre tout-à-l'heure), nous préférons faire marche arrière. Tant pis pour
les 15 Moais, nous choisissons la tranquilité. Aller les voir aurait impliqué se dépêcher et accélérer le rythme, puis mettre le boost pour rentrer avant la nuit, ce qui n'était pas
gagné. Nous préférons ne pas nous stresser, et avoir un peu de temps à la guesthouse. Un choix que nous ne regretterons pas, même s'il aurait été sympa de revoir l'un des sites
principaux de Rapa Nui. En revenant, nous n'avançons quasi-plus après avoir parcouru un gros tiers de la côte, et descendons pour continuer à pieds. Nos jambes un peu crispées nous
disent merci. Et à un moment, un pick-up que nous avions croisé 10 minutes plus tôt, avec qui nous avions échangé un salut de la main, passe à notre niveau et s'arrête dix mètres plus
loin, en nous proposant de monter à bord, sur la plate-forme arrière. Clairement, nous acceptons, mettons en trois mouvements les vélos derrière, et grimpons nous installer à côté,
cheveux au vent. Trop contents, nous apprécions cette pause et ce moment qui nous rappelle les aventures des candidats de Pekin Express. La montée est interminable, et nous nous rendons
compte qu'il n'aurait pas été raisonnable de continuer notre chemin vers Tongariki, à moins d'avoir envisagé l'option qui vient juste de se présenter à nous (et qui nous avait quand
même traversé l'esprit). La voiture nous dépose au moment où elle tourne pour prendre un chemin différent du notre.
A 2 km du village, nous décidons d'aller visiter un dernier site, puisque nous avons le temps et qu'il nous reste des forces après cette pause bienvenue pour le moral et pour les
muscles. C'est "Vinapu", près de l'aéroport (le site que nous cherchions l'autre fois sans jamais trouver le chemin y memant depuis le volcan), une plate-forme où les Moais sont
renversés, ou enterrés dans le sol face tournée vers le ciel. Le chemin pour y arriver est boueux, et l'aide d'une camionette nous prenant à bord nous aide grandement, en nous
permettant de passer une partie marécageuse qu'il aurait été difficile de traverser à pied sinon.
Il est 17h30 quand nous revenons à la guesthouse, assoiffés, et, il est vrai, un peu fatigués. La douche fait du bien. La fin de journée est partagée entre travail sur le site, et les sacs à faire, car demain, nous partons pour la grande aventure qui nous attend sur le continent Sud-américain, le seul sur lequel nous n'avons jamais mis les pieds de notre vie.
En route pour l'inconnu, de nouvelles surprises, que l'on espère pas trop désagréables, et très certainement d'autres fabuleux souvenirs, complémentaires de tous les autres...
sam.
22
juin
2013
Journée off aujourd'hui. A part le musée, situé à 30 minutes de marche environ, juste derrière les Moais proches du cimetière, nous ne faisons pas grand chose, et restons à la guesthouse. Le musée est intéressant, pas très grand, et revient sur ce que nous a expliqué Alvaro il y a deux jours. Ce qui retient le plus notre attention, au delà des panneaux explicatifs qui composent l'essentiel des choses à voir, est l'oeil en corail d'un Moai. Le seul véritable oeil qui existe encore. L'occasion du coup de se faire une idée plus précise de l'aspect qu'ils avaient. Nous restons une petite heure, en prenant notre temps pour faire le tour. Le temps change vite, et alterne entre pluie et éclaircies. Nous courons d'ailleurs pour ne pas nous faire rattraper par l'orage sombre qui arrive. Quand on sait à quel point la pluie peut être violente ici. Cet après-midi, nous travaillons sur le blog et sur la suite du voyage, et n'avons pas le coeur à sortir ou marcher. Eric et Christelle viennent nous rendre visite ce soir, et apportent un gateau. Nous discutons dans la cuisine jusqu'à tard, et leur prêtons le Lonely sur la Polynésie, qui fait tant rêver notre amie. Rendez-vous demain.
ven.
21
juin
2013
Moment fort de la journée : Prendre une bonne douche après 14km de marche
Aujourd'hui, il pleut méchamment. Un orage nous a d'ailleurs réveillé cette nuit. Lorque le réveil sonne, pas d'hésitations, nous le repoussons et traînons sans se gêner. C'est sympa, car
être ici nous repose. Non pas que la Polynésie nous ait fatigués bien sûr, mais c'est simplement que notre rythme ici est plus lent, plus calme, avec moins de choses à faire. Ca fait donc du
bien. Les grasses mat' de la rubrique "chiffres" vont augmenter, c'est sûr.
Bref, nous partons vers 12h, à pieds, sandwhichs préparés comme hier, et nous dirigeons cette fois-ci vers le nord de l'île, pour longer la côte ouest. Nous quittons le village, passons
devant les 2 Moais du Ahu Tautira qui tournent le dos au port, et dépassons un petit cimetière (où le soir, chaque tombe est éclairée par une petite lumière photovoltaïque), pour
arriver après 30 minutes de marche sur un grand espace vert où les falaises tombent à pic dans l'océan. Là, se trouvent les Ahus "Tahai" et "Akapu". Autrement dit des plate-formes en
pierre où se trouvaient autrefois, s'ils n'y sont plus tous aujourd'hui, des Moais. Un Moai isolé est restauré, avec son Pukao rouge (sa coiffe) et ses yeux colorés, dos à la mer. Il
trône. Pas très loin, un autre se tient là, cette fois-ci sans Pukao. Enfin, ce sont 5 Moais alignés sur leur Ahu qui nous font face, en plus ou moins bon état. Cela fait bizarre de les
avoir juste devant nos yeux. Cela dit, maintenant que nous avons compris leur fonction et leur origine, la sensation est moins étrange. Le mystère est un peu parti, les rendant un peu
plus banals au passage. Nous ne nous interrogeons en effet plus sur le "qui" ni le "pourquoi". Juste le "comment". Dans la prairie dans laquelle nous sommes, des fondations d'anciennes
maisons traditionnelles sont conservées, ressemblant à des canoës renversés. Une dame se tient devant son étalage de fortune pour vendre quelques souvenirs, une table posée sur des
tréteaux. Elle n'hésite pas à jouer du sifflet si quelqu'un essaie de monter sur la plate-forme, bien que la plupart des habitants comme elle ne croit plus dans le sacré des Moais.
Après 3km, donc 40 minutes de marche plus loin, après avoir longé une piste en terre souvent boueuse ou marché sur la lave asséchée le long de la falaise, nous tombons sur deux grottes (Ana Kakenga, autrement appelées "los dos ventanas"), difficile d'accès, et un joli point de vue sur l'océan, à une trentaine de mètres de hauteur, juste au bord du tombant. Fred s'allonge d'ailleurs pour s'approcher au maximum du bord et regarder la verticalité de la paroi, ainsi que de grandes vagues se briser contre la roche.
Après un bon kilomètre supplémentaire, et plusieurs grandes flaques d'eau boueuse obstruant parfois complètement la piste, nous arrivons enfin au Ahu Tepeu, qui rassemble d'autres fondations de maisons en forme d'ellypses ou de cercles. Sur le Ahu, 7 Moais sont à terre, couchés et certains cassés. Le Ahu est partiellement détruit. Nous continuons, croisons dans ces espaces déserts quelques chevaux ou vaches en liberté, et arrivons, d'après la carte, à Ana Te Pahu, une grotte située quelques mètres sous terre, à côté d'un jardin protégé dans lequel poussent bananes, taro, et patates douces. Enfin, encore un peu plus loin, après 20 minutes supplémentaires, nous arrivons à notre destination, le Ahu Akivi, où se trouvent les seuls Moais faisant face à l'océan. Ils sont 7, regardent en direction de la mer, ont été restaurés en 1960, mais sont en fait assez éloignés de la côte. La légende dit qu'un roi polynésien, Otoumatoua, vivait sur un continent perdu (Hiva). Un habitant de son île lui dit qu'un désastre aurait lieu d'après un de ses rêves. Le roi envoya donc sept explorateurs pour trouver un lieu où s'installer. Arrivés à Easter Island (les 7 ont visiblement voyagé ensemble), ils n'ont pas aimé l'île, sont revenus pour faire part de leur avis au roi, qui leur a répondu qu'ils n'avaient pas le temps de chercher un autre lieu. Les explorateurs sont donc revenus sur l'île de Pâques pour la coloniser. D'où ces sept statues en leur mémoire, regardant la mer, d'après la légende. Il est déjà 16h30 quand nous finissons nos photos près des Moais.
Nous avons rendez-vous avec le couple de français d'hier vers 18h. Nous devons donc partir, étant donné que revenir au village va nous prendre au moins une grosse heure. Nous n'irons donc pas voir Puna Pau, le volcan où les habitants d'autrefois construisaient les coiffes cylindriques des Moais (les Pukao). Ce sera pour demain ou après-demain. Nous finissons du coup la boucle de la journée en arrivant au village, et retombons par chance pile au lieu de rendez-vous. Eric et Christelle arrivent bientôt, et nous regardons en discutant le soleil s'éteindre derrière les nuages, sans malheureusement nous éblouir à cause de la météo. Nous sommes cependant un peu chanceux, car de jolis rayons donne une ambiance sympathique le temps de quelques minutes. Trois chinois, croisés tout du long de notre marche aujourd'hui, à qui nous avons failli demander de nous prendre dans leur voiture à un moment, sont là et plaisantent avec nous, après s'être suivi aujourd'hui de sites en sites, à chaque fois décalés de quelques minutes. L'occasion pour nous de re-citer les trois mots de chinois que nous avons appris.
A 18h20, le soleil est presque couché. Nous montons en voiture avec nos deux tour-du-mondistes, direction le centre du village pour dîner ensemble. Ils souhaitent aller voir la projection
en français du film "Rapa Nui", avec Kevin Costner, diffusé ce soir au petit cinéma de la ville. Alvaro nous disait que le film mélangeait différentes versions des choses, et
différentes époques (l'homme oiseau et les Moais par exemple). Hollywood et l'histoire, c'est quand même pas les meilleurs amis du monde, hein ? Peu importe, car le dîner s'éternise, et
ils loupent leur séance. Nous continuons du coup à discuter jusqu'à minuit, à s'échanger les bonnes adresses pour la suite de nos voyages respectifs.
jeu.
20
juin
2013
Moment fort de la journée : Voir le cratère du volcan à côté de l'océan
Aujourd'hui, direction une zone de l'île qu'Alvaro nous a indiquée, pas très loin du village, au sud, pour comprendre la cérémonie de "l'homme-oiseau", dont il nous avait parlé hier.
Nous partons vers midi, sans nous presser, après une bonne nuit et un réveil un peu tardif. Nous avons cinq jours complets ici, largement de quoi faire pour à peu près tout voir. Pas besoin de se presser donc. Sandwhichs préparés et dans le sac, nous partons à pieds, dépassons l'aéroport, et trouvons le petit chemin en terre qui grimpe là-haut, au sommet d'un des trois volcans de l'île, où nous souhaitons aller. C'est en effet là que prenait place cette fameuse cérémonie. Au passage, nous nous arrêtons pour entrer dans une grotte, à Ana Kai Tangata, juste au niveau de l'eau, dans laquelle se trouvent des peintures. Audrey parvient à distinguer un oiseau, comme le montre un panneau explicatif. Le temps est mitigé, mais il ne fait pas froid. Le vent souffle un peu néanmoins. Devant nous, le volcan Rano Kau, qui monte à 400m d'altitude. Nous marchons, montons, au milieu d'eucalyptus ou d'herbes mi-hautes montantes jusqu'au genou. Au fur et à mesure de la montée, en prenant de la hauteur, nous apercevons le village derrière nous, et une bonne partie de l'île. N'étant pas très grande, nous pouvons à un moment apercevoir chaque côte, et nous rendre compte de sa superficie. Effectivement, ce n'est pas très grand, et s'il n'y avait pas les sommets des autres volcans, votre regard se perdrait sur l'océan où que vous regardiez.
Arrivés en haut, enfin, nous faisons face à un cratère de 600m de diamètre, au bord de l'eau, à l'intérieur duquel se trouve un lac et de petits ilots touffus. On dirait un chaudron géant.
Nous décidons de faire une pause, et de déjeuner là, en compagnie d'un chien sorti de nulle part, et qui nous accompagnera tout du long ensuite. Il n'y a pratiquement personne dans le
coin. Nous longeons le cratère par l'ouest et arrivons à Orongo Ceremonial Village. Ne vous enflammez pas, c'est juste une petite baraque, relativement moderne, dans laquelle sont
exposés quelques panneaux expliquant la cérémonie de l'homme-oiseau. C'est quoi du coup ? C'est comme Icare ? Non, pas du tout.
Datant du 18 et 19ième siècle (donc après les Moais), Orongo était à cette époque le centre d'un culte lié au dieu Makemake. Chaque année, pour choisir le chef de l'île, un représentant de chaque clan devait sauter du haut de la colline (en fait du volcan, là où nous sommes, à 400m d'altitude) et nager jusqu'à la petite île en face (le motu Nui) pour récupérer le premier oeuf d'oiseaux migrateurs arrivant à chaque printemps, puis revenir. Le premier d'entre eux apportant l'oeuf à son chef lui permettait de diriger l'île l'année qui suivait. La dernière cérémonie a eu lieu en 1867.
Nous nous dirigeons vers l'endroit où ces hommes devaient sauter - et peut-être se tuer après une telle chute... mais nous avons vu autre part qu'ils devaient descendre jusqu'en bas, ce qui
nous semble bien plus probable - et apercevons les deux motus en face. De même, sur les côtés, nous voyons les habitations de l'époque, construites par empilement de pierres plates, et
la petite ouverture par laquelle ils devaient passer. Elles ne servaient en fait que la semaine de la cérémonie, et donnent l'impression d'être à demi-enterrées. Là encore, nous ne
croisons pas beaucoup de monde. Nous sommes à ce moment face à l'océan, en hauteur, et nous disons qu'à l'époque, les habitants étaient vraiment au milieu de nulle part, sur cette
petite île loin de tout.
Nous repartons en sens inverse, repassons le long du cratère, et, plutôt que de reprendre le chemin en terre par lequel nous sommes venus, nous prenons la route cimentée pour
redescendre, afin de trouver un chemin qui devrait nous ammener vers un Moai, un peu plus loin. Nous marchons une bonne heure, à serpenter, accompagnés d'un autre chien, et ne trouvons
pas le chemin en question. Nous en avons un peu marre, et après un bon moment, en voyant que nous ne trouvons pas, demandons à une des rares voitures qui passent par là de nous prendre
pour retourner au village. Par chance, ce sont des français. Et, trop drôle, Eric et Christelle sont en tour du monde eux aussi. Leur prochaine étape ? La Polynésie. Et ils reviennent
du Chili. Que des bons plans à échanger des deux côtés. Du coup, nous restons à discuter juste devant notre guesthouse, et décidons de nous revoir demain, pour aller voir le coucher de
soleil sur les Moais. Il est 17h30 quand nous rejoignons notre chambre. Nous allons chercher en début de soirée des empenadas, une spécialité du coin (une sorte de pizza calzone fourrée
au fromage et à la viande, ou au thon), que nous mangeons à la guesthouse avec un autre voyageur, et regardons une série avant de dormir
mer.
19
juin
2013
Moment fort de la journée : voir les Moais à demi-enterrés
Pour ce premier jour, on entre dans le vif. Pas de bla-bla, pas de tergiversations, nous, on veut voir ces fameux moais (prononcer mo-aille) si secrets et mystérieux. Nous allons donc avec Alvaro, et trois autres touristes, faire un tour de la partie nord-est de l'île (visiter les sites de Anakena Beach, Ahu Nau Nau, Tongariki, ou encore Rano Raraku), bourré de commentaires. Compte rendu.
Quelle taille fait l'île ?
Si l'on représente l'île par un triangle, les côtés font 36km, 17km et 16km. La superficie est en gros de 170km²
Combien y a-t-il de Moais ?
Officiellement 877, bien que nombre d'entre eux soient partiellement enterrés, détruits, endommagés, couchés, pas terminés, ou complètement achevés. En fait, il y en a probablement plus, car de nouveaux sont découverts régulièrement. Il y en a probablement plus de 900
Que veut dire "Rapa Nui" ?
"Grande Terre" ou "Gros morceau de terre". Auparavant l'île avait un nom différent, qui signifiait "Le nombril du monde"
Quand ont été construites ces statues ?
Entre l'an 1200 et 1600
Quelle taille font les Moais ?
Entre 1,15m et 10m. Pour info, l'un fait 2,5m et pèse 10 tonnnes
Quelle est l'histoire de l'île ?
Les premiers habitants de l'île sont très probablement venus de Polynésie, entre l'an 200 et 400 de notre ère. Différents clans ou tribus se sont formées, occupant chacun une partie de l'île. L'apogée de cette civilisation se situe entre 1200 et 1400
A partir de 1650, il semble que la société tombe en décadence. En tout juste 100 ans, plus aucun Moais ne sont construits, probablement à cause de guerres internes entre clans, faisant de
nombreux morts. Il semble que la main d'oeuvre pour construire les statues ne soit plus disponible. On pense que pour pouvoir construire et déplacer ces statues, les hommes étaient en
bonne condition physique, et bien nourris. Il est peu probable qu'elles aient été construites sous la contrainte, ou par esclavage, car cela n'est pas cohérent avec la raison de leur
construction
De nouveaux rites et croyances font leur apparition, comme la cérémonie de l'oiseau (voir plus tard), persistant jusqu'en 1867
En 1722, des navires hollandais arrivent le jour de Pâques, sous le commandement de l'amiral Jacob Roggevern. D'après ses témoignages, beaucoup de Moais à cette époque étaient encore
debouts. 15 000 personnes vivaient alors sur l'île
En 1774, James Cook arrive sur l'île, et rend compte de nombreux Moais endommagés, sûrement à cause de guerres tribales. En 1788, le français La Perouse débarque, et trouve une population
prospère et calme
En 1862, des bateaux péruviens arrivent, et emportent au Pérou un millier d'habitants dont ils se servent comme esclaves. Dans les années qui suivent, il semble que la population diminue drastiquement, probablement à cause de maladies apportées par les péruviens lors de leurs différentes venues. La France et l'église catholique demandent alors au Pérou de ramener les survivants sur l'île (au nombre de 50)
Vers 1870, des missionaires français de Tahiti (la congrégation du Sacré Coeur) arrivent et convertissent les habitants au catholicisme. Ils introduisent en même temps la culture de la
laine. Certains habitants partent en Polynésie pour travailler dans les plantations de fruits
Jean-Baptiste Dutroux Bornier se proclame "1er roi" de l'île (Jean 1er), kidnappe la plus belle femme descendante du grand chef de l'île pour l'épouser, et devient le premier businessman
local grâce aux moutons. Il interdit pendant des années aux habitants de sortir de "Vaia Tea", une ville du coin, sauf à ceux qui travaillent pour lui
En 1877, il est assassiné par les habitants. Pour la petite histoire, il a eu deux enfants, dont une fille, qui est l'arrière grand mère d'Alvaro. Il n'y a plus à cette époque que 111
habitants sur l'île
En 1888, l'île est annexée par le Chili
En 1956, un premier moai est redressé, à Anakena Beach, sur le Ahu "Ature Huki". Toutes les statues sont en effet à terre, sous l'effet des tornades, tremblements de terre ou guerres tribales. Le
grand-père d'Alvaro, maire, dernier descendant de lignée pure, est aux commandes de ce chantier
En 2002, il y a 3000 habitants
En 2012, il y en a 6700, sous l'effet de migrations chiliennes, attirés par une politique fiscale avantageuse
Pourquoi y a-t-il des Moais ?
Ces grandes statues, posées ou non sur une plate-forme appelée "Ahu" (prononcé "Ahou", semblables aux "Maraes" polynésiens, toujours sacrée, constituée d'un ensemble de pierres parfaitement encastrées les unes dans les autres, sans connaitre la technique utilisée à l'époque pour les découper), ont été construites sur commande par certaines familles lors du décès de personnes importantes. Ces morts étaient enterrés sur la plate-forme, et selon la légende, revivaient à travers les statues. Leur esprit était libéré et, grâce aux yeux de la statue (faits de corail, la plupart ne sont plus en place sur les statues visibles aujourd'hui), rejaillissait sur le village et la famille. Quand les personnes décédées n'étaient plus connues ou importantes (par exemple des dizaines d'années après leur décès), la statue était retirée et démolie, et remplacée par une nouvelle, incarnant l'esprit de quelqu'un d'autre. La plupart des gens étaient en revanche incinérés. Seuls les plus importants avait droit à ce rite et à un Moai
Pourquoi la plupart des Moais sont tournés vers la terre ? Qu'en est-il de ceux tournés vers la mer ?
Le rôle des esprits contenus dans les statues était de protéger le village, d'où la direction de leur regard. Le "mana" qui jaillissait de leur regard était dirigé vers le village. Ils surveillaient du coup en permanence les villageois, qui vivaient dans la crainte d'être poursuivis en cas de délit. C'est pour cela que les Moais ont été poussés par les clans adverses face contre terre pendant les guerres tribales, afin de rompre la protection qu'elles offraient à leur ennemi.
Les 7 Moais tournés vers la mer, placés entre le centre et le nord-ouest de l'île, posés sur le Ahu Akivi, représentent 7 explorateurs venus sur l'île depuis un continent perdu, selon une légende
Qu'est-ce qu'un "Aringa Ora" ?
Cela signifie "Les yeux qui vivent". Ce sont du coup les Maois disposant d'yeux, devenus sacrés lors de leur adjonction, après leur contruction, au moment où elles étaient placées sur leur plate-forme ("Ahu"), et où l'esprit pouvait revivre. Ce rituel était une cérémonie et une fête, un moment important pour la communauté. Ce n'est alors qu'à ce moment qu'ils prenaient le nom de "Aringa Ora". Plus aucun Moais n'a d'yeux aujourd'hui sur l'île. Le corail a disparu ou a été volé au cours des siècles, et s'est de toutes façons probablement cassé lorsque les statues ont été renversées. En tant que partie vitale du Moai, c'est vraisemblablement ce qui était retiré et détruit en premier pour empêcher les esprits de jouer leur rôle.
Certains Moais ont aujourd'hui des peintures au niveau des yeux pour leur redonner leur allure d'antan
Et un "Pukao" ?
C'est le "chapeau" en terre rouge (car les habitants étaient pour la plupart roux) posé sur la tête des Moais, représentant des cheveux coiffés en chignon sur le sommet du crâne, comme ceux des hommes de l'époque
Comment les Moais étaient-ils construits ?
Ils proviennent tous du volcan Rano Raraku, situé sur la pointe Est. Le volcan était divisé en différents blocs attribués à chaque famille, même si les différentes familles s'aidaient entre elles. Il existe plusieurs théories sur la manière dont ils ont été fabriqués. Selon la plus crédible, ils étaient taillés dans la roche, toujours fixés au niveau du dos, qui était ensuite creusé afin qu'ils glissent le long de la paroi, prêts à être transportés. On ne sait pas exactement combien de temps cela prenait (mais les estimations disent entre 6 et 12 mois), ni combien d'hommes étaient engagés
Justement, comment étaient-ils transportés ?
C'est un mystère. Plusieurs théories existent. D'après la légende et la tradition orale, il semble que les Moais "marchaient", ce qui signifierait qu'ils étaient transportés en position verticale. Les poser sur des rondins de bois à l'horizontal, bien que pratique, ne corrobore pas ces propos. Une théorie affirme qu'ils étaient attachés au niveau du cou et de la base, et tirés. Une théorie récente reprend cette version, et a réussi il y a deux ans, après un essai grandeur nature, à déplacer un Moai de cette façon et de manière encourageante. Alvaro n'y croit pas, car selon lui, les Maoais auraient été endommagés par les rapements provoqués par ce type de déplacement
Pourquoi n'y a-t-il quasiment plus d'arbres sur l'île, ou en tous cas si peu par rapport à autrefois ?
A cause d'une grande déforestation, difficilement expliquée. Soit à cause de la prolifération de rats, amenés par les bateaux étrangers, soit à cause de l'utilisation intensive du bois pour construire ou déplacer les statues. Il paraît probable que la disparition des forêts coïncide avec le déclin de cette civilisation
Pourquoi les maisons et les constructions dans les villages d'autrefois situés autour des Ahu ont
une forme elliptyque ?
Cette forme est celle d'un canoë retourné. L'hypothèse retenue stipule que les habitants ont copié les missionaires qu'ils voyaient dormir sous leurs bateaux retournés, pour s'en servir comme abri
D'où vient la forme donnée aux Moais ?
Une légende dit que la personne qui a construite la première statue regardait son pénis. Cela explique leur forme un peu phallique. La présence de Moais autour des villages était du coup considérée comme un signe de procréation. Tout cela n'est pas certain
mar.
18
juin
2013
Après un vol de cinq heures pendant lequel nous avons relativement peu dormi, et un décalage horaire de quelques heures, nous sommes assez fatigués. Le gérant de la guesthouse, Alvaro, nous accueille à l'aéroport, collier de fleurs à la main, qu'il nous passe autour du cou immédiatement. Il parle anglais, et un peu français. Cela fait 2 ans qu'il est revenu sur l'île pour aider ses parents, après avoir passé 15 ans à Sydney. Le temps est gris, pluvieux (nous ouvrons le parapluie à peine sortis de l'avion), mais il fait 23°C.
Sur le chemin, il se présente, nous donne les premières informations sur l'île, et nous raconte que son grand-père est l'ancien maire du village principal, et celui qui a coordonné les
travaux entrepris en 1956 pour redresser les premiers Moais. Super, nous devrions du coup apprendre pas mal de choses avec lui. Arrivés à bon port à Hanga Roa, la ville principale,
après seulement 5 minutes de voiture, il nous donne une carte de l'île, entoure les endroits importants, et nous propose un tour de la partie est, demain, entre 10h30 et 17h30. Ok, nous
sommes d'accord. Il se met à pleuvoir sévèrement quand nous faisons le tour de la rue principale, passons à côté d'échoppes sommaires et de "supermercados" aux quelques rayons plutôt
vides, avant de nous arrêter manger un bout dans un restaurant tout aussi sommaire près de l'eau, plutôt déchainée. En fait, pour tout dire, il n'y a pas l'air d'avoir grand chose, et
les environs semblent pauvre. 6700 habitants seulement vivent sur l'île. Nous découvrons notre premier Moai. Cela fait bizarre.
Ici, cette petite île, appelée Rapa Nui, ou Ile de Pâques, est l'endroit sur Terre le plus loin de toute zone habitée. Ou plus simplement l'endroit le plus isolé de la planète, excepté
peut-être les cercles polaires. Nous sommes à 3700km de Santiago, et à 2000 km d'une petite île où vivent quelques personnes. Le reste appartient au Pacifique. A part être en
Micronésie, au Vanuatu, ou au fin fond de la forêt amazonienne, il est difficile de se sentir plus perdu. Nous regardons la mer, et imaginons les milliers de kilomètres d'océan nous
séparant du reste du monde. Et même si les habitants ne l'admettent pas, ici, nous avons un pied en Polynésie (l'influence se fera sentir les prochains jours), et un autre au Chili.
C'est du coup une bonne transition pour nous, et il est d'autant plus intéressant d'être là que nous étions en Polynésie juste avant, et allons au Chili ensuite : nous allons du coup
pouvoir mettre tout ça en perspective, plutôt que d'arriver de France et d'y retourner ensuite.
L'après-midi passe rapidement, car nous nous endormons comme des masses après avoir passé une demi-heure sur Internet. La connexion semble plus rapide qu'en Polynésie, même si ce n'est
pas transcendant, et devrait nous permettre de pouvoir rattraper notre retard sur le site. Vers 18h30, quand nous nous réveillons, l'électricité a sauté dans la chambre, mais surtout
dans toute l'île. En attendant que tout soit rétabli, nous sortons sur la terrasse centrale discuter avec d'autres jeunes en voyage, comme souvent dans ce type d'hébergement. Nous
sortons prendre une pizza, tentons d'avancer sur notre Best Of NZ, mais ne faisons pas long feu, et nous endormons.