sam.
03
août
2013
Le Chili, et un peu l'Argentine, en y réfléchissant, c'est le pays où nous sommes restés le plus longtemps après l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Et nous ne regrettons pas, car nous avons beaucoup aimé. Diversité des paysages, régions qui n'ont rien à voir distantes de 5000km, désert le plus aride au monde et glaciers de Patagonie constituant la deuxième plus grande réserve d'eau douce de la planète, population gentille, ouverte, absence de corruption, relative sécurité, vins intéressants, pays qui attirent trekkeurs, surfeurs, scientifiques, alpinistes... beaucoup de souvenirs. Un pays que l'on recommande, où il y a plein de choses à faire.
Du coup, ici au Chili :
- Parler l'espagnol avec l'accent espagnol est sexy (ou rend sexy), car les films pornos sont traduits en espagnol par des espagnols, et donc avec l'accent de la péninsule ibérique
- Il n'y a jamais de poivre sur les tables
- Nous n'avons pas aimé l'entente sur les prix des compagnies de bus et des excursions le long de la Cordillère des Andes côté argentin
- Les bordels sont toujours en vigueur, notamment dans les grandes villes portuaires comme Puerto Natales (qui en compte une quinzaine avec des filles originaires de Bolivie, de Republique Dominicaine ou de Colombie)
- L'inceste est relativement commun
- L'avortement est interdit
- Les flics ne sont pas ou très peu corrompus
- En Patagonie du sud, à midi, le soleil n'est même pas à 45 degrés au dessus de l'horizon
- Les horaires du lever et du coucher du soleil en Patagonie du sud sont : été 4h-23h, hiver 8h30-17h30
- Le prix de l'eau varie beaucoup d'une région à l'autre : 2000 pesos (2,2 euros) par litre sur l'Ile de Pâques, et 750 (1 euro) à Linares
- La Terre de Feu s'appelle comme ça, car en arrivant en bateau, les marins voyaient du feu sur les collines. En fait, c'était les feux des habitants de l'île, qui se chauffaient avec du charbon (commun dans la région)
- Jusqu'à il y a peu, il était obligatoire d'aller voter au moment des élections
- Le "tomar te" (le thé), ou "tomar once" (11 car c'est 11h ap le petit déj), est une sorte de goûter, souvent sucré, que les habitants prennent vers 18h. Une sorte d'afternoon tea un peu tardive
- Il n'y a souvent pas de chauffage dans les maisons, mais un seul réchaud à gaz qui chauffe généralement dans la pièce a vivre
- Dans le Sud, on peut manger du King Crab (centolla) pour pas grand chose, alors que cela vaut une fortune à Paris
- Ici, on n'utilise pas d'essoreuse pour la salade. On la met dans un sac plastique, on fait quelques petits trous au fond, et on le tourne pour utiliser la force centrifuge. Le même principe en fait
- Dans les parking souterrains, il y a une petite lumière sur chaque place, pour indiquer les places libres. Quand une voiture part et libère une place, la lumière passe du rouge au vert
- La veille des élections, les bars ferment a minuit. Après cette heure, il est interdit de boire (pour voter avec les idées claires). Le jour même des élections, dans les restaurants, on boit de l'eau. Le jour des élections est fériée, et très peu de commerces sont ouverts
- Sur la plupart des tables au restaurant, on trouve des bouteilles de coca ou de fanta, que les gens aiment commander. En Argentine, ce sont des bouteilles de vin
- La partie nord du Chili est connue pour abriter les ciel les plus purs de la planète
- Dans les écoles privées, les filles sont toujours séparées des garçons
- Les saisons sont très marquées. Au nord, il ne pleut jamais. Au sud, il pleut 300j/an et il tombe de 400 mm à 1700 mm en fonction de la zone
- Le litre d'essence vaut dans les grandes villes 822 pesos (un peu plus de 1 euro), et celui de diesel 614 (un peu moins de 1 euro)
- Il ne faut pas trop embêter les chiliens, car ils ne sont pas du tout patients, et s'énervent vite
- Il est interdit d'introduire des végétaux dans le pays, comme des fruits
- Il y a 17millions d'habitants, dont 7 à Santiago, pour un territoire grand comme une fois et demie la France. Autrement dit, beaucoup d'espace, dont une partie non négligeable exploitable
mer.
31
juil.
2013
Finalement, devant les choses qu'il nous reste à faire en terme de préparatif et sur le site, auxquelles s'ajoute aussi l'envie de nous arrêter un peu pour prendre le temps, ce qui n'est pas plus mal non plus pour Audrey, nous avons prolonger une première fois notre séjour ici, sans être sûrs qu'il y avait de la place, puis une seconde fois. Nous faisons un peu partie des murs du coup, et Marta, la femme de ménage, s'amuse de nous voir changer de chambre tous les jours puisque nous réservons au jour le jour. Nous n'avons pas fait de choses en particulier. Pas de visite, à part dans un ou deux bars de la ville (où jouaient des groupes locaux) avec d'autres voyageurs de la guesthouse ou notre guide Joost que nous avons retrouvé à l'agence à la place d'Anthony (qui a quelques petits problèmes personnels), ou celle du marché traditionnel. Il fait beau, et nous passons la plupart du temps dans la cour de l'hostal, sur l'ordinateur. Audrey, qui va mieux, est partie se refaire masser. Nous n'avons pas eu de réponse de la mine, que nous ne visiterons pas. Nous aurions pu aller là-bas directement (donc prendre un bus pour Calama, puis un autre pour aller à la mine), mais nous avons préféré ne pas tenter notre chance, et plutôt avancer sur les choses à faire avant le départ pout la Bolivie.
La Bolivie, tiens. Nous nous sommes décidés, et avons choisi la facilité : prendre un tour de 3 jours avec la compagnie "Estrella del Sur", au départ de San Pedro. Elle nous laissera à Uyuni
plutôt que de nous ramener ici. C'est nettement plus simple, et permet d'éviter de trop porter les sacs et de changer trois fois de bus, sachant qu'il vaut mieux qu'Audrey ne porte pas le sien.
C'est un peu plus cher cependant. Nous croisons pas mal de monde qui reviennent de ce tour, et qui sont conquis. Et après être allés nous renseigner, ce tour est celui que toutes les agences
proposent. Il en aurait sûrement été autrement si nous avions été directement à Uyuni, où d'autres options doivent être possibles. Nous aurions aussi pu passer par cette agence française
proposant des tours privés, à deux avec un chauffeur et un cuisinier, mais le prix est trois fois plus élevé. Nous serons du coup 6 français dans un 4x4 pendant 3 jours. Et nous allons à 6000m d'altitude pour voir les geysers de Bolivie dès demain (ndrl: fausse information, nous irons à 4900m). Un bon changement, rapide, depuis les 2500m
d'ici, qui risque de causer quelques maux de tête, puisqu'il n'y aura aucune acclimatation...
Pour les petites anecdotes, nous avons découvert un boulanger, français, passant tous les matins ici pour prendre les commandes, et avons du coup eu tous les jours un bon pain frais et
croustillant, un vrai, nature, aux olives ou au fromage. Nous aurions même pu avoir des pains au chocolat si son frère ne s'était pas cassé la main la semaine dernière. Pour nous, c'est la
première fois que nous mangeons du vrai et bon pain français depuis notre départ, et à volonté, de mémoire. L'autre bonne nouvelle, c'est la rotisserie du coin à quelques blocs de là, qui propose
d'excellents poulets grillés à la broche, pour 7 euros, soit 4 euros par personne avec les frites. Le bon plan.
Demain, départ à 7h30. Après plus d'un mois au Chili, nous quittons le deuxième plus riche pays d'Amérique latine pour rejoindre le plus pauvre (108ième au classement d'Indice de Développement
Humain des Nations-Unies... devant l'Inde, le Cambodge et le Népal. Le Chili est 40ième). Les prix vont être divisés par 5, pour notre plus grand plaisir. Par contre, les commentaires du Lonely
Planet Bolivia confirment nos craintes sur la vigilance requise là-bas et au Pérou. Par exemple, ils conseillent de ne pas prendre de taxi dans la rue, sauf si un policier se trouve à côté. Le
mieux est de les réserver par téléphone. Il est préférable également de prendre une compagnie de bus spécifique (et un peu plus chère) entre Uyuni et La Paz, pour éviter un arrêt en pleine nuit
dans une ville pour changer de bus, réputée pour ses vols en règle. Ce que nous ferons, du coup. La mine d'argent de Potossi, que nous envisageons de visiter, est aussi apparemment une décision à
ne pas prendre à la légère, étant donné les conditions d'exploitation, absolument pas normées, les accidents qui ont parfois lieu ou les vapeurs de gazs nocifs (après 7 à 10 ans, les mineurs ont
tous un cancer). Loin de ressembler aux mines du Chili, où de grandes compagnies opèrent (avec les normes de sécurité qui vont avec), celle-ci appartient aux mineurs, qui travaillent en
coopérative dans des conditions proche de Germinal. Nous en avons d'ailleurs discuté avec Aurélien, le gérant de la guesthouse, qui nous prévient que, au delà des avertissements du Lonely, la
visite ressemble un peu à une visite de zoo, mais qu'être témoin des conditions d'exploitation de l'endroit est une expérience très particulière. Nous verrons bien.
mar.
30
juil.
2013
Dernière excursion aujourd'hui, pour aller voir la Vallée de la Mort et celle de la Lune, où Fred est allé faire du sanbboard il y a quelques jours. Nous nous levons à 9h, comme les autres jours. La mine de cuivre nous a répondu, et elle nous informe que nous sommes sur une liste d'attente pour la visite que nous souhaitions faire jeudi. Ce sont les vacances d'hiver au Chili, et il y a du monde. C'est donc loin d'être acquis. Nous allons faire quelques courses chez "l'Inca", comme est appelé l'homme qui tient la petite échoppe juste à côté, passons du temps à discuter et utiliser l'ordinateur dans la cour ensoleillée de l'hostal, préparons une salade composée (avec d'excellents avocats, comme partout au Chili), puis allons porter du linge à laver à la laverie locale. Bref, rien de très excitant.
Nous rejoignons l'agence devant laquelle nous avons rendez-vous à 15h, glace à la main, et partons avec dix ou onze autres personnes vers la Vallée de la Mort. Pourquoi ce nom d'ailleurs ? Selon une première version, un jésuite belge est venu ici pour convertir l'église de San Pedro, et a découvert la vallée de la Lune, car le lieu ressemblait étrangement aux premières images de la Lune. Il a découvert une autre vallée, qu'il a souhaité appeler "Vallée de Mars (Valle de Marte)", qui s'est transformé (à cause de son accent ?) en "Valle de Muerte". Une deuxième version explique que l'endroit était un lieu sacré où les chamans de l'époque allaient mourir. Selon la troisième version, les troupeaux de bétail passaient par la cordillère, mais certains tombaient et mourraient régulièrement à cet endroit. Enfin, la quatrième version est plus simple : il ne pousse rien à cet endroit, et il n'y a aucune végétation. C'est vrai que nous sommes dans un endroit aride, mais loin d'être plat, puisque des formations de sel et de terre surgissent de terre, dans un ensemble totalement déstructuré. Le ciel est bleu, et la terre un peu rouge. Il fait chaud, et nous promenons dans l'endroit. Après quelques minutes, nous tombons sur une partie où le sol est craquelé, avec des fissures larges de quelques centimètres, façon désert ultra-sec. Nous nous approchons, et marchons sur ce dallage étrange. Contrairement à ce que nous pensions, le sol n'est pas si dur. C'est une sensation un peu molle, à la manière des pistes d'athlétisme en synthétique. Nous nous penchons, et nous rendons compte en touchant du doigt un coin que la terre est une sorte de glaise. Bizarre. Sûrement expliqué par une nappe d'eau souterraine. Nous continuons à nous balader, en discutant avec un couple de français. Fred rejoint un autre endroit craquelé, plus grand, qu'il avait aperçu l'autre fois, et tout-à-l'heure dans le petit bus. Manque de pot, contrairement à l'autre, le sol est ici beaucoup plus mou, et son pied s'enfonce complètement, jusqu'à la cheville. L'autre pied est aussi plein de glaise, mais dans une moindre mesure. Il retrouve le groupe en rigolant, et nettoie comme il peut ses chaussures avec les cailloux par terre, pour enlever l'épaisse couche de glaise qui a tout recouvert. Heureusement, une fois repartis, le prochain arrêt, pour payer l'entrée dans la vallée, lui permet de nettoyer complètement ses chaussures en utilisant le lavabo des toilettes, et de les mettre à sécher au soleil, pendant la visite du petit musée, qu'il effectue pieds nus. Ou comment réparer un accident assez cocace en une heure de temps. Un bon souvenir. Nous repartons, pour arriver dans cet endroit censé ressembler à un paysage lunaire, 12km plus loin. Le décor est assez différent des autres endroits où nous sommes allés depuis notre arrivée dans le nord du Chili. Le sel pétrifié craque partout sur la montagne, ressemble à du verre, et forme des colonnes et un dédale de chemins dans lesquels nous nous aventurons, en utilisant notre lampe frontale à certains moments (nous étions prévenus, et l'avons prise), et en devant parfois presque nous allonger pour passer. Le guide n'est pas terrible, et ne plait pas du tout à Audrey. La grotte de sel dans laquelle nous sommes est le résultat du climat particulier et de l'absence totale d'humidité. Nous repartons vers 16h45 après avoir grimpé et déambulé dans ce dédale, qui offre à un moment un joli point de vue sur la partie plane du désert.
Nous passons rapidement en voiture voir les "Tres Marias" (nom donné par le même jésuite que plus haut), trois blocs de sel en colonne, érodés par le temps et le vent, au milieu de presque rien, composés de graviers, glaise, sel et quartz, datant d'un millions d'années. Un arrêt photo sans grand intêret à vrai dire. Enfin, nous partons pour le dernier stop, une autre partie de la vallée de la Lune, pas très loin, pour observer le soleil se coucher sur un point de vue naturel que nous rejoignons à pieds, en montant sur une dune puis sur le versant d'une paroi rocheuse et salée. A côté, une autre dune émerge progressivement, très grande, sculptée par le vent, et donne envie de marcher sur son arrête, et de regarder le sable fin parfaitement lisse couler en se détachant par petits blocs. En haut, le point de vue est sympa, et permet de voir la chaine volcanique en arrière-plan, éclairée par les derniers rayons qui disparaissent derrière un autre versant. Tout, autour, est en effet bosselé, nivelé, irrégulier. Nous apercevons "l'amphithéâtre", une formation géologique ressemblant effectivement à cela, et rencontrons un couple belge qui nous parle d'une agence tenue par un français pour visiter une partie de la Bolivie. En fait, la majorité de ce que nous souhaitons voir là-bas est situé entre San Pedro et la ville d'Uyuni. Nous discutons aussi avec un américain parlant 5 langues, dont le japonais et le russe. Nous repartons peu avant 19h, en prenant au passage deux personnes tombées en panne dans le désert.
De retour à San Pedro, nous retournons dans un restaurant dans lequel nous étions déjà allés, pour reprendre une "parilla" de viandes, délicieuse. Nous repensons à l'excursion d'aujourd'hui, que nous avons trouvée moins interessante que les autres, et à ceux avec qui nous aimerions vivre ces instants, et avoir avec nous dans nos bagages. Nous décidons de rallonger notre séjour ici d'au moins une journée supplémentaire, et de partir après-demain, afin d'avoir le temps de préparer un peu la Bolivie (et de nous décider sur comment y aller, soit par nous-même, soit par une agence au départ d'ici, comme tant de gens font) et de terminer des tâches administratives ou annexes, qui font partie d'un voyage au long cours.
De retour à l'auberge, à 21h30, nous discutons autour du feu avec d'autres voyageurs, ou encore avec le physicien de l'autre fois de son domaine de compétence, de la recherche en France, de son financement, de l'Iter, et de physique théorique. Génial.
lun.
29
juil.
2013
5h35. Le réveil sonne. Moins facile de se lever qu'hier. Le carrelage au sol est froid. On se dépêche de s'habiller. Départ à 6h pour le Salar d'Atacama, dans le parc national de Los Flamencos. Petite heure de route, mélangés avec d'autres touristes, dont trois espagnols que Fred avait rencontrés en faisant du sandboard. Les lueurs de l'aube éclairent les volcans par derrière, en contre-jour. Nous quittons la route goudronnée et empruntons la piste de sel, couleur terre, bosselée, pour arriver à la lagune Chaxa, qui est un lac salé, peu profond, au milieu du terrain accidenté formé par des blocs de sel tout autour. C'est le lieu de migration de flamands roses. Trois sortes passent par ici : ceux avec les becs jaunes (les James flamingos), ceux avec le plumage arrière et les pattes noires (flamingos andinos), et ceux avec les pattes rouges (flamencos chilenos). Au fait, vous saviez que ces oiseaux naissent blancs, et acquièrent leur couleur rose parce qu'ils mangent de petits crustacés et crevettes plein de bêtacarotène, à la couleur rose ? Nous sommes quasiment le premier groupe de touristes à être là, mais sommes bientôt rejoints par d'autres. Une allée est aménagée autour des points d'eau, et une autre s'en va dans le désert sur une centaine de mètres. Le ciel est bleu et les couleurs douces. Quelques flamands roses traversent l'allée, timidement, et d'autres prennent leur envol, dans un joli vol en formation rapprochée. Une forte odeur de soufre flotte dans l'air frais. Après une grosse demi-heure à observer les animaux, et à emprunter cette allée au milieu de rien, à écouter les explications en espagnol ou en français de Maria, nous revenons près du minivan pour prendre un petit-déjeuner, assez copieux. Il est 8h50.
Nous reprenons la route jusqu'au lac Miscanti, à 110km de là. Changement de décor total une fois sur place, et progressif au fur et à mesure du trajet. Nous quittons le Salar pour nous rapprocher
du volcan Miscanti, prenons peu à peu de l'altitude (destination finale à 4300m), retrouvons un peu de végétation, qui parsème le terrain de taches jaunes, et sommes bientôt entourés de neige,
dont l'épaisseur est faible, mais qui contraste radicalement avec les couleurs des derniers jours. D'ailleurs, c'est à cause d'elle que cette excursion n'était pas ouverte avant-hier, et les
autres jours, car il était impossible de passer en voiture, et la piste était fermée. Elle est aujourd'hui ouverte, mais il reste une couche non négligeable, puisqu'en nous rapprochant du volcan,
et en passant les 4000, nous passons à côté d'un van empêtré dont les roues pâtinent, ainsi qu'à côté de touristes obligés de continuer à pieds sur le kilomètre sinueux qui mène au lac que nous
allons voir. Notre chauffeur, Alejandro, est un as puisqu'il parvient à nous emmener à destination, malgré quelques dérapages peu dangereux, et la pente douce mais glissante qu'il faut franchir.
Nous saluons les touristes qui marchent dans la neige (nous croyons reconnaitre deux filles de la guesthouse...). Sur place, c'est très beau. En temps normal, l'endroit n'est absolument pas
recouvert de neige, et les deux volcans tout proches, le Miscanti et le Miniques, se reflètent dedans. Le lac de 15km² et 7 mètres de profondeur est gelé, et tout est blanc, sauf quelques touffes
jaunes qui émergent uniformément de partout. Cette lagune s'est formée il y a presque un million d'années, quand le Miniques est entré en éruption et a formé une barrière naturelle, empêchant
l'eau de descendre dans le Salar. Il n'y avait d'ailleurs au début qu'un seul lac, mais il y en a maintenant deux, à cause d'une rivière souterraine et les quelques précipitations qui ont pu
avoir lieu depuis. Nous descendons un peu pour nous rapprocher, mais n'allons pas trop loin, à cause de la neige. C'est assez bizarre d'être dans un environnement blanchi par la neige, alors que
les couleurs beiges et ocres du Salar sont à quelques kilomètres. Autre contraste, la neige et la réserve d'eau qu'elle constitue, et l'endroit le plus aride de la planète plus bas, d'où nous
venons. Changement de décor radical en peu de temps. Nous restons un peu, puis repartons à 11h20. Une dame a du mal à marcher pour rejoindre le bus à cause de l'altitude. Il commence à faire
chaud aussi.
La descente est sinueuse, face au Salar, tout au fond, qui forme comme hier une mer plate vers laquelle nous filons. Nous laissons des cratères derrière nous, puis arrivons aux côtés d'autres, qui nous accompagnent tout du long sur notre droite. La neige et les touffes d'herbes façon steppe ont laissé place à des failles qui descendent sur la plaine de sel, creusées là encore par l'eau il y a des millions d'années, et une terre ocre et des bouts d'herbe à la couleur kaki. Le champs de vision est immense. Le décor, toujours le même pendant une bonne demi-heure, ne lasse pourtant pas. Un des volcans sur le côté est majestueux. Nous nous arrêtons à Socaire ("Socahiré"), un village coincé entre le désert et les lagunes d'altitude, construit en pierre au 16ième siècle. La culture en terrasse de pommes de terre, quinoa ou maïs prédomine encore, surtout pour faciliter l'irrigation (un point clé ici). Le clocher est à l'extérieur de l'église, et les toits faits avec l'herbe jaunes que mangent habituellement les guanacos (une espèce de lama). Aujourd'hui, peu de monde habite ici, car la plupart des gens sont partis travailler à Calama, dans les mines de cuivre de la région. Nous restons une grosse dizaine de minutes sur place.
54km plus loin, nous arrivons à Toconao. Il est 12h40. Il fait beau et chaud. Un village sans grand intêret à vrai dire. Un arrêt touristique. Dans l'église, un escalier est en bois de cactus,
très dur. Là aussi, le clocher est à l'extérieur. Près de la chaussée, deux grand cactus de 2,5m trônent. Nous les regardons avec curiosité. Nos premiers cactus naturels. Nous rentrons dans une
boutique, dont l'arrière-cour débouche chez l'habitant, et saluons trois lamas enfermés dans leur enclos. Nous avons un peu peur de nous prendre un jet d'eau, mais non, ils ne semblent pas
effrayés. Il est 13h15, et nous repartons pour les 35 derniers kilomètres pour revenir à San Pedro. Sortie de nulle part, une barrière d'arbres fruitiers forme une grande ligne à travers laquelle
nous passons en plein désert, grâce au passage d'une rivère souterraine. Au loin, sur le versant d'un des volcans, nous apercevons la base logistique d'"Alma", dont les radiotéléscopes sont
invisibles et situés à 5000m d'altitude. Nous avons d'ailleurs rencontré à la guesthouse un étudiant ayant fait un stage de 3 mois là-bas, ainsi que son père, physicien travaillant sur les
instruments de mesure au synchrotron de Grenoble. Passionant.
Nous arrivons à 13h44 précisément, et déjeunons sur la place principale, en payant bien trop cher pour ce que nous avons. Nous nous promenons dans les quelques rues, que nous connaissons par
coeur, et rentrons. L'après-midi passe. N'ayant pas pu faire l'excursion Piedras Rojas qui nous attirait tant, bien plus chere (et incluant le tour d'aujourd'hui), nous passons à l'agence pour
récupérer la différence que nous avons versée. Anthony n'est pas là. Nous l'attendons 20 minutes, sans succès. Cela ne nous arrange pas, car nous sommes du coup obligés de retirer du liquide, en
espèrant que les 50 000 pesos qu'il nous doit ne nous resteront pas sur les bras d'ici à notre départ en Bolivie, prévu pour après-demain. Nous partons immédiatement ensuite à 50m, pour régler le
tour aux étoiles où nous allons ce soir, prévu dans 30 minutes.
Il est 19h, et nous attendons le bus avec d'autres français pour rejoindre le Space Lodge Atacama, là où Alain Maury vit et a installé une petite dizaine de télescopes (1 télescope de 72cm, 2
télescopes de 60cm, 2 de 45cm, et d'autres télescopes plus petits. Bien sûr, ils n'ont rien à voir avec des télescopes professionnels du désert d'Atacama, jamais ouverts au public). Le tour où
nous allons, alors que le soleil est couché et la nuit sans lune, permet d'apprendre comment regarder les étoiles, de comprendre les constellations, comment et pourquoi le ciel change dans
l'année et avec la latitude. Un pointeur laser vert est utilisé pour pointer les étoiles dont il nous parle durant les 45 minutes où nous sommes en cercle autour de lui, dans son grand jardin, à
l'écouter. L'homme est particulier, avec un style cynique, amusant, détaché, mais toujours précis. Son style est inimitable, et plait beaucoup à Fred. La pédogogie est bonne, et très terre à
terre. Contrairement à ce que nous pensions, et ce qui est prévu, il ne fait pas froid du tout. Nous apprenons que l'oeil nu peut observer 3000 étoiles par temps dégagé et sans pollution
lumineuse. Toutes les étoiles visibles appartiennent à notre galaxie, la Voie Lactée, hormis quelques unes concentrées dans le grand nuage de Magellan. Nous apprenons à repérer la Croix du Sud,
l'étoile polaire, où encore à comprendre les similarités entre le ciel du Chili et celui de France (environ 65% est commun, beaucoup plus que ce que nous pensions). Les meilleurs ciels,
clairement, sont dans l'hémisphère sud nous dit-il (il veut dire par là les plus interessants avec des téléscopes, pas forcément ceux qui sont les plus beaux à observer à l'oeil nu, quoique).
Nous comprenons ce qu'est le plan zodiacal, son influence lumineuse (semblable à l'éclairage d'une ville lointaine), observons des constellations simples ou compliquées, revenons sur leur
découverte et leur appelation (là aussi avec de nombreux traits d'humour, sans le côté sérieux que cela pourrait avoir... c'est excellent et tordant de rire). Puis nous passons à l'observation
proprement dite, et collons notre oeil sur tous les téléscopes. Nous observons une parcelle de la Voie Lactée (avec d'innombrables points blancs qui sont autant d'étoiles), une galaxie en
formation (sans reconnaitre vraiment ce que c'est si on ne nous l'avait pas dit), alpha et beta du centaure (le système double d'étoiles le plus proche de la Terre, à 4,4 années-lumières), ou
encore - et c'est le plus impressionant - Saturne, que nous voyons en petit à travers un télescope, mais très précisément, en distinguant parfaitement ses anneaux. On pourrait presque voir le
Faucon Millénium débouler, tellement l'image nous fait penser à celle des films de science-fiction. Et pourtant, c'est bien elle, réelle, si loin et si proche en même temps. La troisième et
dernière partie consiste en une discussion informelle autour d'un chocolat chaud, à l'intérieur, où nous pouvons lui poser diverses questions. Cela dure 20 minutes. Du retard a été pris. Au
final, un moment très intéresssant, bien qu'un peu léger pour Fred qui s'interesse à l'astronomie et à l'astrophysique depuis un bout de temps. Mais l'occasion de poser des questions, et de
poursuivre quelques minutes la conversation en privé pendant que les autres montent tranquillement dans le bus nous ramenant dans le centre. Audrey a bien aimé. Une bonne introduction à la
matière pour les non-initiés comme pour les autres. Pour les lecteurs intéressés, Alain Maury a écrit quelques articles disponibles sur le site du Space lodge
Atacama, qui vous donneront une idée du tour que nous avons eu (les textes sont assez longs cependants, et très personnels dans leur style, qui peut ne pas plaire à tout le monde).
Retour à la guesthouse vers 23h, où nous discutons un peu avec les autres, avant d'aller nous coucher. Nous ne savons pas encore bien si nous partons en Bolivie après-demain avec l'agence que nous avons en tête (Estrella del Sur) d'ici, où si nous nous rendons à Uyuni par nos propres moyens et réservons la visite du désert de sel bolivien directement là bas, sachant que cela nous reviendrait sûrement moins cher, mais que cela permettrait d'éviter de porter trop les sacs (Audrey va un peu mieux, mais à toujours mal), et que nous avons bien du retard sur les articles du site. En outre, nous attendons une réponse de la mine de Chuquicamata pour aller la visiter jeudi. C'est en effet la plus grande mine de cuivre à ciel ouvert au monde.
dim.
28
juil.
2013
Se lever à 3h30 est finalement plus facile que nous ne le pensions. Question de cycle sûrement, et de chance. Allez savoir. L'excursion est matinale, car l'idée est d'aller voir des geysers en altitude, dont l'effet est accentué par le froid. Il vaut donc mieux y aller au petit matin, quand les rayons du soleil sont encore masqués par les crêtes tout autour, et avant que la température ne monte. On nous a d'ailleurs conseillé de bien nous couvrir, car les températures peuvent descendre la nuit, et surtout aux heures les plus froides que sont 4 et 5h, vers -15°. Cool, on va peut-être battre notre record. En fait, non. Il fait froid, mais pas moins de -3°C. Bien couverts, c'est donc supportable. Deux autres personnes se lèvent au même moment, pour la même excursion, mais avec un groupe différent. Nous attendons tous les quatre devant la porte d'entrée de la guesthouse totalement silencieuse que le minibus arrive, à 4h20.
Dans la nuit, direction les Geysers del Tatio ("Geyser du vieux qui pleure"), à 100km au nord, et 4320m d'altitude, dans le parc des geysers Tatio Mallku (Mallku = Grand père). Nous nous demandons si prendre 2000m en 1h40 ne va pas être gênant, mais non, tout ira bien. C'est haut mais ce n'est pas encore très haut, quoique la barrière des 4000 marque toujours une étape. En montant dans le bus, nous retrouvons notre guide d'avant-hier, Joost, avec surprise et plaisir. L'endroit où nous allons est le 3ième campement de geysers au monde par sa taille, après Yellowstone et un autre en Russie. C'est en revanche le plus élevé de la planète. Nous allons découvrir, une fois être arrivés et avoir pris le petit-déjeuner organisé sur une table de fortune posée devant le minibus aux premières lueurs (et avoir somnolé pendant tout le trajet, où seuls les feux éclairaient la piste), que ce que l'on entend par geysers, ce sont des champs géothermiques. Du coup, contrairement à ce que nous avions en tête, ce sont plus des fumerolles et de l'eau en train de bouillir à même le sol que nous allons voir, plutôt que de grandes gerbes d'eau s'élevant dans le ciel à plusieurs mètres de haut. Les convulsions aqueuses créées par l'effet du magma chauffant des nappes souterraines (nous sommes en plein dans une zone volcanique) font parfois monter l'eau d'un mètre, mais pas plus, et par intermittence. En revanche, de la fumée (de la vapeur d'eau) s'élève de plusieurs endroits, telles de grandes cheminées. Nous retrouvons ce que nous avions vu en Nouvelle-Zélande, dans des proportions plus importantes (il y en a moins, mais c'est plus impressionnant ici). Il y a pas mal de monde, mais ce n'est pas plus gênant que ça. Il ne fait pas chaud, mais le petit-déjeuner a fait du bien. Devant nous, 40 "geysers", 60 sources, et 70 fumerolles occupent 3km².
Nous nous promenons dans le parc, passons d'une "soupe" (eaux bouillonantes) à l'autre, mais ne voyons pas toujours bien à cause de la vapeur, qui masque la base de la mare d'eau chaude, dont la température atteint généralement 85°C. Nous arrivons ensuite à la "piscine", une étendue d'eau chaude, réchauffée de la même manière par les sources souterraines, dans laquelle il est possible de se baigner, comme bien des gens le font. Des thermes naturelles en somme, au milieu de la nature, entourées par les versants en pente douce des quelques sommets du coin. Nous hésitons à y aller, faisons nos timides, sans vraiment savoir pourquoi (nous n'avons pas plus envie d'y aller que ça en fait, et Audrey hésite à cause de son bandage), et repensons au Japon, où nous n'avions pas pu trouver des "onsens" naturels et convenables. En y réflechissant, c'en est un beau que nous avons en face de nous. Et l'eau est chaude. Allez, à 8h20, 10 minutes avant de devoir repartir, nous y allons. Notre revanche sur les onsens japonais. Il est facile de rentrer dans l'eau, et nous laissons guider naturellement par la source chaude, dont nous nous rapprochons, pour atteindre les 30°C. Joost est là pour prendre une ou deux photos de nous. En quittant la proximité de la source, l'eau est finalement plus froide, et nous depêchons de nous sécher une fois sortis. Les rayons sont là pour nous réchauffer, mais il ne fait pas plus de 13 ou 14°C. L'ensemble de notre groupe repart quelques minutes après. Le minibus fait un arrêt pour que tout le monde paye le droit d'entrée (oui, en sortant, paradoxallement). Nous bluffons gentiment en disant que nous sommes étudiants, pour payer moins de la moitié du prix. Il fait très beau, et nous roulons pour découvrir la suite du programme, en parcourant la zone, entre les petites plaines couvertes de vert ou de jaune, et les sommets recouverts partiellement de neige. Nous nous dirigeons vers le point de vue de Vado Putana ("vado" = endroit d'où vient l'eau), où il est possible de voir le volcan Putana, l'un de cinq volcans actifs de la région. Tout autour, il est possible d'apercevoir des "vicugnas" (prononcer "vicougnas" des vigognes), ou sortes de lamas, ou des "viscatchas", des lièvres avec une queue d'écureil. Nous verrons les premiers, mais pas les seconds. Arrivés au point de vue, très joli, nous demandons pourquoi il y a ici des lagunes, ou quelques plans d'eau, alors que la région est désertique. C'est parce que soit une rivière est bloquée par la cordillère ou un ensemble de monts, soit parce qu'une rivière souterraine coule par endroits. Face à nous, une sorte de marais se trouve là : c'est le rio Putana, dont la traduction est "marais d'altitude". La végétation est particulière, avec une mousse qui se développe en tapis.
A 9h35, après être repartis, nous faisons un nouvel arrêt, et apercevons des "guallata", des oies vivant en couple. Si le mâle meurt, la femelle se laisse mourrir de faim. Quelle dévotion. C'est beau. Un volcan fume gentiment dans les environs. C'est le Lascar (en fait, non, c'est le Putana). Nous continuons, dans un décor plus désertique que tout-à-l'heure, à passer à côté des grands canaux formés par les écoulements fluviaux millénaires, et arrivons dans un petit village colonial, Machuca. Un village typique et différent, au milieu de rien et composé de deux rues, et d'une église, avec un vrai air d'Amérique du Sud, planté dans ce décor particulier, mais aussi un peu (beaucoup) touristique. Un sentiment mitigé, partagé entre l'authenticité et son opposé. Nous goûtons quand même un "anticucho de lama", ou brochette de lama, que nous aimons beaucoup. On en reprendrait bien, mais le type n'est pas très sympa, même avec notre guide. Bien qu'il soit moins de 10h du matin, cela nous ouvre l'appétit. Nous allons du coup prendre une empenada de fromage de chèvre, pas mal, mais qui serait incroyablement délicieuse si nous avions la liberté de mettre plein de choses dedans (on pense notamment à de la viande hachée et la salsa qui est servie au restaurant ici dès que vous vous asseyez à une table...). Nous allons faire un tour à l'église du village, en étant légèrement essouflés en montant la petite côte (nous sommes encore à 4000m). La patronne du village est Notre Dame de Guadaluppe. Selon la légende, un garçon aurait eu une apparition dans une grotte, en aurait parlé à ses parents, qui seraient retournés sur les lieux et auraient trouvé une médaille de Notre Dame de Guadaluppe. Plus tard, certains diront que la médaille provenait d'un soldat espagnol qui l'aurait laissée là. Dans ce village, les maisons ont toutes une croix sur le toit pour les protéger du soufre, très présent dans la région, et qu'ils associent au diable. Nous repartons une heure après être arrivés.
Sur le chemin du retour, nous redescendons vers la plaine de sel, que nous distinguons au loin, dans un décor de western, ressemblant à une mer de nuages, ou un lac encerclé de volcans. Elle est toujours aussi impressionnante. La voir en face et d'un peu plus haut permet de se rendre compte de la superficie qu'elle occupe, en tous cas de celle que nous avons devant nos yeux. La terre qui défile est beige, sèche, avec quelques touffes d'herbes, et des cactus géants (3 à 4m de haut), ne poussant que d'un centimètre par an, à côté desquels nous ne nous arrêtons malheureusement pas, alors que nous ne sommes pourtant pas en retard. Nous nous arrêtons quelques instants autre part, moteur éteint, au milieu de la route, au bas d'une petite côte, et observons la voiture avancer et monter toute seule la pente. Bizarre, tout comme cette pente du sud de la France ("la curiosité de Lauriole"), où le même phénomène peut être observé. Les boussoles de trois Iphone indiquent une direction différente, et semblent un peu perdues. Nous arrivons à San Pedro à 11h50.
Après s'être changés, car il fait chaud à cette heure-ci, et nous portons encore une couche thermique, nous allons réserver notre soirée pour aller observer les étoiles avec un astronome
demain soir (ça devrait être sympa), puis déjeunons sur la place du village, qui s'appelle bien sûr...Plaza del Armas. Nous passons l'après-midi tranquillement à la guesthouse, écrivons
un peu, faisons deux ou trois choses, discutons avec Marie, la gérante, et quelques autres personnes, en tee-shirt, au soleil dans le jardin de l'auberge, puis en rajoutant un pull en
fin d'après-midi dès que le soleil descend. Nous faisons aussi une sieste d'une heure, un peu fatigués par le lever de ce matin. Nous discutons avec deux étudiantes françaises de
Santiago, et allons chercher une pizza que nous ramenons à la guesthouse pour continuer d'échanger, avec elles ou une quinquagénaire ayant pas mal voyagé (mais qui ne connait pas le Japon).
Nous allons nous coucher de bonne heure, vers 23h, afin de récupérer un peu. D'autant que, demain matin, re-bellote, un minibus vient nous chercher à 6h pour une nouvelle excursion
prometteuse.
sam.
27
juil.
2013
La bonne nouvelle du jour, c'est le ciel bleu, qui nous surprend par rapport aux prévisions fournies hier soir par l'office du tourisme. Cool, sauf qu'à la place du sandboard, nous aurions du coup plutôt pu faire une excursion tous les deux. Fred va donc découvrir certains paysages que nous retrouverons plus tard sous le bleu du ciel, donc dans les conditions parfaites. Tiens, au fait, cela sera une des rares fois où nous serons séparés quelques heures. Marrant, même si cela ne nous manque pas, ou ne nous gêne pas outre mesure.
Vers 11h, nous packons les affaires, et déménageons tout notre fatras vers la nouvelle guesthouse, "La Rose d'Atacama". Elle est à quelques rues, et nous faisons deux voyages, puisqu'Audrey ne
peut pas porter son sac. Le nouvel endroit est sympa, un peu plus petit (mais relativement grand par rapport aux standards des autres pays), avec une grande cour intérieur également, quelques
tables en bois, et les chambres disposées tout autour. Aurélien, un jeune de trente ans, et Marie, une française quinquagénaire, nous explique les règles à suivre ici, comme le couvre-feu à 23h,
après nous avoir fait visiter les lieux, dont la cuisine un peu étroite relativement à la taille du reste. Pas mal de français en voyage sont là, majoritaires par rapport aux quelques chiliens
parlant français, dont une famille avec des triplés. Fred décide d'écrire un article au soleil, qui tape bien à cette heure de la mi-journée, pendant qu'Audrey va avec Marie au dispensaire de la
ville, sur ses conseils et au vu de son insistance. Sympa, mais il n'en ressortira pas grand chose, à part quelques cachets qui serviront néanmoins à soulager mademoiselle. Nous déjeunons vers
13h, à l'extérieur, car nous n'avons pas fait de courses ces derniers jours, en dehors du lait (sans lactose, moins cher, mais quelle erreur sachant que les produits laitiers sont conseillés pour
Audrey après sa chute de ski), et nous promenons une heure plus tard dans la ville, en passant par l'église que nous visitons, et qui nous rappelle d'extérieur la Grèce, avec ce contraste de murs
blancs et de ciel bleu.
A 15h, Fred se pointe devant l'agence et retrouve Anthony, pour l'excursion sandboard. Il part avec une petite dizaine de personnes, pendant qu'Audrey rentre. Elle va profiter de l'absence de
Fred, et de la disponibilité du PC, pour classer les photos et vidéos, et mettre nos deux disques durs externes à jour, histoire qu'ils soient identiques en terme de contenu. Fred, de son côté,
monte dans un 4x4, à l'avant, avec les autres, et se dirige vers la Vallée de la Muerte, puis la Vallée de la Lune pour arriver, après un chemin chaotique en plein désert, à rouler sur une terre
en sel dur comme de la pierre et en sable, au milieu de canyons d'une dizaine de mètres de haut, plus ou moins reserrés, au milieu d'un décor aride, où aucune vie n'existe. Nous avons quitté la
route goudronnée, avons fait un long détour à cause de travaux, permettant par conséquent de longer la plaine de sel qui part à l'infini. Il fait chaud, et le guide, un adepte du surf plutôt
cool, nous donne des explications en chilien ou en anglais (avec l'accent chilien bien sûr). L'ambiance est bonne. Nous arrivons finalement devant une grande dune de sable, très fin, où sont déjà
stationnés plusieurs tout-terrains et d'autres touristes là pour faire la même chose que nous. Le guide explique les bases du sandboard, qui sont les mêmes que celles du snowboard, que Fred n'a
jamais pratiqué. Une fois le speech terminé, un board est attribué à chacun. Fred a sympathisé avec trois espagnols, et commence à monter la dune à pied. Un peu crevant. Une fois là haut, il faut
continuer de marcher dix mètres le long de l'arrête, avant de chausser la planche, d'écouter les conseils, et de se lancer. Pas très difficile, même si les chutes sont nombreuses au début, moins
à la fin. Sur le sable, on ne prend pas beaucoup de vitesse (par rapport à la neige ou à la mer), et les chutes ne font pas mal, même quand Fred fonce vers la fin, en équilibre un peu instable,
face à la pente, et tombe en faisant un bon tour sur lui même. Du sable plein la figure, dans le pantalon, partout, mais aucun bobo. C'est marrant, sympa, mais sans plus. A essayer pour le fun,
c'est tout. Devoir remonter à chaque fois la dune est par contre assez fatiguant. C'est acquis, rien de pire que de remonter une pente en sable, où les pieds s'enfoncent à chaque pas sans
véritablement accrocher. Pire que la neige, pourtant testée il y a une grosse semaine en montant vers le point de vue sur le Fitz Roy. Le point de vue depuis la dune, où Fred et les espagnols
vont désormais un peu plus loin pour être plus hauts, est superbe, avec quelques beaux volcans (comme toujours) en toile de fond, et les formes étranges dessinées par le temps sur le sel et la
roche. Retour à 18h30, après être allé tous ensemble autre part en voiture pour voir le soleil disparaître un petit Pisco Sour à la main.
Le soir, après une douche et avec encore un peu de sable dans les oreilles, nous retrouvons les deux filles belges, ainsi qu'un couple qu'elles ont rencontré pendant la journée, et retour à 21h10
et 47 secondes. Un feu de camp est allumé dans la cour de la guesthouse, où les gens discutent. Nous restons un peu, mais pas trop car nous ne les trouvons pas sympa. Non, ce n'est pas vrai. Nous
nous levons tôt demain, car nous partons pour une excursion nous menant à plus de 4000m d'altitude, et dont le départ est prévu à 4h du matin : les Geysers del Tatio. Allez, dodo, rendez-vous
demain.
ven.
26
juil.
2013
Première excursion aujourd'hui, et découverte du désert. Au réveil, vers 9h30, après une petite nuit pour Fred et une un peu plus longue pour Audrey (même si le sommeil était léger tant qu'il n'était pas rentré), le ciel est gris. Mince. Alors que la région est réputée pour ses couleurs contrastées, nous ne risquons pas de voir grand chose avec cette couverture nuageuse. Quelques gouttes de pluie se font même sentir. Un comble dans l'endroit le plus aride au monde. En posant la question, nous apprenons qu'en fait, San Pedro n'est pas dans la zone la plus aride de la planète, mais qu'une partie du désert - ce dernier couvrant une partie du Chili, de la Bolivie et de l'Argentine - seulement est concernée. Cela dit, la pluviométrie est néanmoins extrèmement faible un peu partout, et l'ensemble du désert hyper-aride. Les gouttes de pluie font surtout de la figuration, et ce n'est pas parce qu'il y a des nuages qu'il pleut ici. A Arica, une ville à quelques centaines de bornes, il tombe 0,8 mm de pluie par an, ce qui n'est atteint par aucun autre point du globe. C'est d'ailleurs pour ces raisons que la Nasa a testé ici de petits véhicules pour l'exploration martienne. Effectivement, nous allons découvrir aujourd'hui, mais surtout dans le prochains jours, que le paysage a des allures extraterrestres, avec la plus faible densité d'activités organiques de la planète. Coincé entre la barrière andine et la fosse océanique, le plateau de sel couvre une superficie de 3000 km² (un tiers de l'Ile de France), avec une longueur maximale de 100 km et une largeur max de 80km, et est entouré d'une barrière volcanique où se dressent une vingtaine (parmi une centaine) de volcans (dont les sommets, comme celui du Licancabur ou du Lascar, sont hauts de 6000m, et sont dans la majorité tous visibles quand votre regard parcourt l'horizon... c'est assez fou de voir autant de cheminées volcaniques rassemblées et formant un cercle autour de cette gigantesque plaine de terre et de sel). C'est le troisième plus grand désert de sel au monde, après celui de Uyuni, et celui de Salinas Grandes en Argentine.
Nous partons nous promener, passons un peu de temps sur le blog, et il est rapidement 13h passé. Nous cherchons un restaurant, allons aux "Delices de Carmen", qui met du temps à nous servir, puis changeons d'endroit, car nous avons rendez-vous à 15h pour l'excursion. Nous allons manger autre part, et par hasard, tombons dans un endroit où les plats sont en fait plus chers (mince) mais bien meilleurs, avec une vraie cuisine. C'est du coup une bonne nouvelle, et nous mangeons vraiment bien. Nous sommes cependant un peu pressés, et arrivons à l'agence, à quelques mètres de là, pile à l'heure. Nous sommes un peu dégoûtés d'aller découvrir le désert et le lac salé dans lequel il est possible de se baigner sous ce temps. Nous partons avec 8 autres personnes, dont 4 français et 2 finlandais, et un guide belge parlant français (Joost), très sympa, de notre âge, avec lequel nous sympathisons rapidement. Direction Laguna Cejar, à 30km. Nous sortons de la ville et tombons tout de suite dans le désert de sel. La ville n'est en effet qu'un ensemble de bâtiments au milieu de rien. Ici, aucun arbre, quasiment pas de végétation, rien qu'une terre ocre et blanche, mélange de sel et de terre. La route, puis la piste, est bosselée. Ca secoue pas mal, d'autant que le chauffeur connait l'endroit et n'hésite pas à rouler à bonne allure. Les volcans dont nous parlions plus haut sont là, mais nous ne faisons que les deviner, voire les imaginer, à cause des nuages qui les masquent. Quelle frustration. Nous faisons un premier arrêt devant un lac peu profond, Laguna Tebinquiche, dont la hauteur d'eau ne dépasse pas 5 à 10cm. En temps normal, l'eau devrait être parfaitement plane et refléter la chaîne de volcans, pour créer un joli effet semblable à ceux que nous avions eu quelquefois pendant notre marche dans le parc de Torres del Paine. Aujourd'hui, on ne voit absolument rien, d'autant que le vent balaie la surface qui ondule par conséquent, et ne permet aucun effet mirroir. En revanche, la terre autour est étrange, et des ilots de sel bordent la lagune, et forment un ensemble diforme sur lequel il est un peu difficile de marcher si l'on s'écarte un peu. Et à perte de vue. L'ensemble est ocre et blanc, et des concentrations de sel, de la petite pincée à la grosse pierre, tapissent les environs. Nous goûtons, et oui, c'est bien du sel. Pourtant, on pourrait croire que ces taches blanches sont des dépôts de neige, mais non. Comment cela est-il possible d'ailleurs ? Il vient d'où tout ce sel, en quantité quand on sait que l'épaisseur de la couche est supérieure à plusieurs mètres ? Eh bien de la dissolution des sels du sol volcanique de la région, via les eaux apportées par les précipitations sur la chaîne andine toute proche il y a plusieurs millions d'années. Dans un premier temps, ces dernières se sont infiltrées et se sont accumulées dans le sol, se chargeant de sels. Dans un deuxième temps, pendant une période chaude et sèche, il s'est produit un affleurement de ces eaux souterraines dans la dépression du salar. Puis les eaux se sont évaporées et les sels apportés le long des canaux - aujourd'hui encore bien visibles le long des parois des volcans, et parfois profonds de plusieurs dizaines de mètres - se sont accumulés, formant une croûte solide de sels minéraux. Celle-ci est depuis cimentée par les poussières amenées par le vent du désert, qui se sont mélangés à ces dépots salin, expliquant pourquoi le sol n'est pas complètement blanc, comme le Salar de Uyuni en Bolivie, notre prochaine grande destination. Nous apprenons que les petites rivières issues de la fonte régulière des neiges andines des sommets environnants s'écoulent vers la cuvette du salar créant ainsi de multiples oasis. Celles-ci furent à l'époque le lieu privilégié du développement de la culture des Indiens Atacamas (pour en savoir plus : http://eldesiertoflorido.over-blog.com/article-histoire-atacamene-prelude-117929858.html), dont nous ne voyons aucune trace. C'est donc dommage de ne pouvoir apprécier tout cela, puisque nous ne voyons rien. L'arrêt n'a donc que peu d'intêret à cause de la météo, sauf de voir tout ce sel et l'étendue du désert.
Nous reprenons le mini-van, et allons aux "Ojos del Salar", ou "yeux du désert de sel". Ce sont deux trous remplis d'eau, comme deux grands puits, au milieu de nulle part. En ayant aperçu une photo prise du ciel, cela forme deux yeux, séparés par une dizaine de mètres. L'eau est douce, et la profondeur inconnue (bien qu'estimée entre 12 et 30m) à cause de l'irrégularité des parois. Leur diamètre fait environ 20m. Peu d'intêret là aussi, à part savoir qu'ils existent, et les voir. C'est cependant étrange d'avoir ces deux trous remplis d'eau ici. Enfin, nous rejoignons la dernière étape, la plus intéressante, Laguna Cejar. C'est un lac extrèmement salé, reflétant là aussi normalement les volcans autour, normalement couleur émeraude (mais pas aujourd'hui !), dont la proportion de sel atteint 350g/l, soit dix fois plus que celle des océans, et supérieure à celle de la Mer Morte (275g/l). Vous vous en doutez, du coup, il est possible, voire recommandé, de s'y baigner, pour voir à quelle point on flotte sans effort. Mais la fraicheur de la journée, nuages obligent, le petit vent, ainsi que la température très froide de l'eau (7 à 8°C) nous refroidissent. Deux brésiliens tentent l'expérience un peu plus loin, et crient tellement il fait froid. Deux françaises de notre groupe sont assez courageuses elles aussi pour y aller, mais ne prennent finalement même pas le temps d'essayer de flotter, et ressortent immédiatement. Pour dire. Vraiment dommage car nous aurions bien aimé essayer cette sensation si rare, et si peu commune. Normalement, vous flottez tellement que vous pouvez sortir les bras et les jambes dans une zone où vous n'avez pas pieds, en étant par exemple sur le dos. Franchement, c'est rageant. Nous avions d'ailleurs pris une bonne quantité d'eau pour nous rincer, car apparemment le sel vous colle à la peau, et forme une pellicule blanche. Vous connaissez cette sensation après un bain dans l'océan, vous imaginez avec une salinité dix fois supérieure. Un vrai marais salant à vous tout seul ! Le soleil commence à se coucher, et un Pisco Sour nous est offert, ainsi que quelques biscuits et chips, que nous prenons au milieu de rien, à côté de ce lac, en discutant avec tout le monde, tous surpris par exemple du prix de notre billet tour du monde, si faible par rapport à un aller retour Paris-Santiago aux regards de nos quinze destinations, quand nous répondons à certaines de leurs questions. Nous rentrons, en passant une demi-heure à rouler sur ce sol en terre et en sel, dans la lumière décroissante. Nous arrivons vers 18h, et passons à l'office du tourisme pour connaitre la météo de demain, qui sera apparemment similaire à celle d'aujourd'hui. Pas question du coup de faire une autre excursion, et de louper des choses comme aujourd'hui à cause du temps pourri. Direction l'agence pour organiser tout cela. Fred ira faire du Sandboard, activité pour laquelle la météo compte peu, et interdite à Audrey à cause de sa chute en ski, qui laisse encore des traces. Il découvrira du coup la Vallée de la Lune et la Vallée de la Mort avant elle. Nous voulions procéder différemment pour éviter cela, mais la météo nous fait changer nos plans.
En nous dirigeant vers un restaurant pour dîner, nous rencontrons deux filles belges, tous les quatre en train de regarder le menu affiché sur un grand panneau noir à l'entrée, et discutons avec elles un bon quart d'heure. Elles souhaitent en savoir plus sur notre tour du monde, un rêve pour elles, et nous proposent de dîner avec elles demain soir pour poursuivre tout cela. Nous retournons au même restaurant qu'à midi, "La Estaka" pour se faire plaisir, puis dans nos quartiers vers 22h. Demain, nous déménageons pour une autre guesthouse.
jeu.
25
juil.
2013
Holà chicos ! Como estan ?
Pour ce premier jour, lever à 9h sous un ciel parfaitement bleu. N'ayant rien pour petit-déjeuner, nous allons dans un restaurant sans prétention choisi au hasard dans la rue principale, à
deux minutes à peine de là. San Pedro, c'est une rue en terre autour de laquelle s'articulent d'autres rues perpendiculaires, elles aussi en terre, bordées de petites maisons collées
les unes au autres, abritant restaurants, guesthouses, ou agences de voyage. Près de la petite place aux murs blancs et à l'église sans prétention, l'un des volcans du coin apparaît
dans la continuité d'un passage, majestueux et pourtant très commun dans cette région. Les visages, eux, ne sont plus du tout les mêmes que ceux auxquels nous sommes habitués, avec des
traits beaucoup plus marqués et typés. Les ponchos sont légion dans les petites boutiques des alentours. Nous sommes vraiment dans une autre partie du continent. La ville a été conquise par
les incas en 1450, puis par les espagnols en 1540, avec l'objectif avoué de faire connaitre la civilisation et les valeurs de bonté et de générosité de la religion dominante en Europe
renaissante, en demandant au passage aux peuples d'alors de travailler gratuitement pour l'empire si possible bien évidemment. Sachant que nous pouvons nous connecter à Internet là où
nous sommes, dans cette barraque colorée dont la pièce principale n'a pas de toit, nous y restons jusqu'à 13h. Il y a ici 5000 habitants, vivant pour la plupart un peu plus à
l'extérieur, aux portes du désert, réputé pour être l'un des plus arides au monde, et constitué de sel (d'où le nom "Salar de Atacama") suite aux dépôts et à l'évaporation d'eau ayant coulé
il y a des millions d'années le long des parois des dizaines de volcans tout autour. Ici, le ciel est l'un des plus purs au monde, grâce à l'absence d'humidité, de l'altitude, de sa
situation dans l'hémisphère sud, et du désert tout autour. Ce n'est pas un hasard si le Chili, et plus particulièrement cette région, est l'un des hauts lieux de l'astronomie mondiale,
où un grand nombre de téléscopes professionnels et militaires ont été construits et travaillent sur des projets d'envergure mondiale. La très récente installation du radiotélescope
géant ALMA, ouvert seulement depuis mars 2013, financé par le Japon, l'Europe et les USA, permettant d'étudier grâce aux 66 antennes d'une dizaine de mètres de diamètre (vous savez, comme
sur la couverture d'un album de Dire Straits) les nuages interstellaires, les trous noirs supermassifs, ou encore la formation de planètes, illustre la qualité du ciel de la région
d'Atacama. La région a l'air particulière, et nous avons hâte de découvrir les paysages et les couleurs qu'elle offre, tellement nous en avons entendu de bien sur les forums en
préparant notre voyage. Cela fait longtemps que nous attendions d'être ici, et c'est maintenant que cela se passe.
Vers 12h, de la musique se fait entendre au fond de la rue. Tout le monde sort pour regarder une procession avec fanfare, danseurs, et petit char religieux. C'est la San Santiago, un saint
respecté dans le coin. Il y a ici tout type de touristes, des jeunes qui viennent avec des amis comme des couples sexagénaires, ou encore des voyageurs solitaires ou en tour du monde
(quelle idée...). Bien que la ville ne soit pas urbanisée, c'est un haut lieu touristique, car tout ce qui se visite dans le désert part d'ici. Les prix sont donc gonflés, et il est
difficile de faire autrement. Nous mettons les chiffres du blog à jour, et constatons une nouvelle fois le nombre de kilomètres parcourus en car la semaine passée, doublant ceux déjà
effectués depuis notre départ. Une fois sortis, avant d'aller comparer les prix et voir si notre liste de choses à faire est réalisable, nous tentons de trouver un medecin pour Audrey, qui a
un peu plus de mal à respirer à cause de ses douleurs. Anthony, le français rencontré hier et tenant une agence juste à côté, nous aide lorsque nous lui demandons son avis. Il nous
confirme qu'il n'y a pas de médecin ici, et nous amène chez une masseuse qui pourra peut-être nous aider. Nous la trouvons, après avoir dû demander l'avis d'un ou deux locaux qu'il
connait, et y restons jusqu'à 15h. Elle détend tous les muscles douloureux d'Audrey, et confirme que rien n'est cassé. Une côte est peut-être félée, ou quelque chose du style. Le seul
moyen de s'en assurer est d'aller faire une radio à Calama, ce qui exige de rester un jour à l'hôpital là-bas. Le massage ayant fait du bien, la respiration devient plus facile. Un
bandage est mis en place autour de l'endroit douloureux. Audrey décide d'attendre et de voir dans les jours qui viennent, sachant qu'il n'y a pas de solutions miracles pour ce genre de
bobo, et qu'il faut simplement éviter les efforts et rester au calme. Nous partons ensuite dans la direction de la guesthouse où nous voulions aller initialement, complète jusqu'à
demain, car la notre n'est pas terrible à notre goût, pour des raisons expliquées dans l'article précédent. Le rapport aux propriétaires est en outre assez froid, et peu aimable. Quand on
vous dit que c'est très touristique par ici... nous réservons deux nuits pour après-demain, samedi et dimanche, et nous verrons ensuite. La faim nous appelant, nous allons manger un
poulet frites "aux délices de Carmen", suite à la recommandation du français de tout-à-l'heure. Situé dans une rue parallèle, c'est correct, copieux, et abordable. Ici, Audrey a
l'impression d'être dans une sorte de parc d'attraction, car les rues ressemblent à des décors de carton-pâte, avec de nombreux touristes allant et venant. Mais non, c'est bien réel et
authentique. Cela a en revanche peut-être inspiré certains décors de films, et peut du coup donner la sensation d'être autre part. Puis nous faisons le tour des agences pour comparer les
prix des excursions, et planifier les jours à venir. Nous vivons un moment étrange quand nous demandons, dans une agence plus chère que les autres, ce qui justifie l'écart de prix, et
que la personne nous répond qu'elle ne sait pas, et que les tours sont similaires à ceux des concurrents. Nous qui pensions que cela était dû à un plus faible nombre de touristes lors des
sorties prévues, ou à des choses plus personnalisées, nous nous regardons sans comprendre. Quand nous demandons ensuite pourquoi nous devrions réserver ici, elle nous répond que c'est
partout la même chose. Incroyable. C'est clair, nous n'irons pas chez eux. Finalement, nous retournons, après avoir regardé quelque autres endroits, chez Anthony, dont l'offre n'a pas
l'air trop mal. Nous demandons des infos sur les quatre grandes journées ou demi-journées de visite que nous souhaitons faire (Lagunas altiplanicas, Laguna Cejar, les geyser d'Atacama, et la
Vallée de la lune), ainsi que sur le sandboard (une activité permettant de faire du snowboard sur une dune de sable). Antnony nous informe qu'une version étendue des Lagunas
Altiplanicas est possible, incluant deux ou trois autres endroits apparemment assez jolis, en tous cas sur les photos qu'il nous montre. C'est un peu plus cher, mais cela nous tente
bien. Le contact passant bien avec lui, il ne cherche pas à nous cacher certaines choses, comme la durée des trajets pour rejoindre ces endroits (souvent à une ou deux heures d'ici), et
nous explique comment fonctionnent la plupart des agences, qui regroupent leurs clients auprès de prestataires communs. Bref, il est clair, semble honnête, ne nous force pas la main, et est
détendu, sans avoir le côté négatif de l'aspect commercial de ce genre de rapports. Et il nous a bien aidé ce matin, tout comme hier lorsqu'il nous a conseillé de faire le tour d'autres
agences. Nous prenons le récap des excursions, des prix affichés et de la réduction qu'il est prêt à nous faire si nous bookons tout par lui, et verrons ça demain, une fois que la nuit
aura porté conseil. Nous retournons à la guesthouse vers 16h30, et passons du temps sur Internet pour la suite de notre voyage. Il fait beau, mais la température refroidit vite quand le
soleil disparait, et nous sommes toujours surpris par l'ambiance du coin, si différente des dernières semaines. Nous ressortons pour dîner vers 21h, n'ayant pas fait de course
et n'ayant pas très envie de faire à manger dans cette cuisine mal équipée et sans chauffage. Nous allons dans un bar tout près, et rencontrons une bande de français nouveaux
trentenaires, voyageant à moto ensemble en Amérique latine. Certains travaillent au Chili et font une pause pour partir sur la route, ou ont un bateau et envisagent de partir dans
quelques mois pour traverser le Pacifique, quand ce n'est pas un qui a pour objectif de partir en Antarctique. Ils sont très sympa, et nous invitent à leur table. Nous prenons quelques
verres, mangeons une pizza, et échangeons nos expériences en récupérant au passage des infos sur la Bolivie et le Pérou, comme les endroits où se rendre si nous voulons aller passer
quelques jours dans la jungle. L'ambiance est bonne et animée, notamment grâce au DJ qui enchaine les disques. Vers 1h du matin, l'endroit ferme. Nous discutons tous encore un peu dans
la rue, où tout le monde reste à faire de même. Audrey rentre se coucher, et Fred poursuit la soirée avec deux de nos compères, dont l'un est anglais et travaille en comédies musicales
à Londres, et se rend avec eux en moto dans un champs juste à l'extérieur de la ville (nous mettrons une heure à y arriver, en se rendant compte que le premier endroit où nous allons,
similaire mais plus petit, n'est pas le bon), où deux grands feux sont allumés, un DJ passe des disques, et un bar plus ou moins improvisé est ouvert pour servir la bière locale, la
Escudo. Il y a même quelques stroboscopes. Fred rentre vers 6h du matin, après avoir fait la fête avec nos amis français et anglais, et rencontré une dizaine de chiliens bien
sympathiques. Heureusement que rien n'est prévu demain matin, et que l'excursion que nous avons en tête se déroule l'après-midi.
Adios amigo, que te vaya bien !
mar.
23
juil.
2013
Bonne surprise dans la guesthouse complètement endormie à 6h15, les tables du petit déjeuner sont prêtes, et nous pouvons avaler quelque chose. La fille est même réveilée pour nous préparer un café ou un thé. Le taxi est à l'heure pour nous emmener à la gare routière. Il est même un peu en avance. Coût : 4,5 euros. Fred monte à l'avant, comme la plupart des gens ici. Il y a dejà un peu de monde au terminal des bus, où nous achetons rapidement notre billet pour Puerto Montt, distant de 390km. Nous sommes assis en bas, contrairement aux autres fois. C'est moins bien en fait. Nous faisons attention à nos affaires, comme toujours en Amérique Latine, mais, après vérification, il n'est pas possible que quelqu'un nous prenne nos sacs à dos posés par terre depuis la place arrière. Le car, comme d'habitude, est extrêmement ponctuel, et part à 7h30. Nous nous rendormons un peu, allongés dans le siège semi-cama, et nous réveillons une fois le jour levé lorsque nous arrivons à la frontière avec le Chili, à 9h30. Nous sommes sur un col de la cordillère, tout entouré de neige brillante sous les rayons du soleil. Nous descendons du car, faisons tamponner notre passeport dans ce poste qui barre la route. Nous remontons après avoir fait la queue comme le reste des passagers, et mangeons le petit-déjeuner qui nous est servi (un gateau au dulce de leche et un paquet de chips à la pizza), accompagné d'un thé ou café (à volonté en libre service, comme sur tous les trajets un peu longs). A 10h15, nous arrivons à la frontière chilienne, après avoir continué sur cette unique route passant dans la montagne. Les sacs sont sortis de la soute pour être inspectés par les chiens, qui reniflent également nos petits sacs à dos, et passent à l'intérieur du bus. Des affiches préviennent qu'il est interdit de faire rentrer au Chili de nombreux aliments, comme le bout de saucisson qu'il nous reste d'avant-hier. Nous nous demandons si les chiens vont le sentir, mais non, nous pourrons le terminer tranquillement quand nous en aurons envie. 20 minutes plus tard, après avoir une nouvelle fois fait la queue, nous repartons, toujours sous le soleil et un grand ciel bleu. Mais encore 20 minutes plus tard, nous sommes sous un gros ciel gris, alors que nous traversons sûrement la région des lacs chiliens, et sommes désormais du côté ouest de la cordillère. Après encore 2h30 de route, nous voilà arrivés. Nous reculons notre montre d'une heure, lorsque nous retrouvons la gare routière de la ville, qui nous rappelle parmi nos premiers souvenirs du Chili. C'est drôle de revenir ici et de se remémorer les choses que nous avons faîtes entre-temps. Comme 300 jours par an ici, le temps est pluvieux.
Nous posons nos sacs au depose-bagages, afin de nous libérer de ces poids que nous souhaitons éviter de porter en attendant de savoir comment rejoindre Santiago, et passons voir quelques guichets dans le grand hall pour consulter certaines compagnies de bus et nous renseigner sur les prix et les horaires y allant. Il y en a un ce soir qui nous interesse plus particulièrement, à cause de la promotion du jour. Il part à 19h45. Légers comme l'air, nous retrouvons ces rues que nous connaissons, et allons manger un bout au Mac Donald, pour profiter également de la connexion wifi. Ayant du temps à revendre d'ici ce soir, nous travaillons un peu, même si Audrey doit repasser à la gare routière pour récupérer son écharpe, oubliée dans le bus. Il est 15h35 quand nous sortons, pour aller à l'office du tourisme, puis à l'agence de Sky Airlines, une des deux compagnies aériennes chiliennes, afin de voir s'il n'y a pas un avion abordable pour rejoindre Santiago, ou mieux, Calama, une des villes du nord du pays, incontournable pour aller à San Pedro, et visiter le désert d'Atacama. Pas de vols interessants pour ces destinations, mais un billet partant demain de la capitale pour y aller, pour une centaine d'euros. Cela dépasse notre budget, mais nous ferait gagner de nombreuses heures, sachant qu'il y a 1300km entre les deux villes, et éviterait d'enchainer encore 20 heures de bus demain. Nous nous décidons donc et réservons le vol, qui partira à 14H30, soit quelques heures après notre arrivée à Santiago. Cela se goupille donc bien. Nous avions envoyé un message à la Maria José (comme ils disent ici, en mettant "le" ou "la" devant un prénom), l'amie d'Arnaud chez qui nous avions passé une soirée quelques jours après avoir atterri au Chili, qui nous a proposé de nous héberger si nous devions passer une nuit dans la capitale. Tout contents que tout soit bouclé, nous allons prendre un chocolat chaud (où le lait est quasiment remplacé par de l'eau) dans un centre commercial pour nous connecter de nouveau à Internet. A 18h15, toujours dans ce centre commercial, nous achetons un hot-dog (nappé de guacamole) à emporter et, après avoir discuté avec les employés de ce fast-food, obtenons sans rien demander deux boissons gratuites et la taille supérieure du sandwhich. Ils ne devaient jamais avoir eu de français comme clients et nous aiment bien. Ils sont sympas ces chiliens. Nous partons pour la gare routière, en terminant de manger sur le chemin.
Nous récupérons nos sacs, et montons dans le bus. Bye bye Puerto Montt, cette fois-ci, c'était la dernière. Bye Bye la Patagonie également. Nous nous dirigeons vers la deuxième partie de notre aventure chilienne, et allons bientôt complètement changer de décor, pour nous retrouver dans le désert, à 3000km de là, et avec 20 degrés de plus au thermomètre. Nos places dans le bus sont celles que nous enviions à nos voisins il y a trois jours : à l'étage, tout devant, face au grand pare-brise. Une prise électrique est disponible, et il y a même du wifi (mais qui ne marche pas). Nous commençons à être habitués aux longs trajets en car, et aimons bien cela. Le bus part à 19h45. Nous arriverons demain matin à 8h. Deux films sont diffusés, mais nous ne regarderons que le premier avant de nous endormir, et après un arrêt impromptu au milieu de l'autoroute pour récupérer des gens ainsi que deux ou trois choses dans une voiture garée sur la bande d'arrêt d'urgence. Et non, après avoir demandé en rigolant à l'un des chauffeurs, ce n'est pas de la drogue, même douce.
Le lendemain...
La nuit s'est bien passée, même si nous nous sommes réveillés quelques fois, arrêts obligatoires oblige. Franchement, les trajets en car passent vraiment bien ici. Nous aurions presque voulu que celui ci continue pour regarder un petit film, encore un peu endormis en mangeant le petit plateau faisant office de petit-déjeuner que l'on nous sert à 7h, au moment où les lumières s'allument pour réveiller tout le monde.
De retour à Santiago, nous faisons un petit bilan de ce que nous avons vu dans le sud du pays. Nous sommes contents d'avoir pu faire tout ce que nous voulions, même si nous sommes passés à côté de pleins de choses, comme les fjords de la côte patagonique, Ushuaïa, la culture téhuelche, la région des lacs (juste traversée en bus la nuit précédente), ou encore l'île de Chiloé et ses églises classées à l'Unesco.
Pas le temps de profiter de la ville, nous avons toutes nos affaires avec nous, et devons rejoindre l'aéroport. Audrey ayant encore mal depuis sa chute d'avant-hier, nous prenons un taxi, même si cela augmente les frais, que nous attendons sagement en faisant la queue. Il fait beau, nous sommes d'excellente humeur. Cela nous fait bizarre de nous dire que nous allons être dans le nord du pays, si loin des endroits où nous étions ces dernières semaines, pour voir quelque chose de très différent, dont nous parlions lors de la planification du voyage. L'impression d'être télétransportés à des milliers de kilomètres de distance, sans s'en rendre compte. Nous étions en effet quasiment avant-hier à El Chalten. Et avons en quelques jours parcourus autant de bornes en car que depuis que nous sommes partis de notre terre natale, tout comme le temps passé assis sur un siège de bus, soit environ 2500km et autant d'heures nécessaires pour les effectuer en roulant à 80 km/h. Vers 9h30, nous arrivons au terminal. Nous enregistrons les bagages rapidement, recherchons une zone wifi (pas évident), et nous promenons dans une ou deux boutiques, dans lesquelles nous regardons quelques livres, comme celui du Dakar 2013, ayant eu lieu dans la région en janvier (nous l'avions oublié). Nous allons prendre un chocolat chaud quelque part, et tentons de trouver un endroit où dormir ce soir, mais réalisons que la plupart des auberges sont complètes, après avoir obtenu une réponse négative de celle trouvée hier. Nous nous posons un peu dans un bar sympa dans lequel nous mangeons un morceau, et savourons ce temps mort qui nous est offert en attendant l'avion. Nous nous disons que nous avons de la chance d'être là, à attendre un vol qui s'apprête à nous emmener dans une nouvelle région du monde et du continent, et que bien que nous soyons dans la dernière partie de notre voyage, il nous reste encore un sacré temps à l'échelle normale. Nous pensons également au retour, et au casse-tête pour raconter, montrer les photos et vidéos, et réussir à voir tout le monde sans attendre trop de temps. Nous ne savons d'ailleurs toujours pas comment faire, tellement nous avons envie de vous voir et du temps qu'il va falloir pour se retrouver, et savourer sans être pressé la chaleur des retrouvailles. Qu'est-ce que ça va être bien. Tellement de choses à dire, de questions à répondre et à vous poser. Nous sommes curieux de vous écouter, et avons hâte de partager. Manger quelques bons bouts de fromage, de saucisson, et quelques bonnes bouteilles aussi. Ah là là, on imagine le jour où nous rentrerons, les premiers coups de fils, les premiers moments avec vous, et ceux d'après. Pffuiii, c'est fou. Bref, il est vite 13h35, l'heure d'embarquer.
14h10, nous montons dans l'avion pour Calama. Comme nous le disions, une nouvelle partie de notre voyage en Amérique du Sud commence. L'avion décolle, survole Santiago, puis longe la chaine andine, nous permettant d'apercevoir l'Aconcagua, le plus haut sommet du continent, d'où Fred espère un jour pouvoir prendre quelques photos du sommet après de longues et nombreuses journées de marche. Et pourquoi pas avec certains d'entre vous ? Puis, au bout d'une heure, nous survolons un désert, des plateaux et des collines, nervurées par d'anciennes rivières, aux couleurs beiges, ou roses. Nous sommes autre part. Cela nous rappelle l'arrivée en Australie, au milieu du désert. Nous apercevons une grande mine à ciel ouvert en bas. Le Chili est en effet un des principaux producteurs de cuivre au monde.
A peine sortis de l'avion, la température n'a rien à voir avec les dernières semaines. Il fait 25°C. Nous attendons longtemps le bagage d'Audrey, et pour cause, puisqu'il est arrivé avec l'avion précédent. Ouf, en ne le voyant pas sur le tapis roulant, nous avions peur qu'il soit resté à Santiago. Cela nous fait perdre un peu de temps, mais nous finissons par prendre un taxi pour le centre ville, d'où nous prendrons un car pour rejoindre San Pedro, point de départ de toutes les excursions dans le désert. Cela revient moitié moins cher que de prendre le mini-bus de l'aéroport qui nous déposerait directement là-bas, à la guesthouse que nous avons finalement trouvée depuis l'aéroport tout-à-l'heure. Dans le taxi, nous apprenons qu'il fait ici plus chaud en hiver qu'en été, car il y a alors plus de nuages, et donc moins de chaleur. Dans Calama, une ville dans laquelle nous ne faisons que passer, nous apprenons que nous ne sommes pas au bon endroit pour prendre le car que nous avons en tête. La personne derrière le guichet de la compagnie est sympa, et nous arrange le coup pour pouvoir attraper le bus menant à San Pedro lorsqu'il passera par là, après que Fred soit allé voir autre part à 500m de là - et se soit proméné du coup dans d'autres rues autour - une autre compagnie, dont le bus partait dans trop peu de temps pour pouvoir déplacer nos affaires et être à l'heure. Pas grave, nous attendons, puis faisons signe au car "Turbus" de s'arrêter, et achetons notre ticket directement, les autres passagers étant montés au terminal principal. Nous arrivons à 19h20, de nuit, après un joli coucher de soleil sans aucun nuage dans le ciel. Dans cette cour où le sable est soulevé par les cars et voitures du coin, nous nous sentons perdus au milieu du désert. Les rues ne sont pas goudronnées, et les murs autour sont en terre séchée ou en sable. A part l'arrêt où tout le monde descend, dont pas mal d'occidentaux à sacs à dos, il n'y a quasiment rien. Audrey a mal au dos, et ne peut porter son sac. N'ayant ni bus ni taxi aux alentours, et de nuit sans beaucoup d'éclairage, nous décidons de rejoindre la guesthouse à pieds (Fred avec trois sacs et Audrey l'un des 15l), puis de rentrer dans une agence de tourisme proposant les excursions classiques du coin, encore ouverte (la seule maison du coin où il y a de la lumière et une porte ouverte), pour demander de l'aide, afin que la personne appelle notre guesthouse pour que l'on vienne nous chercher. Nous avons en effet peur de casser l'une des poignées des sur-sacs, à force de les porter de cette manière, et cela est épuisant, et nous oblige à nous arrêter tous les 50m. Nous attendons un peu, puis, au bout de 20 minutes, une voiture arrive pour nous prendre. Le jeune au volant est le fils du propriétaire, que nous remerçions chaleureusement quand nous arrivons à bon port, à 20h. Nous sommes à 2500m d'altitude.
Nous nous installons, découvrons les lieux, si différents dans leur architecture et agencement (grande cour, mur en terre cuite, rue étroite en sable, aucun étage...), et nous installons dans notre chambre, dans laquelle il n'y a que deux lits individuels. Pas terrible (rien pour poser ses affaires, pas de poubelle...), mais tout est propre, de la chambre aux salles de bains communes. Par contre, il fait froid, probablement 3 ou 4 degrés. Quelle différence avec cet après-midi. Nous sortons pour découvrir la rue principale de la ville, où pas mal d'autres voyageurs se baladent. Nous sommes clairement dans un endroit touristique, bien que faiblement aménagé, où tout le monde est là pour voir les mêmes choses. Des dizaines d'agences proposent les mêmes excursions, souvent à des prix similaires. Nous rencontrons Anthony, un français de Toulouse ayant une agence, et discutons avec lui. Nous découvrons également une agence permettant de monter au sommet des volcans du coin, culminant dans l'ensemble vers 6000m. Fred est bien sûr interessé, car cela lui permettrait de franchir cette barre symbolique qu'il a tutoyé. Mais ce qui est proposé n'est pas sérieux. Loin d'être des treks et de véritables ascensions, ce sont des tours d'une journée, où le client monte en voiture à 5400m, et termine à pied pour atteindre le sommet. Pas sérieux du tout quand on connait l'importance de l'acclimatation à l'altitude (surtout une fois les 5000 franchis), et quand on souhaite réaliser une véritable performance. Hors de question en effet de tricher et de monter là haut en voiture pour finir à pieds. On se souvient de "l'ascension" du Mont Blanc de Zidane, héliporté quasiment au sommet pour ne monter que quelques centaines de mètres de dénivelé. Bref, une belle blague. Dommage, car cela aurait bien tenté Fred. San Pedro est notre dernière ville au Chili, avant de nous diriger vers la Bolivie. Nous sommes pressés de découvrir la beauté des paysages du désert d'Atacama. Nous allons dîner dans un restaurant ouvert assis au coin d'un grand feu central, en ayant malgré tout un peu froid à cause de l'absence de toit (mais l'assortiment de viande grillée est excellent), rentrons, prenons une douche rapide et un peu trop fraîche pour nous, et nous couchons vers 23h.
lun.
22
juil.
2013
C'est reparti pour un tour aujourd'hui. Nous nous levons un peu plus tôt, afin de pouvoir prendre le bus collectif de 9h, dans la grande rue à presque dix minutes de chez nous, et pouvoir commencer à skier pas trop tard. Car aux sports d'hiver, les pistes ferment vers 17h, voire 16h30. Il fait froid, et le temps est plus couvert qu'hier. Dommage. Apparemment, ça devrait durer toute la journée en plus. Nous nous dirigeons donc vers l'arrêt de bus, faisons la queue au milieu de personnes ayant parfois déjà leurs skis ou leur planche de snow sous le bras, et montons dans les premiers, nous permettant d'avoir une place assise. 20 minutes plus tard, nous arrivons à la station, et retournons au même endroit qu'hier pour prendre le matériel, puis le pass pour les remontées mécaniques. A 10h30, nous sommes prêts.
Audrey hésite à reprendre un cours. Malheureusement, ceux-ci sont dispensés l'après-midi (il y en a bien le matin, mais ce sont des cours particuliers bien trop honéreux pour nous). Nous
préférons donc passer la journée ensemble, sachant que l'expérience acquise si elle prenait ce cours ne pourrait être mise à profit dans la foulée. Sachant que ce n'est que la deuxième
fois sur les pistes pour Audrey, Fred lui propose de passer au moins une heure sur la petite piste verte juste à côté, où les canons à neige tournent à plein, afin de pratiquer ensemble
ce qui a été appris hier. Nous irons ensuite plus haut, afin qu'elle puisse au moins voir à quoi ressemble un domaine skiable, et voir une partie de la vue. D'autant que cette
piste verte est toute petite, bondée, et qu'après une bonne heure, nous tournons un peu en rond. Nous avons en effet descendu tout doucement la faible pente ensemble, en essayant de
faire de grands virages, et pris le tire-fesse une bonne dizaine de fois pour reprendre les exercices de chasse-neige. Après quelques hésitations, et après avoir senti un peu plus le
comportement des skis sur la neige, en allant tout doucement, Audrey s'en sort plutôt bien. Il est 11h40, et nous décidons du coup de prendre un télésiège pour monter. Audrey propose à
Fred de rester en bas pour ne pas l'handicaper, mais il préfère être avec elle, même si sa journée sera différente et qu'il skiera un peu moins. Ce qui est sympa, c'est quand
même d'être ensemble, et de faire les choses tous les deux. Pas question qu'elle reste à ne rien faire pendant que Fred s'amuse sur les pistes. Audrey n'est pas rassurée sur le
télésiège, mais apprécie en même temps de voir ce versant couvert de neige et de skieurs juste en dessous. Nous arrivons en haut, et descendons facilement, même si c'est une première
pour elle. Elle s'en sort admirablement, et suit bien les instructions de Fred. Etre là haut l'impressionne un peu néanmoins, car il va falloir descendre un peu, ne serait-ce que pour
arriver à une remontée mécanique un tout petit peu plus bas, et éventuellement redescendre si cela ne lui plait pas. La piste est une bleue, un peu plus pentue que la verte de
tout-à-l'heure. Il n'y a en effet pas assez de neige sur le domaine pour que les autres pistes vertes soient ouvertes, toutes au niveau de la partie inférieure. Pas d'autres choix donc,
puisque nous sommes là haut, que de devoir descendre par là, ce que nous savions. Sur le télésiège, Fred a montré à Audrey le parcours bien large, à base de grands tournants, que nous
allions faire tous les deux, en prenant le temps qu'il faut. L'important est en effet de simplement réussir à descendre, même si cela prend une heure. Nous avançons donc sur la droite.
Fred avance un peu, perpendiculairement à la pente pour ne pas aller vite, en s'arrêtant une dizaine de mètres plus loin. L'idée est de faire de grands S. Nous répêtons les consignes de
sécurité. Audrey parvient à le rejoindre, et nous nous arrêtons au milieu de la piste, moyennement fréquentée, pour faire le point, et répêter le nombre de fois qu'il faut ce genre de
segment. Nous descendons un peu. Audrey n'est évidemment pas à l'aise, puisqu'elle débute, mais réussit à tourner une fois, puis une deuxième. Cela aurait bien sûr été préférable sur
une piste verte, mais c'était le seul choix possible si nous ne souhaitions pas passer la journée tout en bas, sur la piste d'entrainement de 10m, et qu'elle puisse voir à quoi
ressemble les sports d'hiver, avec l'ambiance, les restaurants d'altitude, ou les choses qui vont avec. Bref, pouvoir voir ce qu'est une journée de ski, même si nous allons doucement et
skions peu au final. Nous descendons encore un peu, et sommes à mi-chemin quand Audrey prend un peu de vitesse et double doucement Fred, qui lui demande alors de freiner. N'y arrivant pas,
elle tente de tourner, et prend du coup un peu plus de vitesse, et s'éloigne pour terminer sa course en bas, en évitant une ou deux personnes qui - skis enlevés - attendent pour rentrer
dans le chalet restaurant, mais en faisant un mini vol plané, pour atterrir sur la terrasse du restaurant. Heureusement, rien de cassé, chevilles et genoux intacts, et personne de
blessé. Fred fonce du coup en l'observant partir terminer dans le décor pour voir si tout va bien. Comme toute personne pratiquant le ski le savent, les chutes font partie de
l'apprentissage, et ce ne sera sûrement pas la dernière. Quoique presque pour aujourd'hui, car sa cage thoracique lui fait un peu mal. Et bien sûr, la surprise et l'absence de controle lors
de son premier schuss la bloquent un peu. Il est donc temps de reprendre ses esprits. Nous nous installons dans le restaurant, après s'être bien sûr excusés auprès des personnes
dérangées et qui auraient pu être entrainées, mais qui se soucient surtout de savoir si Audrey va bien. Nous commadons deux pizzas, dans cet établissement bondé, à l'atmosphère et au
look très "sports d'hiver". Nous avons d'ailleurs trop à manger et emportons quasiment la deuxième pizza dans un doggy-bag. Nous souhaitions manger une fondue ce soir, ce sera pizza.
Nous repartons donc, tous les deux d'accord pour dire que la journée est terminée pour Audrey, qui n'a bien sûr plus confiance en elle, et a toujours un peu mal au thorax. Malheureusement, il faut redescendre une petite piste plutôt plate mais pas très large, reprendre un télésiège, et en redescendre une autre pour rejoindre la remontée mécanique qui nous emmènera tout en bas. Pas d'autre choix, sachant que c'était la solution la plus simple et la plus facile compte-tenu du domaine et des autres niveaux de pistes aujourd'hui. Audrey a peur, et ses jambes tremblent un peu. Fred la rassure, lui redit comment faire pour procéder et avancer sans prendre de vitesse sur ce genre de pistes faciles mais peu larges, mais cela ne sert pas beaucoup. Jamais simple d'affronter des difficultés qu'il n'est pas possible de contourner, et de ne pas avoir le choix. Il faut en effet descendre, quoiqu'il arrive. Nous retombons tous les deux, à une allure très faible, quand Fred attrape cette fois-ci Audrey, qui le dépasse de nouveau, pour la faire tomber volontairement et éviter qu'elle ne quitte la piste. Tout va bien, sauf que la miss n'arrive pas à remettre ses skis, à cause de la neige, de la peur qui la paralyse, et du coup qu'elle a pris tout-à-l'heure. Nous décidons du coup au bout d'un moment que le moyen le plus sûr est qu'elle descende à pieds, même si cela doit prendre plus de temps et est pénible. Nous mettons donc vingt minutes à arriver au télésiège, et remontons en haut pour une dernière descente avant de retrouver la remontée qui nous permettra de repartir à la station. Elle essaye de nouveau de descendre un peu en ski, toujours en suivant Fred qui l'encourage, perpendiculaire à la pente, mais il vaut mieux arrêter et effectuer de nouveau la descente à pieds. Une fois arrivée, elle se repose, et attend Fred qui part refaire une ou deux pistes, avant de rentrer avec elle. Elle prend néanmoins une autre télécabine, pour aller plus vite et éviter de devoir effectuer une dernière descente d'une dizaine de mètres, et se fait du coup accompagner par un moniteur, après avoir rencontré un italien sexagénaire qui souhaite l'aider à se faire comprendre en attendant Fred. Bref, la voilà prise en charge par un professionel qui y trouve sûrement son compte aussi. Fred descend donc de son côté, avec l'ensemble des autres skieurs, dans la remontée "Sextuple express" qui permet de rejoindre la station directement. Tout en bas, Fred ne trouve pas sa douce. Elle devrait être là, mais non. Il attend, bien qu'il ait presque fermé les pistes du haut et soit parmi la dernière cinquantaine de personnes à prendre la remontée, puis décide d'aller à l'agence de location de ski, sans succès. Il attend, retourne à l'arrivée du Sextuple, attend, revient...bref, après 25 minutes, pas de trace d'Audrey. Etrange. Elle le retrouve enfin, en lui expliquant que la personne des secours de montagne a été appelée (une question de procédure pour que les personnes ayant des skis puissent prendre la télécabine où elle a laissé Fred), a fait venir une ambulance pour l'emmener au centre hospitalier ("c'est la procédure" d'après lui, même si elle ne souhaitait pas y aller), et a vu un médecin pour voir si tout allait bien, qui lui confirme que rien n'est cassé, et qu'il faut éviter les efforts dans les prochains jours. Le choc a juste été violent. Plus de peur que de mal. Après toutes ces émotions, nous faisons la queue pour reprendre le bus collectif, comme hier, (nous attendons le prochain compte-tenu de la taille de cette dernière) et revenir en centre-ville, où nous tentons d'acheter nos billets pour prendre le car demain matin afin de retourner au Chili, dans la ville par laquelle notre séjour en Patagonie avait commencé, et située sur la même longitude que Bariloche, Puerto Montt. Manque de pot, étant moins de 12h avant le départ, nous devrons les prendre demain matin directement à la gare routière, vers 7h. Il fait toujours froid, et nous faisons attention pour éviter quelques plaques d'eau gelée sur les trottoirs.
Il est 20h quand nous retrouvons Cyril, le gérant de notre guesthouse, qui s'apprête à partir. Nous allons le tenir pendant un gros quart d'heure supplémentaire, le temps qu'il mette notre linge à laver (nous lui avions demandé la veille, mais a complètement zappé, et nous offre du coup la machine qu'il met en route), et nous réserve un taxi pour rejoindre la gare routière demain matin à 6h45, sachant que les bus collectifs n'acceptent que les passagers munis d'une carte spéciale, que nous n'avons pas. Heureusement qu'il nous met au courant, car nous nous serions fait avoir, et aurions dû trouver une solution dans les rues désertes de l'aube naissante. Nous réchauffons la pizza de ce midi, parlons un peu avec la fille, très sympa, qui prend le relai de Cyril pour garder la guesthouse pendant la nuit, et montons nous coucher. Audrey a toujours mal, mais nous nous endormons rapidement, même si Fred prend un peu de temps pour lire sur la liseuse.
dim.
21
juil.
2013
Le temps est magnifique ce matin. La nuit fut bonne et réparatrice. Nous descendons vers 8h30 dans la salle commune, une grande pièce très agréable, où les tables sont prêtes pour le petit-déjeuner, inclus. Nous prenons notre temps, et rencontrons Cyril, le propriétaire, un français vivant ici depuis 6 ou 7 ans. Il nous raconte son parcours, puis faisons de même, et nous parle de l'Argentine en général (niveau de vie, actualité politique, corruption à tous les niveaux malgré la volonté de la présidente, inflation structurelle...). Il nous apprend que la prochaine grande ville est à 600km d'ici (on ne dirait pas pourtant). Le temps passe donc assez vite, d'autant que trainer ce matin est plutôt agréable. Il nous conseille, plutôt que de retirer de l'argent, de changer des dollars ou des pesos chiliens (nous n'en avons pas beaucoup à vrai dire) contre des pesos argentins (aussi appelés "dollars argentins") pour profiter d'un meilleur taux de change. En effet, il n'est pas possible d'obtenir légalement des devises étrangères dans le pays. Les touristes en apportant bénéficient donc d'un taux de conversion préférentiel - en allant dans la rue derrière une boutique - en permettant aux argentins d'en récupérer. Il nous informe également des moyens pour aller faire du ski cet après-midi. Il est en effet dejà 11h.
Une heure plus tard, nous demandons à Cyril d'appeler un taxi pour nous emmener à "Catedral", la station située à 20 minutes d'ici (nous pourrions prendre le bus partant dans 45 minutes, mais sommes pressés). Finalement, c'est lui qui nous accompagne. C'est bien plus sympa, et permet de poursuivre les discussions précédentes. Nous quittons la ville, longeons un grand lac, et arrivons après quelques dizaines de minutes aux abords de la station. Dire que nous sommes là pour skier. C'est franchement inattendu. Il y a peu de neige à cette altitude, mais les pistes sont toutes ouvertes sur la partie supérieure du domaine, dont le point haut culmine à 2100m. Cyril avait passé un coup de fil pour nous mettre en contact avec une agence de location de ski, ainsi qu'un moniteur afin qu'Audrey puisse prendre un cours, car en dehors d'un voyage scolaire très lointain, elle n'a jamais fait de ski. La station est grande, semblable à celles que nous avons en France, même si un peu moins jolie, et moins organisée. Dommage que toutes les rues ne soient pas enneigées, pour que l'ambiance "ski" soit complète. Nous attendons un peu pour obtenir les informations (il y a pas mal de monde), puis rencontrons le moniteur, qui nous explique les options et les prix pour notre demi-journée et celle de demain. Car c'est décidé, nous restons un jour de plus afin de pouvoir réellement en profiter, et avoir un peu plus de temps pour skier, sans avoir l'impression d'avoir juste été de passage. Aux "banos" (les toilettes), une grande carte du domaine skiable de Courchevel est exposée. C'est drôle de voir le nom de ces stations ici. Skis obtenus, pass remontées mécaniques en poche, nous sommes prêts. Il est 14h. Audrey découvre les sports d'hiver. Nous nous séparons, car elle rejoint le groupe et la piste verte juste à côté servant de domaine d'apprentissage. Fred prend un long télésiège, puis un autre, pour arriver en haut des pistes, et retrouve ce sport qu'il aime et qu'il n'a pas souvent l'occasion de pratiquer. Voilà une expérience de plus dans ce tour du monde. La neige n'est pas terrible, et il y a régulièrement, sur certaines pistes, des plaques de glace un peu vicieuses. Le temps est toujours parfait, même s'il fait un peu frais tout en haut. Le domaine est grand, le terrain de jeu honnête. Il est probablement appelé à s'agrandir de nouveau, quand on sait que tous les brésilens viennent ici pour skier. Les versants en face ne sont pas équipés, mais le seront sûrement un jour, car le potentiel est là. En haut, le panorama vaut le détour, avec une belle vue sur les lacs en contrebas, que le soleil éclaire joliment. Le temps passe, et il est vite 16h, heure à laquelle Audrey termine son cours. Fred refait une piste ou deux, puis redescend (en télésiège, car il n'y a pas assez de neige pour retourner à la station en ski) pour la retrouver. Tout s'est bien passé pour elle. Elle a bien aimé, a appris ses premières bases, et vaincu ses peurs. Bravo. Nous racontons nos moments respectifs chez "Rapa Nui", un chocolatier où nous prenons un chocolat chaud (terrible, avec du Dulce de leche dedans) et quelques "Fra-Nui", de petites framboises entourées de chocolat (voir rubrique "bouffe"). Un très bon moment. Nous partons puis allons faire la queue pour prendre un bus collectif pour nous ramener en ville, où nous arrivons vers 18h.
Nous nous promenons un peu, principalement à la recherche de l'agence de car permettant de rejoindre Puerto Montt, au Chili, afin de pouvoir poursuivre après-demain notre route vers Santiago. Apparemment, les seuls départs sont à 8h du matin tous les jours. Le trajet dure 6 heures. N'ayant pas chacun notre passeport, nous ne pouvons acheter les billets maintenant. Nous nous promenons dans les rues autour, plutôt animées, et rentrons dans ces magasins de chocolat qui font aussi la réputation du coin. De grands magasins où sont vendus des chocolats artisanaux, du chocolat en poudre, du matériel pour la fondue au chocolat, du "dulce de leche", ou bien des condiments aromatisés. La ville semble assez grande, n'est pas très jolie en dehors des paysages autour, et abrite pas mal de restaurants de gamme moyenne, avec parfois une influence germanique marquée, et de magasins de souvenirs sans grand intêret (dommage pour vous !). Nous profitons d'être là pour faire quelques courses.
De retour à la guesthouse, nous laissons passer une heure, et descendons pour préparer à dîner. Nous saluons les autres backpackers présents, assez discrets, et travaillons un peu sur la suite du voyage. Demain, nous prévoyons de nous lever pour être à la station tôt, et maximiser le temps dont nous disposons.
ven.
19
juil.
2013
Le bus pour retourner à El Calafate part à 8h ce matin, et de la guesthouse, par chance. Cela nous évite donc de devoir transporter nos sacs sur le kilomètre nous séparant de la gare routière, et de dormir un peu plus tard par la même occasion. Nous sommes néanmoins les premiers levés. En bas, nous sommes par conséquent seuls dans la grande salle à prendre notre petit déjeuner. Même la reception est fermée. Avant de partir, nous tentons de régler les nuits passées ici, mais la machine pour la carte bleue ne fonctionne pas, et nous n'avons pas de liquide. Du coup, la personne de la guesthouse s'arrange avec le chauffeur du bus, en train de prendre un café avec lui avant de décoller, que nous paierons à El Calafate. La confiance règne. Les choses ne se seraient pas passées comme cela partout. Nous rentrons dans le car, bien plus grand que le mini-van pris lors de notre arrivée, et partons à 8h pile. Il fait nuit une bonne partie du trajet, jusqu'à 9h passé, et somnolons un peu. Assis juste à côté du chauffeur, pour voir le paysage, une musique nous surprend. Au milieu des terres de Patagonie, en laissant le Fitz Roy derrière nous, le chauffeur monte le volume sur le son "voyage voyage" de Desireless. Ca tombe bien, voyager, c'est ce que nous faisons. Scène un peu surréaliste. Nous faisons une pause au même endroit qu'à l'aller, dans ce petit hôtel ayant servi de couverture à Butch Cassidy, repartons, et arrivons à El Calafate vers 11h. Le chauffeur n'a pas arrêté de boire son maté tout du long, le faisant passer à un couple d'argentins discutant avec lui.
De retour dans la ville de départ pour le Perito Moreno, impossible de retirer de l'argent. Les quatre ATM que nous essayons ne prennent pas notre carte, ou nous limitent dans la somme que nous
pouvons obtenir. Mince. C'est que nous devons régler notre chambre. Heureusement, le chauffeur est là jusqu'à 17h, et notre car pour Bariloche part à 16h. Nous allons et venons dans la
rue principale, re-essayons les distributeurs de tout-à-l'heure, sans succès. Il fait froid, l'eau est gelée dans le caniveau, mais il fait très beau. Sans savoir comment nous allons
faire, nous nous arrêtons pour manger une (énorme) pizza dans un restaurant ayant une connexion wifi, que nous finissons par trouver. Heureusement, nous avons pu laisser nos sacs dans
le bureau de la compagnie de bus. Nous vérifions nos comptes principaux, pour nous assurer d'avoir assez de fond, et regardons aussi le prix des billets d'avion, pour voir s'il n'est pas
possible d'éviter toutes ces heures de bus à venir. Mais non, même après être passés à l'agence en face et avoir essayé toutes les combinaisons possibles de vols (en ayant même imaginé
passer par Buenos Aires pour rejoindre Santiago). La personne nous précise que l'avion est extrèmement cher en Argentine, surtout pour les étrangers. En effet, le prix du billet
avoisine les 400 euros, avec une escale dans la capitale du pays de 8 heures. Tant pis, nous prendrons le bus, et serons après tout demain soir à Bariloche, pour 130 euros par personne.
Et à vrai dire, nous sommes un peu excités par cette nouvelle expérience, et ce côté routard/aventure. c'est vraiment sympa de vivre tout un tas de choses si différentes. Et même si
cela s'avère pénible, nous l'aurons fait.
En fait, cela ne va pas l'être du tout. A 15h20, nous nous rendons à la gare routière, retrouvons le chauffeur de ce matin, et lui expliquons (en cherchant parfois un ou deux mots dans le dictionnaire de l'Iphone !) que nous n'avons pas réussi à obtenir de cash. Nous lui demandons s'il est possible de régler la somme avec la carte bleue via l'agence de bus pour laquelle il travaille, ou de faire un virement (en espèrant ne pas le faire pour éviter les frais bancaires liés aux virements internationnaux). Finalement, et sans gros problème, la première option l'emporte, et nous payons par carte bleue. Au Chili, les choses sont en général assez simples, et cela fait un bien fou. Voilà encore une transaction qui n'aurait pu arriver dans bien des endroits. A 16h, nos sacs dans la soute, le bus démarre. Bariloche est la dernière destination. Nous avons une place à l'étage, au deuxième rang. Les personnes devant nous ont une superbe vue, juste en face du grand pare-brise. Nous empruntons la route traversant la Patagonie vers l'Est, et apprécions les paysages qui défilent, avec un grand lac dans le fond, et quelques montagnes dispersées, dans un ensemble de couleurs beiges et pâles. La nuit tombe petit à petit. A 19h30, nous roulons sur une quatre voies, et arrivons à Rio Gallegos. Le premier stop pour le chauffeur. Toutes les quatre heures environ, le bus va en effet s'arrêter, comme la loi l'oblige. Nous restons une heure dans cette petite gare routière, où bien des gens attendent leur car, en partance pour une demi-douzaine de destinations différentes. Notre bus part après dix minutes, et nous fait douter de ce que nous avons compris juste avant, à savoir qu'il revient un peu plus tard, après être allé chercher les plateaux repas qui vont nous être servis. En fait, nous avions bien compris. Nous nous en assurons auprès d'une personne voyageant dans le même bus que nous, et qui attend aussi au milieu de tout le monde. L'ambiance nous rappelle un peu l'Inde, c'est drôle. A côté, un supermarché Carrefour nous surprend par sa présence, et nous ramène un instant en France. Le bus revient, et nous repartons, installés dans nos sièges très confortables, que nous pouvons abaisser pour nous retrouver dans une position presque allongée. En gros, c'est le même niveau de confort qu'en Business Class en avion. Une personne distribue à tout le monde une couverture et un oreiller, tire les rideaux de chaque vitre, après avoir distribué un petit plateau repas tout-à-fait correct. Un peu après, les lumières s'éteignent, les quelques écrans plats au plafond s'abaissent, et le film "2012" démarre, en version anglaise sous-titrée en espagnol. Nous branchons nos écouteurs, abaissons notre siège, et profitons du moment jusqu'à minuit, heure du générique de fin. Nous parvenons à trouver le sommeil (personne ne ronfle, une chance dans les trajets en bus), et passons une nuit plutôt correcte (même si nous nous réveillons plusieurs fois à cause de la musique qu'écoute le chauffeur, de la fumée de sa cigarette, ou de la pause un peu bruyante au milieu de la nuit).
A 9h30, Audrey se réveille. Le soleil est levé. Il y a beaucoup de vent. Nous roulons sur une longue ligne droite à deux voies, pas très large (la RN26), teintée de blanc à cause du givre. Un plateau sucré accompagné d'un thé ou d'un café est servi. Quand le bus croise un camion, ça secoue pas mal, car nous passons tout près. Cela fait même parfois un peu peur. Quand il n'y a personne en face, donc assez souvent, nous roulons au milieu, à allure modérée, respectant la limitation de vitesse fixée à 60km/h. Au loin se profilent quelques montagnes pas très hautes avec un peu de neige. Au bout d'un moment, les routes commencent à secouer, à cause de trous dans la chaussée. Certaines parties ont été regoudronnées, mais seulement à ces endroits, créant au passage des différences de niveaux qui se font sentir. Nous roulons en direction d'une ville inconnue appelée Sarmiento. A ce moment (mais ne nous rappelant plus pourquoi au moment où nous écrivons l'article), nous nous disons que nous sommes encore dans une région avec de vrais paysages de cartes postales. Cela fait 17h que nous sommes dans ce bus. Et cela passe finalement assez vite. 11h40. Nous profitons du temps disponible pour écrire un article sur l'ordinateur. 13h20, nouvelle pause, dans une ville à la chaussée complètement gelée, sans savoir où nous sommes. Au départ, un nouveau film est diffusé, pendant que l'on nous sert un nouveau plateau repas : "Anges et Demons". 16h15, un deuxième film commence. Nous préférons revenir sur les jours précédents et faire un récap qui nous servira un peu plus tard. A 18h15, nous arrivons à El Bolson, une ville dont personne n'a jamais entendu parler. Il ne reste que deux heures de trajet. Elles sont un peu longues, surtout dans la nuit, qui tombe assez vite. Nous arrivons à 20h, après 2300km, au lieu des 1400 si la Ruta 40 avait été ouverte.
Sacs récupérés, nous quittons la gare routière, en demandant le chemin vers le centre ville. C'est assez loin. Bariloche est en effet une station de sports d'hiver assez prisée, et la plus grande d'Amérique du Sud. Dans un soucis d'économies et d'aventures, nous marchons à pieds, même dans ce froid sec, après avoir loupé le bus collectif qui nous aurait fait gagner 30 minutes. C'est que nous n'avons pas d'endroit où dormir ce soir, et que bien des choses sont complètes en ce moment. Nous partons donc à la recherche d'une guesthouse, et en trouvons une sur le chemin. Pas très séduisante, assez loin de tout, n'ayant que des dortoirs à disposition. Le brésilien à l'accueil barragouine quelques phrases en français (et se débrouille bien), tout content de les ressortir. Les étrangers aiment bien parler français en général. Cela fait toujours plaisir. Nous préférons continuer à marcher vers le centre, même si Audrey hésite à rester. Les sacs sont un peu lourds à vrai dire. Nous arrivons finalement dans l'une des trois rues principales, en pente (dans le mauvais sens pour nous !), mais ne trouvons pas d'auberges, seulement des hôtels. Nous repartons, continuons, et ne trouvons toujours rien. Nous suivons les conseils d'un hôtelier, montons l'escalier public pour arriver sur une autre rue, mais sommes toujours bredouilles. Ce que nous voyons de la ville n'est pas terrible en outre. Cela commence à durer. Après avoir erré et obtenu un nouveau conseil, nous décidons de nous séparer. Audrey va rester là pour garder les sacs, pendant que Fred va monter les quatre ou cinq rues pour aller voir l'endroit en question, perdu dans une rue déserte. Là-bas, quelqu'un lui ouvre. Seules deux places dans un dortoir de six personnes sont disponibles, et que pour cette nuit. C'est déjà ça, mais bon. Expliquant la situation, Fred réussit à obtenir une autre adresse, celle d'une amie du propriétaire, qui passe un coup de fil sans y croire. Coup de chance, car tout est booké partout, une chambre double est disponible, pour un peu plus cher que prévue néanmoins. Allez, c'est ok. Fred, pressé (Audrey est seule à l'attendre depuis dejà 20 minutes), se fait expliquer l'adresse, mais la personne en face n'est pas très rapide. Le moment est un peu pénible, car en plus, la guesthouse en question ("La Barraca") ferme dans 10 minutes. C'est un peu le stress, car le temps d'aller rechercher Audrey, de lui laisser le choix par rapport aux deux options, et d'aller à l'autre adresse à pied, sacs sur le dos, pas toute proche, nous risquons de passer à côté et de devoir revenir ici. Bref, un vrai périple, d'autant que l'espagnol de Fred est limité. Allez, il repart, et retrouve Audrey, très inquiète, et qui en a marre. Pas trop le temps de tergiverser, il faut décider. Il ne reste que quelques minutes pour arriver à La Barraca, où nous choisissons d'aller. Nous mettons 15 minutes pour y arriver, en marchant aussi vite que possible malgré nos 23 kg chacun. Sur le chemin, fatigue et tension obligent, Audrey en a marre, et craque un peu, souhaitant arriver quelque part et se poser. Voilà en effet deux heures que nous sommes arrivés dans la ville et avons débuté nos recherches. On passe les détails. Bref, nous arrivons finalement à destination, après encore une montée pénible, en sueur sous notre coupe-vent et nos polaires, et trouvons une fille très aimable nous ouvrant la porte. Ouf, ce n'est pas fermé malgré ce que Fred avait compris (rares sont les guesthouses ne répondant plus après une certaine heure.... même en Inde, nous pouvions réveiller des hommes dormant sur un matelas par terre devant la réception dans la nuit). Ces efforts valaient le coup, car l'endroit est très agréable, dans un style "chalet de montagne", avec une grande pièce en bois clair, une cheminée, et une chambre confortable et douillette. Le top. Le truc qui fait plaisir. Les moments qui viennent de s'écouler resteront dans notre mémoire, mais c'est désormais du passé, et nous sommes maintenant là dans cet endroit chaleureux. En gros, nous ne pouvions espérer mieux. Nous qui souhaitons passer un ou deux jours dans cette ville pour aller faire du ski (nos amis espagnols revus à Torres del Paine en avaient fait facilement il y a deux semaines), nous voilà au bon endroit pour passer un petit séjour hivernal. Il est 22h10. Nous prenons une douche, et ressortons pour aller manger un bout et nous remettre de ces émotions. La rue dans laquelle nous arrivons après avoir marché quelques minutes est animée. Les restaurants sont tous ouverts. Dans la plupart, des fondues sont servies. Miam (nous apprendrons qu'elles sont décevantes pour les personnes de nationalité francaise, mais pour l'instant, on se fait des films). A 23h, nous entrons dans un restaurant et commandons une "parilla" de viande (un assortiment assez généreux), des frites, une petite bouteille de vin (du Malbec, le cépage star en Argentine), et prenons une coupe d'Espumante (un vin blanc pétillant, genre crémant... à 3 euros la coupe !). De quoi redonner des forces au corps et à la tête. Objectif atteint. D'autres personnes continuent d'arriver dans le restaurant, bien qu'il soit pourtant tard. C'est normal ici, d'autant qu'aujourd'hui, nous apprenons que c'est "le jour des amis", et que tout le monde est dehors. Nous avons bien fait de sortir dîner. Nous rentrons, en ayant oublié la galère de tout-à-l'heure, et pensons à demain, où nous serons peut-être sur les pistes.
jeu.
18
juil.
2013
Moment fort de la journée : progresser sur une petite arrête en luttant contre le vent
Après la belle et longue journée d'hier, nous espérons aujourd'hui en prendre autant plein la vue, en allant visiter un autre coin du massif, cette fois-ci à l'ouest, pour nous rapprocher de l'autre groupe de sommets connus, le Torre. Nous nous levons donc tôt, sachant qu'il y a plus de quatre heures pour y parvenir, et partons de nouveau vers 9h du matin, au moment où les premières lueurs apparaissent. Nous partons du côté droit du village, et mettons une grosse demi-heure pour en sortir, n'arrivant pas à trouver la direction à suivre pour rejoindre le sentier. Le village a en effet grandit trop vite, et le plan sur la carte distribuée à notre arrivée n'est plus à jour. D'autres rues sont apparues, d'autres intersections, ce qui fait que suivre celles indiquées ne vous mène nulle part. En outre, le nom des rues n'est pas indiqué. Commode pour se repérer. Et à cette heure, nous sommes les seuls dehors. Nous errons, Fred, qui souhaitait se mettre directement en route, est un peu agacé par ces allers et venues qui nous font tourner en rond, à perdre du temps, confirmant notre sentiment d'hier à propos des progrès à faire en terme de fléchage. Nous repartons donc au bout d'un moment vers la guesthouse et refaisons les 800m, avant de croiser une argentine souhaitant faire la même marche que nous. Elle nous dit connaitre le chemin, mais après la première bifurcation, il s'avère qu'elle ne sait pas bien où aller. Nous poursuivons, rencontrons un nouveau croisement de rue, allons au hasard, puis apercevons un panneau, situé en haut d'une petite colline, annonçant le début du chemin. Ouf. On est parti.
Le chemin est classique, étroit, en terre, serpentant à travers la steppe, coincé entre deux flancs pas très hauts. Quelques traces de neige sont présentes. Il fait en revanche assez froid.
Comme hier, il n'y pas un poil de vent. Le début de la marche est un peu monotone, et pas très interessant. Mais au bout de 30 minutes, nous finissons de contourner un bout de
montagne, et tombons sur un joli panorama, regroupant le Fitz Roy et les trois pics du Torre, dont les parties inférieures restent masquées par un autre flanc derrière lequel il va
falloir passer. Ce sera pour dans deux heures. D'ici là, la progression devient un peu plus ardue, non pas à cause de la neige, qui reste discrète et peu gênante, mais à cause de la
glace, et des cours d'eau gelés, notamment ceux coulant sur la paroi par laquelle nous devons passer. Autre part, le chemin disparait sous l'eau, dans une sorte de marécage pas très
grand, mais suffisament embêtant pour nous obliger à trouver un autre passage, ou à en construire un à base de bouts de bois mort. L'argentine est toujours là, mais a du mal à nous
suivre. N'ayant pas de batons, et tenant une gourde à la main, il est moins évident pour elle de passer par là. Elle décide du coup de rebrousser chemin, d'autant qu'elle doit prendre
un bus à 16h, et qu'il reste encore beaucoup à faire. Effectivement, il y a peu de chance qu'elle soit rentrée à cette heure là. Dommage qu'elle n'ait pas continué un peu - même si cette
partie était un peu pénible - car nous tombons peu après, environ 10 minutes, sur le premier point de vue. Devant nous, une vallée partiellement enneigée, avec au fond le Torre, et le
creux au milieu de la montagne qui s'apparente à notre destination finale. Nous faisons une petite pause, et reprenons la route. Pendant l'heure et demi qui suit, nous marchons à
l'ombre - le soleil n'étant pas encore assez haut pour que les rayons passent au dessus du flanc que nous longeons, sur notre droite - et traversons une forêt d'arbres morts, puis une grande plaine partiellement glacée. C'est sympa, mais beacoup moins qu'hier. Du coup, le temps est un peu long. Et
les jambes, ou plutôt les genoux, sont un peu lourds consécutivement à la journée d'hier. Mais peu à peu, nous nous rapprochons, bien que le Torre
disparaisse de notre champs de vision un bon moment, avant de réapparaître magistralement quand nous arrivons sur le point de vue
final, plus enneigé que le précédent, après avoir progressé juste en dessous d'une petite arrête, sur laquelle nous montons en quelques enjambées pour découvrir un grand lac gelé, dans lequel flottent quelques icebergs, et au bout duquel
coulent deux glaciers, partant de chaque côté du Torre et des deux autres sommets. C'est très beau, et de nouveau, le paysage, les couleurs, nous font
penser à une peinture. En revanche, le vent s'est levé, et commence à souffler un peu trop à notre goût. La visibilité est
néanmoins parfaite. Malgré la fatigue après ces deux heures et demi de marche, le vent, et ce qu'il nous reste à faire (nous voulons rejoindre un point de vue optionnel proche du glacier), nous sommes contents, et avons fait le bon choix
d'attendre aujourd'hui pour marcher. Les trois voyageurs avec qui nous sommes arrivés il y a trois jours n'ont par exemple pas eu la chance de voir ce
que nous voyons, à cause des nuages, et n'ont pu prendre que les icebergs en photos, sans savoir ce qu'il y avait derrière. Le Torre
est d'ailleurs réputé pour être souvent caché par les nuages se regroupant autour de la pointe verticale qu'il forme, et frustrer bien des marcheurs. Bref, nous sommes chanceux.
Etant là, nous choisissons de poursuivre le long de la longue arrète contournant le lac par la droite, pour aller au lookout proche du glacier. Apparemment, personne depuis quelques jours n'y est allé, puisqu'il n'y a aucune trace dans la neige, épaisse de dix à vingt centimètres. Les traces précédentes, bien que recouvertes et relativement masquées, se devinent sans grande difficulté. Fred ouvre donc le chemin, et nous voilà à prendre un peu de hauteur, en marchant sur une arrête rocheuse, qui nous emmène vers le début du lac, et donc vers le Torre. Des deux côtés, la pente est faite de cailloux recouverts par la neige, et tombe sur une cinquantaine de mètres, avec un angle acceptable d'une trentaine de degrés. A part le vent qui souffle très fort sur ce chemin exposé, il n'y a pas de difficulté particulière. Quelques bourrasques soulèvent régulièrement la neige, nous obligeant à nous arrêter et à nous retourner pour ne pas en prendre plein la figure. Nous sommes distants d'une vingtaine de mètres, ne nous entendons parfois pas quand l'un parle à l'autre, et nous regardons les premières vingt minutes pour savoir si nous continuons. Il n'y a absolument personne dans le coin, comme depuis que nous avons quitté le village d'ailleurs. Nous mettons une heure à arriver. Nous avons un peu froid, surtout aux mains, malgré nos gants, à cause du vent. Ne trouvant plus le chemin, ayant faim, et doutant que ce dernier continue et passe perpendiculairement à une pente très exposée d'où doivent parfois tomber rochers et blocs de neige (en fonction de la saison), nous nous arrêtons sous un gros rocher, relativement à l'abri du vent, pour manger nos sandwhich jambon/beurre quasi congelés. Pourtant, nous l'apprendrons plus tard, le mirador Mastri est bien là-bas, un peu plus loin que là où nous sommes. Dommage. La vue reste très belle, avec l'ensemble du glacier en face de nous, et la fin d'un autre le rejoignant. C'est d'ailleurs là-bas, sur ce dernier, que les polonais ont monté leur camps de base avant-hier. On comprend qu'ils soient fatigués. Rejoindre le glacier et progresser sur presque deux kilomètres comme ils l'ont fait, en portant tout leur matériel, doit ête épuisant. Nous faisons quelques photos, essayons de nous rechauffer les mains avec un chauffe-main périmé qui ne marche pas, et repartons. Il est 14h20.
Nous mettons de nouveau une heure à retrouver les icebergs et la fin du sentier. L'envie est grande de descendre la faible pente menant au lac, complètement gelé, pour aller voir les blocs de glace, dont l'eau est probablement multi-centenaire, de plus près (quand on imagine qu'ils étaient à un moment en haut de la montagne, et le temps qu'ils ont mis à arriver ici). Fred cède à la tentation, en faisant attention en bas lorsqu'il marche sur la surface gelée. Quelques craquements se font entendre. Après deux mètres, en y allant doucement, une couche de glace cède, et nous voyons que l'eau n'a pas gelée uniformément, mais par couches successives de trois ou quatre centimètres d'épaisseur. Tout va bien. Fred ne s'aventure pas très loin, et est sur la partie la plus gelée du lac. Audrey le rejoint, pour toucher les icebergs, loin d'avoir la taille de ceux des reportages polaires cependant. Mais cela fait bizarre d'être à côté de ces bouts glacés d'un mètre de haut, et d'avoir le lac derrière, puis la chaîne en arrière-plan. Une vision que nous n'avions jamais eue. Nous faisons un petit bonhomme de neige pour laisser une trace, puis repartons, car l'heure tourne, et nous avons trois heures de marche devant nous. Conformément aux prévisions météo, des nuages de haute altitude commencent à voiler le ciel, sans être pour autant menaçants. Après une heure et demi, le Torre, dont nous ne voyons plus la base à cause d'un flanc de montagne, est dans les nuages, et disparait peu à peu, chaque fois un peu plus quand nous nous retournons. La marche est longue, et pas beaucoup plus interessante qu'à l'aller, tout en restant quand même globalement sympa, grâce au décor enneigé. Le dénivelé est négatif, ce qui n'est pas pour nous déplaire après ces deux jours assez intenses. Nous retrouvons la partie par laquelle le journée avait commencé, à devoir descendre en passant sur des plaques d'eau gelée. Rien de très méchant si l'on fait un peu plus attention à certains endroits. Puis la neige se fait moins présente, et nous arrivons à 18h30 à El Chalten, soit 9h30 après être partis, après 24km et 7h30 de marche.
Malgré la fatigue d'Audrey, un peu plus marquée que d'habitude, nous passons à l'agence de bus avant de rentrer. Il nous faut en effet acheter notre ticket pour demain. Nous mettons les voiles pour autre part. Le temps va se gâter, et nous avons fait ce que nous souhaitions ici. Nous paierons demain le bus pour El Calfate - la CB d'Audrey ne marchant pas dans le seul ATM disponible ici - et paierons le bus pour Bariloche là-bas, quand nous achèterons notre ticket. Dire qu'il va falloir faire ce long détour pour rejoindre cette ville d'Argentine, qui n'est qu'à mi-chemin de Santiago, et passer 27h en bus pour y aller. Heureusement que les bus sont confortables ici. Nous passons ensuite à la boulangerie, achetons une petite viennoiserie au dulce de leche (on a une grosse faim à vrai dire), et retrouvons nos quartiers, où plusieurs français de tout âges sont arrivés dans la journée. La douche est un plaisir, tout comme les pâtes carbo que nous préparons. Nous passons notre dernière soirée, bien que fatigués, avec les polonais, une ou deux bouteilles de vin sur la table, et Yvan, l'américain de Chicago, fasciné par notre voyage. Nous lui montrons du coup quelques photos et vidéos, et répondons à ses questions. Quand Audrey part se coucher, vers 23h30, il nous signale que nous sommes les bienvenus dans la capitale de l'architecture. Ca tombe bien, l'avion du retour vers la France transite par là-bas, et nous pensons depuis quelques temps à y passer quelques jours. Fred y est allé une fois et aimerait beaucoup y retourner, surtout avec Audrey. Il reste discuter avec les polonais de leur ascension, leur pose des questions, regarde les cartes avec eux, et lui expliquent où et comment ils ont monté leur tente il y a deux jours. Il en apprend plus sur l'ice-climbing, sur la préparation, la planification et la progression sur glacier, sur cascades gelées et terrains engagés, ainsi que sur les procédures pour tout redescendre une fois l'ascension terminée, et regarde des photos du livre qu'ils ont sur le massif. Une surperbe discussion, qui permet de sentir la tension impalpable propre à chaque ascension, d'autant que celle-ci est technique et de bon niveau, d'après tous les commentaires entendus sur le Torre et sa difficulté. Une vraie performance est en train de se préparer, avec le mental qui se met en marche, mélangeant concentration, angoisse, excitation, confiance, tout en sentant qu'ils s'attaquent à eux-mêmes, comme n'importe quel grimpeur devant un sommet difficile, malgré leur expérience et leurs antécédents. Une chance d'avoir pu échanger avec eux à l'aube de leur départ. Il est 00h30 quand Fred se décide à monter. C'est vrai qu'il faut partir tôt demain matin.
mer.
17
juil.
2013
Journée longue et fatigante devant nous, mais qui va valoir le coup. Le temps est parfait, même si nous n'en sommes pas encore sûrs en nous réveillant à 7h30. En revanche, lorsque nous commandons un taxi à la réception de la guesthouse pour nous emmener derrière la montagne, et prendre donc un chemin différent de l'itinéraire classique pour rejoindre le point de vue "Laguna de los Tres", les premiers rayons apparaissent, dans un ciel pur. Il est 9h. Le taxi n'arrivant pas, une des personnes travaillant ici décide de nous emmener, et d'arrondir du coup un peu sa paye. Tant mieux, comme ça, tout le monde est content. Nous souhaitons aller à la Hosteria El Pilar, sur les conseils de l'américain rencontré ces derniers jours (lui et son frère ont fait le même chemin, et ont adoré), afin d'être presque derrière le Fitz Roy, et de pouvoir le contourner pour retrouver le chemin classique par lequel nous aurions dû arriver sinon, dans un aller/retour moins intéressant. Cela va du coup permettre de voir autre chose, de changer un peu, et de ne pas passer deux fois par le même endroit.
Dans la petite Fiat Uno, heureusement bien chauffée, nous prenons une route qui se transforme très rapidement en piste de graviers, souvent gelée, obligeant notre conducteur à rouler tout
doucement. Après une heure, nous arrivons enfin, en ayant pu apercevoir sur le chemin quelques sommets rosir sous l'effet des rayons lumineux, qui n'éclairent pas encore la vallée dans laquelle
nous sommes. D'ici, nous allons redescendre vers le village, en ayant le massif sur notre droite. On nous dépose devant cette "Hosteria", fermée pendant la saison basse. Bien couverts, nous nous
aventurons vers là où nous pensons voir un chemin, qui nous mène finalement après 15 minutes chez quelqu'un, en tous cas à une petite maison perdue au milieu des bois sans personne autour. Nous
n'étions pas sûrs d'être sur la bonne piste, c'est désormais confirmé. Il faut dire que rien n'est indiqué, ni balisé. Il fait un froid sec, sans vent, qui pique un peu parfois. Nous revenons du
coup sur nos pas, pour retrouver le portail de l'auberge en question, au dessus duquel nous passons pour suivre une piste, qui nous mène devant la porte d'entrée, fermée elle aussi. En regardant
notre carte, sommaire, nous devinons la direction dans laquelle il faut aller, mais le manque d'indications à partir d'ici ne nous permet pas de savoir s'il faut prendre à droite ou à gauche lors
d'une intersection rencontrée une minute plus tard, ni à celle qui suit 10 minutes plus loin. Nous prenons à gauche à chaque fois, en pensant qu'il est préférable de rester sur cette rive,
sachant qu'une rivière, gelée par endroits, creuse la vallée et sépare deux versants. Nous faisons les bons choix, en pestant un peu contre ce manque d'informations, et en comparaison des autres
parcs nationaux dans lesquels nous sommes allés. Clairement, il y a des progrès à faire, d'autant que la région veut rivaliser avec d'autres au niveau mondial quant aux activités outdoor et de
trekking. Ce n'est même pas sérieux, quand on sait qu'il n'y a personne à la ronde, que nous sommes à des heures de marche du village et qu'il n'y a pas moyen de se repérer. Une erreur de
trajectoire pourrait coûter plusieurs heures de marche, sans parler de celles qu'il faudrait pour retourner au village par la piste par laquelle nous sommes venus. Nous passons donc une grosse
demi-heure à marcher dans le doute avant d'être sûr d'être sur la bonne voie. L'idée de devoir rentrer nous traverse même rapidement l'esprit par mesure de sécurité.
Pendant les heures qui vont suivre, nous marchons dans un décor magnifique. Nous surplombons la vallée, et avons tout le massif sur notre droite, éclairé par le soleil. Au sol, la neige tombée il
y a deux jours forme une couche épaisse, suffisante pour couvrir toutes les plantes et ne rien laisser passer, sauf les arbres morts, arbustes ou taillis, eux aussi habillés d'un manteau blanc
d'une vingtaine de centimètres d'épaisseur. Personne n'est passé par là depuis : nous marchons donc dans la neige vierge, le chemin se devinant par déduction (le tapis neigeux y est un peu
affaissé), nos pas faisant craquer la neige, sans rien d'autre autour de nous, et à des kilomètres, qu'une nature vierge, d'un blanc brillant, sous le ciel parfaitement bleu. En gros, c'est une
promenade interminable dans une forêt enneigée que nous faisons. A un moment, au début de notre marche, un bruit répétitif, assez faible, se fait entendre, alors que le silence règne depuis
tout-à-l'heure. Nous nous arrêtons, et découvrons trois piverts en train de taper leur bec contre un tronc d'arbre. Drôle. Ils sont à cinq mètres. Nous continuons, après avoir filmé tout ça. Par
moment, nous arrivons sur des endroits dégagés permettant d'être face au massif, d'où un glacier descend. Nous passons entre des branches, nous faufilons entre des taillis en collant les bras le
long du corps pour éviter de faire tomber la neige se trouvant dessus sur nous, traversons un torrent gelé ou même recouvert par la neige en passant sur quelques lattes en bois disposées pour
former un pont sommaire, elles aussi - comme absolument tout - recouvertes par dix centimètres de neige. C'est superbe, et le plaisir est grand d'être là tout seuls, d'avoir ce décor vierge de
toute trace humaine pour nous, de s'arrêter pour contempler la pureté du paysage, et d'être les premiers à en jouir en formant les premières traces de pas. On se croirait dans un champs de coton,
tellement les petits amoncellements sur les branches de certains arbustes y ressemblent, surtout lorsque ce sont une centaine de ceux-ci que nous longeons pendant des dizaines de minutes, ou un
décor un peu différent mais toujours magique. Plus tard, cela nous fait penser à un faux décor de Noël, comme ceux créés dans les grands magasins de notre enfance, mais sur des kilomètres carrés.
Il ne manque que les boules de couleurs pour décorer tout cela. De même, la neige donne un effet particulier aux arbres en dessous desquels nous passons, qui semblent avoir bourgeonné pour
laisser éclore une myriade de fleurs blanches tapissant les branches. Cela dure presque 2h30. Parfois, des traces dans la neige trahissent le passage de lapins, où d'autres animaux que nous ne
savons reconnaître. Puis nous arrivons à un endroit où il est impossible de deviner le chemin. Une sorte de croisement. Nous cherchons, tombons sur une plaine blanche d'où émergent quelques
touffes d'herbes, revenons sur nos pas en pensant nous tromper, repartons en arrière, partons dans une autre direction pendant quelques minutes, mais ne trouvons pas. Nous sommes moyennement
rassurés, car nous n'avons vraiment pas idée de vers où il faut aller. Il est 12h30, et même revenir totalement en arrière et rentrer au village par la piste de graviers serait interminable.
Audrey commence à baliser. Depuis le début, comme maintenant, il n'y a toujours pas de repères, ni de marques sur les arbres, comme c'est généralement le cas sur les sentiers de montagnes. Nous
reprenons notre première intuition, et utilisant nos bâtons pour suivre le renfoncement créé par ce que nous pensons être un sentier. Nous suivons un torrent gelé, en manquant de glisser
plusieurs fois, ou en entendant parfois la glace craquer sous nos pas. Et finalement, au bout de cette plaine, nous retrouvons un indice, puis tombons sur un panneau indiquant le croisement de
plusieurs chemins, invisibles sous la neige. Après dix minutes, nous arrivons à "Poincenot", un camp sommaire permettant de faire une halte. Il est 13h20, et nous grignotons un bout. Nous
repartons vers 14h, sous un ciel toujours parfait, et bifurquons pour nous diriger vers le point de vue "Laguna de los Tres", l'objectif de la marche d'aujourd'hui.
Le camp "Rio Blanco" (une barraque en bois sommaire et fermée) marque le début d'un nouveau sentier, qui va nous conduire là haut, au sommet du flanc que nous nous apprêtons à conquérir, nous
permettant de rejoindre un endroit au pied du Fitz Roy, dont nous nous sommes rapprochés progressivement depuis ce matin. Un panneau indique que le chemin est potentiellement dangereux, et
réservé aux personnes expérimentées et munis de chaussures adéquates. Ca tombe bien, c'est nous. La montée - 450m de dénivelé sur seulement deux kilomètres, soit l'inclinaison d'une piste rouge
en ski en gros - est prévue en une heure. Nous allons en mettre deux. Bonne surprise, des batons jaunes indiquent le chemin, invisible sinon sous ce manteau de neige, qui devient de plus en plus
épais au fur et à mesure que nous progressons. Nous commençons la marche en enfonçant nos pieds dans quinze centimères, pour rencontrer au bout d'une demi-heure 30cm, puis 50cm encore un peu plus
haut. Heureusement, nous sommes bien équipés, n'avons pas froid, avons les pieds secs, et avons nos bâtons, sans qui progresser sur cette pente engagée serait très difficile. Contrairement à
toutes celles que nous avons faites depuis notre départ de France, cette marche est technique. Fred ouvre le chemin, et Audrey marche précisément dans ses pas. Souvent, surtout après 300m de
pris, la neige dissimule une couche de glace, qui manque de nous faire tomber plusieurs fois. Ce n'est pas facile. Fred adore, en se rappelant les souvenirs du Mt Blanc. C'est quand même beaucoup
plus sympa quand c'est difficile, non ? Nous continuons, à allure d'escargots, puis nous arrêtons à un peu moins de 100m de l'arrête que nous souhaitons atteindre, car le chemin n'est plus
visible, et la glace est présente partout sous la neige. Nous hésitons à continuer. Fred tente de contourner une large plaque de neige qui lui semble instable, et qui cache du verglas, mais ne
parvient pas à créer un passage sur lequel nos chaussures accrochent. C'était engagé mais relativement sûr jusqu'à présent en faisant attention et en étant équipé, cela devient dangereux
maintenant. Le stress est présent, et les esprits concentrés. Après les hésitations de ce matin liées aux manques d'indications, l'heure des choix a encore sonné aujourd'hui. Et bien que tout
cela est raconté en quelques lignes, cela fait déjà un bon bout de temps que nous luttons pour avancer et progresser, avec ce que cela demande d'adrénaline, de plaisir, de craintes, et
d'angoisses. Nous nous consultons pour décider quoi faire, et après réflexion, sachant qu'il est déjà 15h30, que le soleil commence à disparaître derrière le massif, qu'Audrey est fatiguée et peu
rassurée, et qu'il faut tout redescendre, Fred juge qu'il vaut mieux redescendre, et privilégier la sécurité. Comme appris lors de différentes aventures, il faut toujours être humble face à la
montagne. Et tant pis pour le point de vue, qui devait pourtant être superbe. C'est un peu frustrant, mais c'est comme ça. La vue d'ici est en tous cas jolie, avec un lac gelé en contrebas à
droite, la vallée, et la plaine de steppe au loin, coincée entre les deux massifs du coin. Nous commençons donc à redescendre, en faisant attention (il est dans ces conditions moins facile de
descendre que de monter). Nous glissons légèrement une fois ou deux. Et après 10 minutes, nous croisons Glenn, un irlandais de la guesthouse, en train de monter vers le point de vue. Nous lui
expliquons que nous n'avons pas trouvé de moyen de passer le tapis de glace dissimulé sous la neige, et il nous propose de le suivre. Il connaît bien le coin, le chemin, et est déjà venu dans la
région, notamment pour une ou deux ascensions. Nous nous regardons, et Audrey lit l'envie dans les yeux de Fred. C'est donc décidé, nous le suivons. Nous n'avons qu'une opportunité. Et alors
qu'elle était fatiguée mentalement et fébrile sur ses jambes, voilà notre amie Audrey qui retrouve des forces et le regard qui rassure. Fred sait à ce moment que nous irons au bout. Etre
désormais trois change toutes les conditions de la progression, en formant une nouvelle équipe. Nous remontons donc la partie que nous venons de descendre. Là où nous nous sommes arrêtés, Glenn
emprunte un chemin complètement détourné, attaquant directement la pente, que Fred n'aurait pas songé à emprunter. En haut, nous devons encore marcher et traverser une plaine couverte par 60cm de
neige, avant d'arriver au point de vue. Là, le Fitz Roy trône magistralement. A son pied, le lac normalement bleu est gelé, et masqué par la neige. Un glacier coule sur la gauche. C'est superbe.
L'impression d'avoir progressé et de s'être vraiment rapprochés du pic est grande. Ses dimensions ont changé. Nous restons un bon quart d'heure, mangeons un bout, avant d'entamer le trajet
inverse. La descente se fait en silence, chacun concentré sur ses pas. En tout, nous aurons mis 2h45 aller-retour. En bas, Fred s'exclame : "c'était génial ! ". Trop envie de refaire un trek sous
la neige avec ses amis, et pourquoi pas intégrant de l'ice-climbing ? Il est 16h45, et la vallée dans laquelle nous sommes est désormais à l'ombre. Nous marchons, dans le même décor blanc et pur.
Le glacier aperçu ce matin, que nous laissons derrière nous, prend du coup une superbe couleur bleu/vert, que nous décidons d'appeler "bleu arctique", et se détache clairement de la paroi. Il est
18h, et avons 17km dans les pattes. La nuit commence à tomber. Nous continuons, nous arrêtons tous les trois une fois ou deux pour regarder le Fitz Roy dans cette lumière crépusculaire, nous
interrogeons sur des traces dans la neige qui pourrait être celles de pumas, et continuons. Nous arrivons 1h30 plus tard, à la lumière de nos frontales, dans le noir, après un dénivelé retour
total de 750m depuis le point de vue. Glenn rentre à la guesthouse, et nous partons faire quelques courses dans le village. Nous avons faim, et avons un peu mal au jambes.
Nous ne trainons pas une fois rentrés. Après 9 heures d'effort et 22km, la douche vaut son pesant d'or, tout comme le dîner, et la douceur du lit, que nous découvrons vers 22h. A 22h05, nous
sommes déjà dans les bras de Morphée. Le programme de demain ? Une nouvelle marche, apparemment aussi longue.
mar.
16
juil.
2013
Lever à 7h30 pour constater que la météo s'est un peu améliorée par rapport à hier, mais sera meilleure demain (comme prévu), et surtout jeudi. En gros, le temps est couvert ce matin et va s'améliorer pendant la journée, alors que ce sera le contraire jeudi. Nous décidons donc de ne pas partir marcher aujourd'hui, à cause du risque d'arriver sur un point de vue et de ne pas voir grand chose, pour y aller jeudi, et être sûrs d'être récompensés. Comme hier, nous faisons les paresseux et remontons nous coucher, jusqu'à 11h. En fin de matinée, la connexion Internet ne fonctionne pas, nous empêchant encore de chercher des infos sur la suite de notre programme et les semaines à venir, et de mettre le site à jour (ce qui est un peu frustrant, car nous sommes pressés d'uploader les photos du Perito Moreno, et de partager cette visite). Nous restons du coup à la guesthouse pour déjeuner, en l'ocurrence un "Rancho Grande" (un steack assez gros avec des frites et deux oeufs au plat sur le dessus). Une bonne partie de l'après-midi passe vite. Un américain d'origine méxicaine nous demande des conseils pour savoir comment rejoindre El Calafate et Puerto Natales. Il est jovial, et nous symapthisons avec lui rapidement. Nous décidons à 16h de sortir et d'aller marcher une heure ou deux, pour rejoindre un point de vue à côté du village, d'autant que le temps est désormais dégagé et clair. Et puis cela nous fera un peu travailler avant la grande marche de demain. Après avoir marché sur un sentier montant un peu, et être arrivés sur un plateau encore recouvert partiellement de neige, nous arrivons au lookout surplombant la plaine que nous avions traversée avant-hier (le "mirador de Las Aguilas"), s'étendant à perte de vue, et permettant d'apercevoir le lac Viedma. Nous distinguons d'ailleurs la Ruta 40 filant tout droit. En nous retournant, nous avons le Fitz Roy devant nous, bien que sa base soit masquée par la montagne du premier plan. Enfin, être ici nous permet de voir le village en contrebas, et la vallée continuant son chemin tout au fond. Sur le chemin du retour, nous bifurquons pour rejoindre un autre point de vue tout proche, celui de "los Condores". Il fait frais, l'étang à côté duquel nous sommes passés est gelé, mais il n'y a pas de vent. Les 6km aller-retour nous mettent en forme, et nous donnent faim.
Vers 18h30, nous retournons à la guesthouse après être rapidement passés par le mini-supermarché, où la vendeuse, qui nous reconnait, nous fait crédit du peso qu'il nous manque (15
centimes... c'est sûr, ce n'est pas grand chose, mais nous avons parfois rencontré des commerçants moins sympathiques qu'elle depuis notre départ). A 21h, pendant notre repas, nous
retrouvons les polonais, revenant de leur première approche du Torre. Ils s'installent à notre table, et nous expliquent à quel point il était difficile d'avancer hier à cause du vent,
comment ils ont monté la tente sur le glacier et ont dû dormir là-bas, et les étapes et leur stratégie pour monter jusqu'au sommet dans quelques jours. Ils disposent d'un
livre instructif, technique, montrant toutes les voies de grimpe, avec les grades de difficulté, les dévers et les écueils, sur l'ensemble des sommets du massif. On sent le niveau et le
public auquel s'adresse ce livre, utile seulement pour ceux qui envisagent une ascension et d'escalader une des faces d'un des pics du coin. Eux monteront par la face Ouest,
complètement couverte de glace (les images du livre sont impressionnantes).
Après cet échange agréable et instructif, nous montons dans la chambre vers 22h, pour continuer à regarder notre série favorite ("Suits", une série racontant la vie d'un cabinet d'avocat new-yorkais), et nous endormons.
lun.
15
juil.
2013
Ce matin, pas encore levés, mais à moitié réveillés, nous entendons le vent souffler dehors. Nous nous levons à 7h30, prenons notre premier petit déjeuner ici, assis autour d'une grande table en bois clair dans la salle du bas, et allons voir une des personnes à la réception pour avoir le dernier bulletin météo, qu'elle consulte sur windguru.cz, un site détaillant précipitations, force et direction du vent, couverture nuageuse de haute, moyenne et basse altitude, pour les quatres grandes tranches de la journée et de celles à venir. Et ça dit quoi ? Qu'aujourd'hui, le vent va souffler. La couleur des cases, rouge, attribuées à la force du vent, n'est pas un bon signe. De la pluie est prévue à partir de cet après-midi, et la visibilité ne devrait pas être bonne, sapant nos chances d'apercevoir le Fitz ou le Torre si nous marchons jusqu'à leur point de vue. Conclusion : autant rester là aujourd'hui, rester un jour de plus pour attendre le beau temps, et avoir la vue qui va bien, à la hauteur des heures de marche necessaires pour l'obtenir. En fait, il va sûrement falloir attendre après-demain, car les prévisions pour demain sont mitigées. Elles deviennent excellentes en revanche pour les deux jours suivants.
Il fait donc encore nuit quand nous remontons dans la chambre pour retourner nous coucher. N'ayant visiblement pas assez rechargé les batteries, nous nous reveillons à 13h. Dehors, il fait gris,
et le vent souffle toujours autant. Nous décidons de sortir tout de même pour prendre un peu l'air et marcher un peu. Bien couverts, nous partons vers la gauche, accompagnés d'un gros chien ravi
de faire une balade, pour rejoindre une cascade, Chorillo del Salto, située à une bonne heure d'ici, et environ 4km. Nous nous éloignons du village, en marchant courbés pour ne pas affronter les
petites gouttes fines de face. Les sommets autour sont tous dans le brouillard, mais cela fait du bien d'être un peu dehors, même si au bout de 35 minutes, à cause du vent, nous en avons marre et
décidons de rebrousser chemin. De retour à notre point de départ, nous allons à l'autre bout du village pour rejoindre l'office du tourisme afin de se renseigner sur les bus disponibles pour
repartir dans quelques jours, et aller plus au nord. Car nous en avons terminé avec cette partie du continent, et notre objectif est désormais d'aller au nord du Chili. Pour ce faire, nous allons
probablement devoir repasser par Santiago. Et pour cela, nous devons rejoindre une ville à mi-chemin, par laquelle nous étions d'ailleurs arrivés en Patagonie (Puerto Montt), et une autre
auparavant, au même niveau mais en Argentine, Bariloche. Bref, plusieurs trajets en perspective, qui mis bout à bout, nous permettrons d'atteindre notre but. Mauvaise nouvelle en discutant avec
une des rares personnes présentes à l'office du tourisme, la portion de la Ruta 40 qui remonte directement vers Bariloche en traversant la steppe - où nous pourrons alors franchir la frontière
avec le Chili - est fermée en hiver. Résultat : il va falloir apparemment redescendre à El Calafate, et prendre un bus de là-bas pendant 27h pour faire un long détour passant par la côte
Atlantique, et recouper ensuite vers l'ouest pour rejoindre cette ville. Soit deux jours de trajet en tout à partir d'ici. Pas super du coup. La compagnie de bus, qui ouvre à 18h ce soir, aura
peut-être une autre solution. Nous reviendrons tout-à-l'heure, et allons en attendant regarder sur Internet si aucun vol n'est disponible, et surtout à quel prix.
Nous allons ensuite au centre alpin, ou centre d'information du parc national, pour vérifier la météo des prochains jours et avoir quelques conseils, sachant que nous souhaitons faire les deux
grandes marches possibles. Apparemment, demain sera un peu comme aujourd'hui, même si cela devrait s'améliorer en milieu d'après-midi, et mercredi sera parfait, ainsi que la journée de jeudi.
C'est clair, nous allons donc prolonger notre séjour ici de quelques jours et partir marcher mercredi et jeudi, même si nous aurions pu tenter demain. Nous discutons une vingtaine de minutes avec
le ranger, qui parle un peu français, et en apprenons plus sur le massif du Fitz Roy, tout comme sur le champs de glace présent derrière, dont nous avions parlé dans l'article du Perito Moreno,
qui reste impressionant avec ces 350km de long et 700m d'épaisseur. Le ranger nous montre une photo vue du ciel, et ce qui paraît pour une mer de nuages au milieu des Andes est en fait de la
glace. Stupéfiant, surtout quand on sait que ce lieu naturel incroyable est unique au monde et situé juste derrière les sommets que nous allons approcher. Après avoir demandé, Fred apprend qu'il
n'est pas possible de s'en approcher en hélicoptère, car ces derniers sont interdits dans le parc pour préserver la population de condors des nuissances liées aux véhicules aériens motorisés.
Compréhensible, mais très frustrant. Etre en tour du monde, c'est en effet pouvoir approcher des endroits uniques et fantastiques, et pouvoir contempler des choses qui n'existent qu'à un seul
endroit sur la planète, et/ou des lieux interdits à l'homme, comme ce champs de glace disproportionné, distant de seulement quelques kilomètres et masqué par le Fitz Roy, Poincenot, ou le sommet
St Exupéry, en dessous desquels est installé le village. En discutant un peu plus, nous apprenons qu'un trek de quatre jours contournant le Fitz Roy est faisable en octobre-novembre, permettant
de passer de l'autre côté de la barrière montagneuse, en s'engouffrant dans la vallée et en franchissant un col, pour atteindre l'autre côté et longer cette calotte glaciaire avant de terminer la
boucle. Cela donne des idées à Fred, qui imagine un jour revenir ici avec quelques amis passionés, et vivre une aventure dans la veine de celles qu'ils ont pu déjà connaître ensemble. Nous
repartons à la guesthouse, après avoir constaté que tout est fermé jusqu'à 17h, pour grignoter un bout. La connexion Internet est lente, et nous n'arrivons même pas à nous connecter au site pour
le mettre un peu à jour. Ce ne sera pas ici que vous aurez de nos nouvelles. C'est plus embêtant car cela nous empêche de consulter skyscanner.com et de voir quels vols sont disponibles du sud du
continent pour remonter vers Santiago. Tant pis. Audrey lit un peu pendant que Fred termine quelques articles.
Vers 18h, nous retournons à la gare routière. Les infos de tout-à-l'heure sont bien confirmées : il va falloir retourner à El Calafate, et prendre un autre bus pendant 27h pour rejoindre
Bariloche. Les autres solutions que nous avons en tête, en passant par autre part, sont plus compliquées à mettre en oeuvre. Après tout, il suffira de se dire que le lendemain soir, nous serons
arrivés à notre première destination. On fait un tour du monde après tout. Donc on s'adapte. Et c'est le résultat qui compte. Nous repartons, toujours avec ce même chien qui nous attend devant la
porte, pour aller faire quelques courses. Nous rentrons ensuite, préparons à manger, et remontons dans la chambre en milieu de soirée, après s'être un peu inquiétés à propos des polonais, qui
sont allés aujourd'hui installer leur camp de base et laisser leur matériel sur la morraine d'un des glaciers au pied du Cerro Torre, et qui ne sont toujours pas rentrés 11h après être partis.
Après en avoir parlé à une ou deux personnes de la guesthouse, nous supposons qu'ils vont dormir là-bas, puisqu'ils n'ont pas utilisé leur téléphone satellite. Ce sera bien le cas.
dim.
14
juil.
2013
Moment fort de la journée : arriver devant le Fitz Roy par la Ruta 40 et sous un ciel dégagé
Bye bye El Calafate. Direction El Chalten, une autre ville incontournable de Patagonie, connue pour être le point de départ de grandes marches ou d'expéditions alpines autour de deux sommets
illustres auprès des grimpeurs et amateurs de montagne : le Fitz Roy, et le Cerro Torre, culminant à 3400m et 3100m, et ayant la particularité d'offrir une paroi quasi verticale, technique, sur
les derniers 700m.
Lever à 6h30, et départ dans la nuit vers 7h20 pour la gare routière. Sachant qu'il n'y a pas de distributeurs de billets à El Chalten, nous arpentons les rues désertes pour en trouver un avant
de prendre la route, et faire le plein d'espèces. Nous sommes un peu en retard, avons du mal à trouver une banque, et lorsqu'Audrey présente sa carte, la somme qu'elle souhaite retirer n'est pas
disponible. Nous récupérons le peu que nous pouvons, en espérant que cela suffise et qu'ils acceptent la carte bleue dans cette ville créée spécialement pour les activités de montagne, au nord du
parc naturel Los Glacieres (le même que celui du Perito Moreno).
Le petit car "Caltùr" part à 8h40. Nous sommes les derniers à monter, après avoir réussi à payer notre ticket par CB, même si seules les espèces étaient acceptées (mais n'ayant pu retirer la
somme que nous souhaitions, il fallait bien trouver une solution... et réussir à expliquer cela à l'homme en face de nous, un peu énervé, sachant que nous sommes arrivés à la dernière minute). Le
véhicule n'est qu'à moitié rempli. Il fait nuit, et tout le monde dort plus ou moins au bout de vingt minutes, quand nous empruntons la "Ruta 40", la route mythique qui traverse tout le pays,
s'étendant sur 5300km, et la seule qui traverse l'ensemble de la Patagonie. Une heure et demi après être partis, donc à peu près à mi-chemin, une lumière orange, très forte, entoure le van, et
transparait derrière les rideaux, tous tirés. On dirait qu'un grand feu de forêt nous a piégés. En fait, c'est l'aube. Le soleil se lève. Les nombreux nuages, éclairés par dessous, se comportent
comme de grands miroirs, et produisent une lumière intense, jouant sur toute une palette de teintes oranges vives. Tranchant avec l'absence de visibilité, avec le plat du désert, le phénomène est
incroyable de puissance. Les ciels de Patagonie brillent de nouveau par leur qualité. Peu après, le car s'arrête pour faire une pause, à un croisement de routes, où seule une maison servant de
bistrot routier se tient, au milieu de nulle part. En fait, en entrant pour aller aux toilettes, nous apercevons à l'intérieur des documents encadrés parlant d'un bandits des plus célèbres :
Butch Cassidy. En fait, l'endroit lui a servi pendant plus d'un mois de refuge/cabane (ou "arrêt technique") en 1905, lors de sa fuite vers le Chili après avoir attaqué la banque d'Angleterre,
accompagné de Sundance Kid, son acôlyte. Nous apprenons également que la bâtisse a servi au milieu du 20ième siècle de premier refuge pour les alpinistes s'aventurant à la conquête des parois du
massif vers lequel nous nous dirigeons, comme en 1952 lors de la première ascension du Fitz Roy, ou en 1974 pour celle du mont Torre. Sans le savoir en entrant, et derrière ses airs presque
minables paumé dans la steppe, nous sommes en fait dans un refuge mythique, témoin depuis plus de 110 ans de l'histoire légendaire de la Patagonie Australe. Nous repartons après 20 minutes.
La deuxième partie du trajet s'avère grandiose. Nous nous rendormons un peu au début, puis, lors de notre réveil, sommes face à un paysage à couper le souffle. Fred réveille d'ailleurs Audrey
afin qu'elle ne rate rien. Au milieu de la steppe, la Ruta 40 file droit devant, à perte de vue, dans un style similaire à la Stuart Highway d'Australie Centrale, sans rien d'autre autour. Sur la
gauche, se trouve un lac alimenté par un glacier que nous voyons descendre et arriver de nulle part au fond, assez loin, et sur la droite, une chaîne de montagnes assez basse aux sommets
recouverts d'une fine couche de neige nous interdit de voir plus loin. Mais c'est surtout devant nous, au bout de la ligne nous servant de route se perdant sur l'horizon, que trône une chaîne de
montagnes, créant une barrière naturelle interminable, immobile, et dont les couleurs semblent sorties d'une peinture, avec, légèrement décalé sur la droite, le Fitz Roy, à la forme si
reconnaissable, dominant tout le monde. Dans la lignée de celle d'hier, nous nous prenons une nouvelle claque visuelle. Nous sommes tous les deux d'accords pour dire que c'est incroyable de
beauté. Le paysage, toujours le même, défile, mais ce bout de la cordillère devant nous reste immobile, comme figé. Une vraie carte postale. Deux claques visuelles en deux jours, c'est du jamais
vu en 8 mois de voyage. Tout le monde dans le bus, même si nous ne sommes pas si nombreux, prend son appareil photo. Patagonie quand tu nous tiens... Au moins cela nous rassure : nous ne sommes
pas blasés. Au fur et à mesure que nous nous rapprochons, le paysage continue de tenir ses promesses. Grâce au temps clément, une chance quand on sait qu'il change très vite ici et que certains
attendent parfois une semaine pour apercevoir un bout du Fitz Roy, sans parler du Torre, nous en profitons jusqu'au bout. Nous arrivons à 11h10 à El Chalten (signifiant "montagne fumante", à
cause des nuages souvent présents), au pied du massif (dont le nom est celui du capitaine du navire de Charles Darwin lors de son arrivée en Amérique du Sud).
La ville est jeune : elle fut fondée en 1985, pour répondre aux besoins des alpinistes d'alors, qui commencent à venir de plus en plus se frotter aux parois du coin. La réputation du lieu grandit
vite, au point d'être aujourd'hui un incontournable des grimpeurs du monde entier, au même titre que les Alpes françaises. 500 habitants vivent ici. Aujourd'hui, en pleine saison basse, tout est
désert, et la plupart des hôtels, guesthouses ou restaurants sont fermés pour encore plusieurs mois. Le vent souffle fort en descendant du bus. Nous sommes accueillis par un ranger, qui nous
explique, dans l'Alpine Center local, les différentes marches possibles à faire, les consignes de sécurité, ou encore la difficulté de certains chemins, en insistant sur les conditions météo
changeantes. Deux polonais d'une trentaine d'années sont ici pour 3 semaines, afin de conquérir le Torre. Ils transportent 25 kilos de matériel, et souhaitent monter au sommet par la face
enneigée et glacée : ce sont des ice-climbers (et non des "rock-climbers"). Une expédition sérieuse. Après avoir tourné un peu dans les rues désertes balayées par le vent (on se croirait dans une
ville fantôme), nous nous rabattons sur la guesthouse où se rendent le trio vénézuélien/française/japonais rencontré hier : le Rancho Grande. Là-bas, un peu à l'autre bout de la ville (il doit y
avoir beaucoup de monde l'été, au vu du nombre d'hôtels et d'auberges), après avoir remonté cette longue rue très large (500 habitants, mais une rue large comme une 3 voies...on sent quil y a de
l'espace à revendre dans cette partie du monde), nous arrivons et sommes accueillis avec le sourire et une bonne odeur de poulet grillé qui finit de nous ouvrir l'appétit. Nous prenons un dortoir
pour deux nuits, mais sommes seuls dans cette chambre de 4 lits. Les personnes à l'accueil ont la bonne idée de diviser tout le monde, pour que chacun ait un espace un peu privé, plutöt que de
regrouper tout le monde au maximum. Avantage de la basse saison. Les deux polonais de tout-à-l'heure débarquent aussi, n'ayant pas trouvé d'autres endroits pour dormir, et nous sympathisons avec
eux. Nous partons faire quelques courses tous les quatre, mais tout est fermé - dimanche oblige - sauf une petite boulangerie qui vend deux ou trois bricoles (mais quand même quelques
viennoiseries faites maison assez gourmandes). Paquet de pâtes, saucisson (eh oui, youpi ! pas aussi appétisant que celui que nous connaissons néanmoins), ca suffira pour le moment. L'un des
polonais, Robert, connait le coin, et nous montre un mini-supermarché, fermé jusqu'à 18h. Finalement, nous commandons à déjeuner au restaurant de la guesthouse, dans laquelle nous nous sentons
assez bien. Atmosphère chaleureuse de montagne, d'efforts et de repos. Sachant que les deux grandes marches du coin prennent chacune 8 à 9 heures, nous décidons de ne rien faire aujourd'hui, même
si quelques autres marches de deux heures sont possibles. Le vent, et les nuages de moyenne altitude, qui commencent à se montrer, nous incitent à être paresseux. Nous en profitons pour continuer
à discuter avec les deux polonais, qui s'avèrent très sympathiques, et nous mettre sur l'ordinateur, calés dans un canapé de la grande mezzanine de l'étage. De leur côté, les trois compères d'El
Calafate sont partis marcher, et rentrerons exténués, en terminant la dernière heure et demi de marche dans le noir sans frontale, en ayant réussi à rejoindre le point de vue donnant sur le
Torre, mais n'ayant pas vu grand chose à cause des nuages. Pour leur défense, ils n'ont pas beaucoup de temps, et doivent repartir après-demain. De notre côté, nous nous disons qu'il vaut mieux
prendre un jour en plus pour attendre un temps clair et dégagé afin de pouvoir profiter à fond de la chance que nous avons d'être là. Quand on voit déjà à quel point l'arrivée via la Ruta 4 était
magique (et dire que certains passent à côté quand le temps est nuageux...).
En fin d'après-midi, nous nous rendons dans le petit supermarché pour faire quelques courses pour demain matin, et préparer des sandwhichs pour la marche prévue. Dîner préparé, pâtes carbonaras
avalées, nous rentrons dans la chambre vers 21h, et regardons une série sur l'ordinateur. La météo pour demain est mitigée, mais, d'après le ranger de ce midi, la marche vers le Torre est
possible. Nous verrons.
sam.
13
juil.
2013
Grand jour aujourd'hui. Nous allons en effet voir une des choses que nous ne souhaitions manquer sous aucun pretexte pendant notre voyage, un des hauts lieux touristiques de Patagonie du Sud, et qui est peut-être LE lieu qui compte le plus pour nous en Amérique latine, avec Macchu Picchu et le désert de sel bolivien : un glacier immensément long et large, qui se termine par un mur de glace bleue, abrupt, se jetant dans un lac. D'habitude, les glaciers, en Europe comme ailleurs (comme ceux vus au Népal par exemple, en NZ, dans les Alpes, ou à Torres del Paine) font quelques centaines de mètres de large, et un ou deux kilomètres de long. Ils descendent généralement le long d'une paroi montagneuse, telle une coulée de mousse figée, prise entre deux arrêtes rocheuses. La partie accessible - si elle l'est - est une morraine, autrement dit une zone glacée recouverte par de la terre ou des cailloux, à cause de glissements de terrain, et les formes à proximité sont arrrondies par l'errosion et les changements de température. Celui que nous allons voir est différent. C'est une véritable mer de glace, visible sur 14km de long et 5km de large, avec une hauteur de glace de 170m, dont de 50 à 70m émergés et visible, prenant sa source 30km en amont, là où l'épaisseur de glace fait 700m, recouvrant au total 250 km² (plus de deux fois la superficie de la ville de Paris) et permettant d'avoir une vue directe sur la zone normalement reculée des glaciers (celle qui fait toujours travailler l'imagination de Fred), à la surface chaotique, pleine de séracs, irrégulière, dangeureuse, semblable à un tapis de fakir aux pointes gelées. Nous avons vus des images, mais ne rêvons que d'une chose, le voir en vrai. Nous n'allons pas être déçus. Wow-effect assuré, et claque visuelle en perspective.
Nous nous levons à 7h30, nous préparons, prenons le petit déjeuner inclus dans le prix en compagnie de l'américain rencontré hier soir, et partons à pied pour le terminal des bus de la ville.
Départ à 9h, dans un mini-van confortable et bien chauffé. Les premiers rayons n'ont pas encore franchi la ligne horizontale teintée de rose située à presque 5km autour de nous, et que l'on
appelle horizon. Tout le monde dort un peu la première demi-heure du trajet. Lorsque le jour est complètement levé, nous roulons sur une route unique perdue au milieu de la steppe, entourée au
loin de montagnes, et arrivons à l'entrée du parc national "Los Glacieres", où nous devons acheter le ticket d'entrée valable aujourd'hui seulement. Le parc fait 5 400km², et abrite 356 glaciers,
dont 47 majeurs. 13 d'entre eux descendent d'ailleurs dans l'Atlantique (nous n'avons pas compris comment cela dit !). A regarder de longues minutes cette herbe jaune et ces étendues désertiques,
ces sommets qui se rapprochent puis nous entourent, ce grand lac que nous longeons où flottent quelques icebergs, nous réalisons que nous sommes en Patagonie. Cela pourrait être en
Nouvelle-Zélande - nous retrouvons ici des choses similaires - mais non, c'est la Patagonie, dont seul le nom évoque espaces vierges du bout du monde, zones reculées, Florent Pagny, et merveilles
naturelles illustrées dans bien des livres de photographie et de paysages. Pour y être, oui, les paysages ici sont à la hauteur de ceux que l'on peut s'imaginer. Un condor des Andes plane au
dessus de nous, avec ses grandes ailes déployées et immobiles dont le bout prend la forme de doigts écartés. Le mini-van continue sa route, en roulant parfois au ralenti pour ne pas déraper sur
le sol quasi gelé. Puis, au détour d'un virage, ca y est, il est là-bas, au fond, et nous apercevons cette langue de glace terminer sa course dans le lac Argentino. Ca paraît énorme. Le glacier
disparait après quelques nouveaux virages, jusqu'à ce que nous arrivions au point de vue, d'où partent de nombreux chemins permettant d'avoir différentes vues sur le glacier, qui n'est qu'à une
petite centaine de mètres. A 11h30, une excursion en bateau est en option, pour ceux qui souhaitent s'approcher de la paroi du glacier (même si le bateau ne reste qu'à une quarantaine de mètres,
pour ne pas se mettre en danger à cause des détachements réguliers d'immenses blocs de glace, dans un bruit plus ou moins assourdissant). Nous choissisons de ne pas la faire, car nous passerons
peut-être toute la journée de demain sur un bateau pour s'approcher de deux autres glaciers géants, en plus du Perito Moreno : le glacier Upsala (le plus long de tous, 1000km², grand comme 10
fois Paris) et le glacier Spegazzini (long de 25km, 2 de large, 100m de haut). Bref, des monstres de glace que l'on ne trouve qu'ici. Et on comprend pourquoi, quand on sait que ces dizaines de
glaciers prennent tous naissance dans les "hielos continentales sur", ou Southern Patagonia Ice Field, un tronc commun situé à 1500m d'altitude, coincé entre les sommets de la Cordillère, long de
350km, large de 60, où la glace fait 700m d'épaisseur. En gros, une surface légèrement plus petite que la Bretagne, qui est en fait la plus vaste calotte glacière continentale du Globe. Seuls
l'Antarctique, l'Arctique et le Groenland ont une taille de glace supérieure. On imagine l'âge des couches inféreures, ou même celui de la glace qui nous fait face quand nous apercevons pour la
première fois le Perito Moreno de près. Il est là, et nous sommes devant un espace ahurissant de glace blanche et bleue s'étendant à presque perte de vue. Après quelques pas, et être sortis du
bus, nous arrivons devant un point de vue que nous avons du mal à quitter. C'est une claque visuelle comme nous les aimons, qui nous laisse scotchés. Le temps est froid, mais le vent est faible,
et le ciel plutôt dégagé, même si l'amont du glacier est couvert par des nuages. De chaque côté, le lac Argentino, et une chaine de sommets assez bas, formant une harmonie de couleurs blanches,
bleues et boisées propres aux tableaux peints naturellement par une nature inspirée, donnant l'impression comme quelques autres fois que les choses sont figées devant nos yeux. C'est tout
simplement exceptionnel de beauté.
C'est donc avec envie et excitation que nous regardons le plan du site et décidons de faire toutes les marches possibles. Un réseau de chemins face au glacier est en effet amménagé, permettant de
le voir sous différents aspects, et de s'approcher de sa partie gauche ou droite. La bonne nouvelle, c'est que nous sommes quasiment seuls, puisque tout le monde est sur le bateau. C'est donc
très calme. Un bonheur. Nous marchons sur ce chemin en bois, et nous arrêtons toutes les trois minutes pour contempler ce mur de glace dont nous nous rapprochons un peu en suivant la flèche rouge
(le tracé le moins haut et le plus proche du glacier). Parfois, un bruit semblable à celui des avalanches observées à Torres del Paine nous fait tourner la tête : un morceau de glace, plus ou
moins gros, s'est détaché, et est en train de tomber dans l'eau. Nous n'aurons pas la chance de voir un énorme sérac tomber, encore moins d'être témoin d'une "rupture", comme celle de mars 2012,
la dernière en date. Une "rupture" a lieu quand Le front du glacier avance sur le lac Argentino (le Perito Moreno est en effet l'un des trois seuls glaciers de Patagonie qui n'est pas en
regression. Il avance en effet de deux mètres par jour, soit 700m par an) et rejoint la rive où nous sommes. Il divise alors le lac en deux créant une digue naturelle. Le niveau d'eau des deux
bras, désormais séparés par la glace, accuse alors une différence pouvant atteindre 30 mètres. Ce différentiel de pression commence alors à éroder cette partie du glacier, qui devient moins
résistant. Un trou se forme, créant une sorte d'arche de glace naturelle, qui lorsqu'elle devient trop fragile, cède sous la pression. Cet effondrement spectaculaire du front du glacier a lieu
périodiquement, mais la fréquence de ce cycle est irrégulière, et peut prendre un an comme une décennie. Des photos sont d'ailleurs exposées le long du chemin (voir ci-dessous). Quand on entend
le bruit que font les petits blocs aujourd'hui, on imagine le vacarme que cela doit être lors de tels évènements.
Plusieurs heures passent avant que nous terminions d'avoir parcouru tous les chemins. Le temps s'est dégagé et permet ainsi de mieux voir l'amont du glacier, et de se rendre compte de l'étendue
de la bête. En regardant tout là-bas, Fred se demande quelles sont les conditions et comment cela est. Dommage de ne pas pouvoir survoler le glacier en hélicoptère. Nous remontons au point de
départ après avoir mangé nos sandwhichs en contemplant cette oeuvre de la nature, et refait des dizaines de photos, pour rentrer dans la grande cafétéria prendre un chocolat chaud en regardant
les photos de Patagonie dans un beau livre à disposition. Une heure plus tard, nous remontons dans le bus pour rentrer sur El Calfate, à 78km. Le trajet est toujours aussi beau, même si nous
passons à côté d'une bonne partie, en nous endormant dans notre siège inclinable.
Nous arrivons à 17h15, et prenons au terminal des bus des informations pour nous rendre à El Chalten après demain, notre prochaine destination. Nous envisageons en effet de faire cette excursion
en bateau demain, même si nous hésitons sérieusement, à cause du temps passé à naviguer, du prix, et du fait que nous verrons les glaciers d'en bas, sans distinguer leur longueur. Nous nous
promenons un peu dans la ville, qui ressemble un peu à une station de ski (le charme et la neige en moins), et nous arrêtons à l'agence proposant l'excursion en question, où nous apprenons que
170 personnes ont déjà réservé. Ouch. A 18h30, nous retrouvons la guesthouse, nous inscrivons au barbecue organisé ce soir, et discutons un bout de temps pour savoir si nous faisons cette
excursion. Finalement, en prenant en compte tous les paramètres, ce sera non. Nous avons peur d'être déçus par le rapport qualité/prix, en avons déjà pris plein les yeux aujourd'hui, nous disons
que la satisfaction marginale ne sera pas très élevée, et préférons dépenser cette somme dans d'autres choses à venir ultérieurement. Suivent douche chaude, article en cours d'écriture, Audrey
aux sacs, et recherche de guesthouse pour demain soir (pas évident, car tout est cher, complet, en dortoir, ou fermé l'hiver... nous décidons d'attendre d'être sur place pour voir), puisque nous
partons à El Chalten demain matin (nous pouvons partir demain matin à 8h avec un car régulier).
A 21h, quelqu'un vient frapper à notre porte pour nous prévenir que le buffet est prêt. En arrivant dans la salle, nous retrouvons avec surprise Paulina, qui tenait la guesthouse à Puerto
Natales, et sa petite fille, qui saute au coup de Fred. Elles sont là pour aller voir le Perito Moreno. Cool. Nous nous installons à leur table, discutons, les laissons aller se coucher,
discutons avec d'autres voyageurs allant justement à El Chalten demain (une française, un vénézuélien, et un japonais... ils sont super ces japonais, on s'éclate avec eux, franchement, on les
adore!), et allons nous coucher vers minuit. Quelle journée. Le Perito Moreno, ce sera un des sites marquants de ce tour du monde. Quelque chose que l'on recommande vivement à tout le monde. Nous
n'avions jamais rien vu comme phénomène naturel comparable. Scotchés.
ven.
12
juil.
2013
RAS aujourd'hui. Arrivée au terminus des cars "Pachenko" sacs à dos sur le dos, après avoir marché seuls dans les rues désertes de la ville. Emballés dans leur grand sur-sac de protection, nous les mettons dans la soute arrière. Départ de nuit, à 8h. 25km plus loin, nous descendons comme tout le monde pour présenter notre passeport à la frontière Argentine, à un poste avancé perdu au milieu des montagnes de Patagonie, barrant la route à deux voies servant de seule voie de communication à cet endroit de la carte. Tampon sur notre pièce d'identité, prouvant notre sortie du Chili. Un kilomètre plus loin, au poste argentin, nous recevons un papier à conserver. Nous sommes dans la province de Santa Cruz. Nous avançons notre montre d'une heure (et n'avons plus que 5h de décalage horaire avec la France, sniff...).
Nous arrivons à 9h40 à El Turbio, une ville sans charme, elle aussi un peu perdue au milieu de nulle part. Nous achetons un ticket pour le car partant pour El Calafate, en apprenant qu'il faudra
descendre à Esperanza, attendre trois heures, et prendre un autre car pour arriver à bon port. Il est 11h30 quand nous repartons, sous un beau ciel bleu, les rayons balayant la steppe désertique
sur des kilomètres. 2h30 plus tard, nous voilà arrivés à Esperanza. Nous nous installons dans l'unique restaurant de ce trou perdu, faisant surtout pour nous office de salle d'attente, en nous
rappelant les roadhouses d'Australie. Une chilienne de presque trente ans nous accompagne, et va aussi à El Calafate. Nous commandons un peu de poulet et de riz, et mangeons sommairement ce plat
pas très appétissant. Audrey prend un dessert, sans véritablement savoir ce qu'elle a commandé. L'accent argentin est en effet particulier. Ici, on prononce "che" ce qui se prononce d'habitude
"yeu". Ainsi, "pollo" ("poyo", soit du poulet) est prononcé "pocho". Pour demander le prénom de quelqu'un, on dirait donc como se "chama", et non como se "yama". Une femme lui apporte dans une
assiette un gros bout de pâte de coing, et accompagné d'un autre de fromage, resssemblant à de la vache qui rit. Grosse surprise en voyant l'assiette arriver. Pâte de coing terminée, fromage
mangé à moitié, et cash emprunté à la chilienne qui est avec nous (ils ne prennent pas la carte bleue, et nous n'avons pas de pesos argentins), nous partons vers 16h.
Nous arrivons à El Calafate à 18h15, après avoir roulé dans le désert andin, dans cette ville située sur les bords d'un grand lac, mais qui semble là encore coupée du monde. Nous marchons une
vingtaine de minutes dans les rues de la ville, ressemblant un peu à une station de ski, et trouvons notre guesthouse après avoir retiré un peu d'argent. Nous nous installons, nous renseignons
sur les manières d'aller voir le Perito Moreno, ce fabuleux glacier se jetant dans le lac Argentino (l'un des plus gros au monde, qu'il est possible d'approcher comme aucun autre de surcroît, et
d'admirer depuis une promenade construite face à sa face terminale), décidons de prendre un bus classique demain matin pour nous y rendre (l'option la moins onéreuse), et partons faire quelques
courses pour préparer nos sandwhichs pour demain midi. Il fait nuit depuis notre arrivée, mais nous trouvons notre chemin sans problème au milieu de rues éclairées, ville touristique oblige
(alors qu'il n'y avait qu'une grande rue et rien d'autre il n'y a que six ou sept ans). Un chien, parmi tant d'autres, se met à nous suivre tout du long, ou nous attend, comme si nous étions son
maître. Nous arrivons au supermarché, et découvrons que, contrairement à ce que l'on nous avait dit, ce n'est pas moins cher du tout en Argentine (en tous cas ici). Probablement là encore à cause
du côté touristique de l'endroit. Sans le glacier à quelques kilomètres, il n'y aurait rien ici. Le touriste doit donc passer à la caisse dès que cela est possible, et payer le prix fort. Il
faudra par exemple payer l'entrée dans le parc, valable pour un jour, et repayer le lendemain si nous souhaitons y retourner pour faire une autre excursion (comme par exemple un tour de 7h en
bateau permettant de s'approcher de trois glacier différents, tous se jetant dans les lacs de la région, interconnectés entre eux). C'est excessif, et cela nous gêne de nous sentir pris pour des
pigeons. Entente sur les prix, absence de compétition entre opérateurs, toutes les combines sont bonnes. A la caisse du supermarché, les personnes mettant vos courses dans des sacs ont disparu.
Il n'y a même plus de sacs pour ranger ses provisions (pas grave, nous allons en prendre au rayon légumes, eh eh eh).
Nous revenons vers 21h à la guesthouse, en nous pressant à cause du froid sec, paradoxallement bien plus présent ici qu'auparavant. Nous préparons nos pâtes dans la cuisine commune, et nous
asseyons dans le petit refectoire à côté d'un anglais et d'un américain, qui nous invitent à leur table. Ici, comme dans toutes les guesthouses, tout le monde est en voyage un peu long. Ce sont 3
et 4 mois que ces deux là passent chacun de leur côté en Amérique du Sud. Le contact s'effectue par conséquent rapidement, un peu comme si tout le monde appartenait à la même famille, celle des
voyageurs du bout du monde. Et chacun à toujours quelque chose à raconter sur son expérience, son voyage, ou des bons plans à échanger. Nous rejoignons la chambre vers 23h.
jeu.
11
juil.
2013
Nuit bien agréable après les trois derniers jours, même s'il fait un peu chaud dans la chambre (juillet et août sont les mois les plus froids ici, et le chauffage, pour une fois central, est poussé fort). Réveil tranquille vers 9h45. Nous prenons notre temps. Nos pieds se souviennent encore des kilomètres parcourus. Nous passons la journée à la guesthouse, à faire une machine, à écrire un ou deux articles. Mimi, comme promis, vient nous tirer les cartes en fin de matinée. Nous n'y croyons pas beaucoup, en tous cas Fred, mais elle nous l'avait proposé, gratuitement bien sûr. Alors pourquoi pas ? Nous verrons bien si tout ce qu'elle nous a dit se réalise dans les années à venir. C'est drôle, elle nous parle aussi de changements pour quelques-uns de nos lecteurs...
Nous nous renseignons également, avec l'aide de l'assistante de Paulina, sur les cars pour demain, et partir en direction d'El Calafate. Il faut attendre l'après-midi, et passer au petit
terminal, pour avoir enfin une réponse : pas de bus demain, car il y a une grève à la frontière Argentine. En fait, c'est un poil plus compliqué que cela, mais le résultat est le même : nous ne
pourrons pas partir demain, même en envisageant un changement de bus à 25km d'ici, pour en prendre un autre ensuite. Cela ne tombe pas si mal, car Audrey a un peu envie d'avoir une autre journée
à buller. Le soir, nous allons au restaurant d'à côté, pas très fréquenté, où nous pensons pouvoir manger un "Chupe de Centolla". Mais non, ce n'est pas la saison, les pêcheurs étant en mer et
reviendront dans quelques mois. Nous sommes déçus, mais restons et commandons autre chose. Du saumon et de la viande, tous les deux bien trop cuits.
Le lendemain, nous espèrons quand même pouvoir prendre un bus le jour d'après. Nous téléphonons en fin de matinée, mais n'avons toujours aucune certitude, et devons rappeler dans l'après-midi.
L'ambiance est calme dans la guesthouse, où nous sommes les seuls clients, et avons toute la maison pour nous seuls. Vers 16h, nous décidons d'aller à l'office du tourisme pour trouver une
solution, sachant que la compagnie ne répond pas. Ne trouvant pas l'endroit, nous rentrons dans la mairie, petite, où quatre personnes travaillent, afin de leur demander notre chemin. Coup de
bol, elles se mettent à nous aider et à passer coups de fil sur coups de fil quand elles comprennent notre problème. Nous, pendant ce temps, attendons accoudés à les regarder se mettre en quatre
pour nous. Après bien des recherches, et quelques incompréhensions à cause de la langue, elles parviennent à joindre la compagnie de cars que nous avions initialement en tête. Nous nous rendons
dans leur agence, la même qu'hier, après avoir appris que oui, il y a bien des places pour le car de demain à 8h, et qu'il faudra changer à Turbio, en Argentine, attendre une heure, et prendre un
autre car pour une heure, et attendre un autre car à Esperanza, qui arrivera quelques heures ensuite pour aller, finalement, à El Calafate. Il n'y a en effet en hiver pas de liaison directe
depuis Puerto Natales, car pas assez de clients. Nous prenons nos billets, contents quand même de ne pas avoir à passer une journée de plus ici. Deux, c'était suffisant.
L'avantage d'être là ce soir, dans cette ville qui regroupe parmi le plus de bordels au Chili (Puerto Natales est un port "important", et la prostitution organisée est légale ici... il y en a 13
ou 14 dans cette ville pourtant relativement petite), c'est que nous pouvons passer à la guesthouse à côté de la notre, pour aller saluer nos amis espagnols, qui rentrent de leur trois jours de
marche dans le parc national. "Jamais deux sans trois" avait-on dit. Nous passons faire quelques courses, et les surprenons agréablement en frappant à la porte de leur auberge. Nous passons la
soirée ensemble, à notre endroit, et discutons, vidons deux bouteilles et demi de vin chilien, et terminons vers 1h30.
mar.
09
juil.
2013
Moment fort de la journée : Découvrir une coutume chinoise incroyable depuis la Patagonie
Retour au bercail aujourd'hui, pour cette dernière journée dans le parc. Le ciel est un peu couvert, mais, d'après l'allure du drapeau situé à côté de l'entrée du refuge, pas un pet de vent. Tant mieux. Et surprise en sortant, après avoir rangé le sac et remis les matelas en place, il ne fait pas très froid, alors que nous pensions le contraire. Il est 8h45.
Le début de la marche est un peu dur. Une montée nous attend, sans véritable chemin (mais on aime, c'est beaucoup plus sympa, et un chuïa technique). En fait, nous nous rendons compte que nous nous sommes trompés, et sommes sortis du passage, sur lequel nous retombons très vite. Nous retrouvons une forêt d'arbres brulés, et laissons les sommets derrière nous. Peu à peu, ils s'éloignent. Nous nous retournons, de temps en temps, pour leur lancer quelques regards. Le temps passe. Nous marchons silencieusement, chacun dans ses pensées. Dans ces moments - ceux qui l'ont pratiqué le savent - on pense à ses proches, à soi, on pense au passé, au présent, au futur. Et après huit mois de voyage, nous pensons bien sûr à ce qu'il nous arrive, à cette aventure sur laquelle nous n'avons probablement toujours pas de recul, mais où nous pouvons déjà ressentir le temps écoulé depuis les premiers pays visités. Après avoir laissé un lac bleuté sur notre gauche, nous passons une colline, puis une série de virage à gauche, et quittons définitivement la vallée, pour retrouver la grande plaine faite de steppe par laquelle nous étions arrivés avant-hier. Nous retrouvons d'ailleurs les chevaux que nous avions croisés, et qui nous regardent tous fixement, même s'ils sont un peu loin. Le vent commence à souffler, mais dans des proportions bien moindres que celles de l'autre jour. Après deux heures, nous en avons marre, et nous demandons où est ce refuge sommaire où nous avions fait une pause à l'aller. Nous ne nous sommes en effet pas encore arrêtés, et avons besoin de souffler un poil, ne serait-ce que parce que nos pieds nous font un peu mal après les efforts cumulés des jours précédents. Une demi-heure plus tard, nous le trouvons enfin, après avoir longé pendant un bout de temps la rivière, et perdu un peu d'altitude (environ 70m). Nous avons 1/2 heure d'avance sur le temps estimé indiqué sur notre carte, et avons parcouru 10km. Plus que 7. Ouf, nous avons fait plus de la moitié. Nous restons 20 minutes, assis sur un tronc d'arbre, à grignoter quelques gâteaux, manger une banane, et boire un coup.
Nous repartons, en sachant que cette deuxième partie va être un peu lassante. Terrain plat, décor qui ne change pas. Ca y est, les étranges formations rocheuses au pied desquelles nous
étions hier sont "loin", et ont presque disparu derrière une colline. Nous retrouvons au loin sur notre droite le volcan au sommet enneigé du début, et dont la partie supérieure plait
tant à Fred, qui imagine son chaudron - bien dessiné, typique - rempli de lave comme il le fut sûrement à une époque. Encore plus loin, au fond, un groupe de montagnes blanches tranche
avec le jaune paille des herbes hautes s'étendant tout autour. Une épaisse couche de glace, superbe, relie leur sommet. A un moment, devant nous, là-bas, nous distinguons deux points
noirs. Il faut attendre presque dix minutes pour être sûrs que ce ne sont pas des animaux, mais bien deux personnes, qui semblent marcher dans notre sens. Deux trekkeurs commencent leur
journée, comme nous il y a deux jours. Et quand seulement une centaine de mètres nous séparent, nous n'y croyons presque pas en reconnaissant nos amis espagnols rencontrés à Santiago et
Valparaiso. Quel hasard. Nos trajets s'étaient séparés pour prendre des itinéraires différents, mais allions tous dans le sud du pays. Et les voilà dans nos traces à deux jours d'écart.
Dommage de ne pas avoir pu parcourir le parc ensemble. Nous restons donc à discuter, une fois la surprise passée, et marquons l'instant par une photo souvenir. Ils rentreront à Puerto
Natales dans deux jours, et dorment dans une guesthouse à 30m de la notre, mais nous ne serons malheureusement plus là. Et pourtant, comme nous leur disons, "jamais deux sans trois".
Nous reprenons tous notre route, et après une heure et demi, arrivons enfin à "Administracion", l'endroit où nous avions garé la voiture, et point de départ de toutes les marches dans
le parc. Il est 13h30, et le temps, toujours couvert, s'est refroidi à cause du vent léger qui souffle en permanence. Nous sommes contents d'avoir terminé, et avons mal au pied et aux
jambes.
Nous déjeunons dans la voiture, porte arrière du 4x4 ouverte et réchaud à gaz allumé dans le grand coffre. Une heure plus tard, nous mettons le contact, et partons pour découvrir la partie Est du parc, en empruntant la piste en gravier qui le sillone. Nous espèrons voir les trois tours, les fameuses Torres del Paine, même si nous ne pourrons nous en approcher à cause du chemin pour y parvenir, fermé. De toutes façons, nous n'avons pas vraiment envie de re-marcher une heure ou deux aujourd'hui. Nous croisons différents lacs, retrouvons les deux montagnes - pas si loin - d'hier (mais en les ayant contournées avec la voiture), passons à côté de deux cascades qui ne cassent pas des briques, et, après une demi-heure de route un peu sportive, où il suffirait d'aller un peu plus vite dans les virages pour perdre un peu d'adhérence et faire chasser légèrement l'arrière de la voiture (nous n'avons pas enclenché les quatre roues motrices), nous avons devant nous deux des trois pics qui ont donné leur nom au parc. En continuant sur cette unique route, le troisième apparaît et se découvre de plus en plus. Ce sont donc Torre Sur, Torre central et Torre Norco que nous avons en face, à 15h30. Les nuages sont suffisamment hauts pour ne pas obstruer la vue, pouvoir faire quelques photos, et dire que nous serons venus là et aurons vu de nos yeux ces sommets que l'on voit sur presque toutes les photos du parc (avec les trois autres d'hier). Youpi. Nous pouvons repartir vers Puerto Natales, à une centaine de bornes de là. Torres del Paine, c'est fini, et cela nous aura beaucoup plu. Un des parcs nationaux que nous aurons préféré, et, selon nous, à la hauteur de sa réputation. Nous regrettons même de ne pas être resté une nuit de plus pour rallonger notre trek, aller voir le glacier Grey, et appartenir à cet endroit sauvage un jour et une nuit supplémentaire.
Sur le chemin du retour, peu après être partis, nous prenons en stop une femme, travaillant près du parc, et rentrant chez elle. L'occasion de discuter un peu, et de se faire inviter à l'anniversaire de sa fille ce soir si nous souhaitons. Gracias, mais nous allons dîner chez Mimi, la française rencontrée samedi soir. Nous arrivons à Puerto Natales, et n'attendons qu'une chose, prendre une bonne douche chaude, et nous habiller plus confortablement. Chose faîte dans la demi-heure qui suit. Trop bon. C'est bien pour ça aussi les treks. Parce que l'on sait qu'il y a une fin, que cela permet du coup d'apprécier des conditions un peu moins confortables, de profiter des avantages que cela procure (aller dans des endroits inaccessibles autrement, rentrer dans la montagne, être le témoin privilégié d'évènements divers, vivre avec la nature...), et de les retrouver ensuite. Nous défaisons nos sacs, passons un coup de fil pour aller rendre la voiture (avec bien plus d'essence que nous devions, dommage, nous n'aurions pas dû en mettre autant), allons faire quelques courses (ne serait-ce que pour apporter une bouteille de vin chez Mimi). Nous hésitons à ce moment à partir demain pour El Calfate, notre prochaine destination (de l'autre côté de la frontière, en Argentine, un peu plus au nord, à cinq heures de bus), ou à rester une journée de plus à la guesthouse pour nous reposer, et partir après-demain. Nous décidons de rester un jour de plus, car après ces 48km, ne rien faire, dormir un peu plus tard, et mettre à jour le site (certains semblent se plaindre de ne pas avoir de lecture) nous tente bien.
Mimi vient nous chercher vers 19h, et nous partons avec Paulina, la fille s'occupant de la guesthouse. La nuit est déjà tombée, et, pris par toutes ces petites choses depuis notre retour à Puerto Natales, nous sommes complètement passés à côté du crépuscule, qui devait cela dit être superbe vu les nuages d'aujourd'hui. Chez elle, nous prenons un apéritif copieux à base de pisco sour maison, et avons le privilège de manger du Centolla. C'est quoi ? Tout simplement le nom donné ici aux crabes géants pêchés dans les eaux froides proches de l'Antarctique, ou que l'on trouve aussi au Kamchatka, entre la Sibérie et l'Alaska. Un met rare et délicieux, vendu à des prix exorbitants en Europe, alors que ces crabes pullulent dans les eaux de ces deux endroits du monde. Rien n'aurait pu nous faire plus plaisir que cette attention, alors que nous avons mangé sommairement depuis trois jours. Fred, connaissant ce produit rare, le signale d'ailleurs à Mimi, et la remercie chaleureusement. Enchantée et toujours pleine d'énergie et d'attention, elle tient à nous donner la recette du "Chupe de Centolla", une préparation locale mélangeant chair de crabe géant, fromage fondu et panure. Et n'ayant cette recette que sur un tablier de cuisine, elle décide de l'offrir à Fred, qui est ravi de ce cadeau si approprié et spontané. Nous passons une excellente soirée à discuter comme l'autre fois. Avant de partir, Mimi nous montre un film de vacances en Chine, lorsqu'elle y était allé avec son sac à dos, à la recherche des "femmes aux petits pieds", dans un village du Yunan. Selon la coutume, les femmes ce cet endroit reculé ayant de petits pieds pouvaient se marier aux hommes riches. Du coup, quatre orteils étaient coupés aux bébés de l'époque, pour ne laisser que le pouce, et bander les pieds dès les premières années pour les serrer et éviter qu'ils grandissent. Résultat : des femmes aux pieds minuscules (semblables à ceux d'enfants de cinq ans), témoignant devant la caméra. Mimi nous raconte qu'elle a du insister auprès de son interprête chinoise - qui ne croyait pas à cette histoire de petits pieds dont elle avait entendu parler - pour trouver ce village et s'y rendre. C'est donc un documentaire de grands voyageurs, aux confins de l'Empire du Milieu, inestimable, dans un village perdu, que nous regardons ébahis pendant une vingtaine de minutes. Des images brutes, qui donnent l'impression d'être perdu au bout du monde, au milieu de traditions centenaires probablement inconnues du reste du pays (c'était il y a 20 ans, et quand on sait à quelle point certaines régions de Chine sont encore enclavées...), sans parler d'au delà. Bref, cela nous parle, d'autant que nous aurions bien été du style à partir à la découverte et filmer ce genre de choses. Fred ne manque pas du coup de le faire, en allumant la caméra pour enregistrer les images sur l'écran. Mimi a hérité d'une paire de chaussons utilisés par cette femme. Elle pense que cette tradition s'est perdue depuis, car personne à l'époque ne prenait la relève de cette vieille dame à l'allure si incroyable, que l'on dirait sortie d'un film. C'est drôle, car c'est au Chili que nous apprenons quelque chose de nouveau sur la Chine, et qui sera une des grandes découvertes culturelles du voyage. Cela change tout dans notre esprit en étant allé là-bas il y a sept mois.
Nous rentrons vers 23h30, et nous endormons rapidement, en savourant la douceur du lit.
lun.
08
juil.
2013
Deuxième jour dans le parc, et réveil avec le soleil, même un peu avant. Les deux asiatiques rencontrés hier soir en arrivant sont étonnés de nous trouver dans la pièce, en train de nous réveiller, lorsqu'ils entrent pour prendre un petit déjeuner (salé, à base de pommes de terres on dirait). Nous nous levons, d'autant que la journée d'aujourd'hui va être longue. Nous avons en effet 14km aller-retour, 500m de dénivelé, soit environ 10h de marche d'après la carte dont nous disposons, sur laquelle sont indiquées les distances et l'estimation des temps de marche. Plutôt que d'aller voir le glacier Grey, qui doit pourtant être impressionant, nous préférons aller dans la vallée "Francès" et nous approcher des sommets si étranges que nous avons vus hier. Nous aurons en effet l'occasion de voir de près d'autres glaciers, dont l'un des plus fous, le Perito Moreno. Nous buvons un thé, rangeons les matelas à leur place (même si nous referons pareil ce soir), laissons quelques affaires dans la chambre, et partons.
Dès les premiers pas, vers 9h, nous apercevons de grands rapaces au dessus du lac, planant et tournoyant. Les fameux condors des Andes ? Peut-être. Nous laissons bientôt le refuge loin derrière nous, et ne le voyons plus lorsque nous franchissons la grande colline, où se découvre progressivement une face du massif d'à côté, au fur et à mesure que nous avançons. Là haut, une épaisse couche de glace couvre le toit rocheux, et descend le long de la paroi. Nous traversons, comme hier, une forêt d'arbres morts. Le chemin commence à monter, et s'efface parfois, sans bien savoir par où aller. Heureusement, de grands batons oranges indiquent quelle direction suivre. Après presque deux heures, nous arrivons devant un pont pas très bien entretenu, traversant un torrent, et donnant directement sur le versant ouest de la montagne que nous avons fini de contourner. Whaou, elle est impressionante cette paroi. Et superbe. Deux ou trois glaciers semblent couler, mais nous n'en sommes pas sûrs à cette distance. Malgré un point culminant pas très haut, la difficulté semble grande pour qui souhaiterait gravir le sommet par ce côté. Nous restons quelques minutes à l'observer. Audrey, qui est toujours un peu anxieuse lors des franchissements de ponts (bien que ce soit loin d'être son premier, et qu'elle soit désormais "Nepal approved"), passe de l'autre côté sans difficulté. Cela dit, c'est vrai qu'il n'inspire pas très confiance au regard de l'allure des bouts de bois plus ou moins espacés, et de son aspect rudimentaire. Nous arrivons juste après à un refuge, fermé en cette saison, et rencontrons deux polonais ayant passé la nuit ici dans leur tente, à se battre un peu moins cette nuit contre les souris qui arrivent généralement à passer partout pour aller grignoter leurs rations quotidiennes de bouffe (ils sont dégoutés car il leur en manque deux du coup). Il est 11h20, et restons bien trop de temps, environ 30 minutes, à discuter et à accepter le café qu'ils nous offrent, après avoir fait bouillir un peu d'eau de la rivière. Nous nous entendons bien, et ils sont très sympas. Nous ne sommes qu'à mi-chemin de notre destination, plus haut, plus loin, plus proche des parois. Nous repartons. A partir de là, le terrain commence à être un peu plus accidenté, et à monter un peu plus. Nous suivons les bâtons oranges, toujours présents, et marchons pendant 30 minutes sur un tapis de pierres, remontant parallèlement la rivière sur notre gauche. Nous passons plusieurs fois quelques petites étendues d'eau gelée, manquons parfois de tomber, et suivons une piste ondulant avec le terrain, en gagnant progressivement de l'altitude. Heureusement, il fait un temps magnifique (ce qui fait que depuis le départ, les vues sont superbes), mais le vent commence doucement à se lever. Nous avons quitté la façade enneigée de tout-à-l'heure, et assisté au passage à quelques avalanches, que nous remarquons par le bruit qu'elles font en se déclenchant, sommes passés de l'autre côté (clairement, cette paroi était fascinante, Fred pourrait passer une heure à la regarder, et à s'imaginer comment cela est de plus près, à côté de ces coulées de glace et de neige), et ne distinguons plus, à cause des arbres, les étranges formations rocheuses caractéristiques du parc.
Enfin, après deux heures supplémentaires de marche depuis notre arrêt, nous arrivons sur une plaine, découvrant tout à coup ces dernières, et le barrage naturel que forme la chaîne
montagneuse en face, au loin. Il est 13h40. Ne trouvant pas le point de vue indiqué sur notre carte, ne voyant plus de bâtons oranges, et concluant d'après nos informations/estimations
que le chemin est terminé, nous nous arrêtons, et déjeunons. Nous sommes au pied des pics, couleur sable, sur notre droite, que nous apercevions de si loin hier en progressant dans la
steppe. Nous mangeons des chips, quelques tartines de pâté, un sandwhich de fortune au jambon, sous ce beau ciel bleu, mais dans le froid apporté par les rafales de vents, qui nous
obligent à nous depêcher pour ne pas avoir trop froid. D'autant qu'il ne faut pas trop trainer, car nous avons tout le chemin du retour à faire. En quasiment quatre heures de marche, nous
n'avons croisé que les deux polonais, et pratiquement aucun animal ni oiseau, en dehors d'un lièvre et des rapaces de ce matin.
Nous partons à 14h30. Le soleil est en train de disparaître derrière le massif du fond. La trajectoire ellyptique qu'il forme dans le ciel chaque jour, en étant à notre avis à 35° seulement au dessus de l'horizon en milieu de journée, et en se couchant bien plus près de son point de départ que chez nous, s'explique par les latitudes où nous sommes. Si loin de l'équateur, et en plus dans l'hémisphère Sud (l'inclinaison de la Terre accentue ici les choses), arrivant au coeur de l'hiver, celle-ci est de plus en plus courte, et proche de l'horizon. En Patagonie, l'été, la nuit ne dure que 5 heures, entre 23h et 4h du matin. C'est l'inverse, l'hiver. Cela se sent. Nous préférons ne pas tarder. C'était pour le moment un peu plus "technique" que les autres treks, car il n'y avait parfois pas de chemin, ou celui-ci exigeait d'utiliser ses bras pour franchir quelques mètres un peu pentus, ou de confectionner un passage en jetant quelques grosses pierres dans des mares d'eau dont la surface est gelée, ou de mettre des morceaux de bois, pour pouvoir passer. Légèrement plus fatiguant, mais en fait beaucoup plus sympa et marrant. Nous remettons nos gants, que nous enlèverons dans 20 minutes, tout comme notre bonnet, et partons donc en sens inverse.
Nous repassons devant tout ce que nous avons vu à l'aller, notamment devant le versant blanchi par la neige de la montagne, désormais sur notre droite. Nous profitons d'être là une dernière fois pour nous arrêter, et regarder encore les formations glacées. Une avalanche se déclenche. Nous avons le temps d'en filmer une partie (voir ci-dessous), puis nous remettons en marche. Nous ne pouvons en effet pas nous permettre de traîner. Une heure passe, puis une deuxième. Nous arrivons au pont suspendu, qu'Audrey franchit en courant (nan, c'est une blague). Nous jetons une dernière fois un coup d'oeil derrière nous lorsque nous quittons ce côté du massif. Le soleil est alors caché derrière depuis un petit moment, éclairant les pics granitiques, et accentuant leur couleur beige. Une autre heure passe. Il est presque 17h. Le ciel est parfaitement dégagé, nous privant des couleurs si jolies qu'il offre quand les nuages sont présents. Cela à l'avantage de nous offrir un maximum de lumière, jusqu'au dernier moment. Nous retrouvons un chemin plus facile, et repassons devant un ou deux endroits dont nous nous souvenons. Le contraste est faible, comme à chaque fois que le soleil s'est couché mais qu'il ne fait pas encore nuit. Cependant, nous ne sortons pas nos frontales. N'ayant pas ralenti notre allure malgré le terrain (bien tracé, mais cela reste un chemin de montagne, pas un trottoir de grande ville) et le fait que nous ne voyons plus grand chose, nous prenons garde à ne pas nous tordre une cheville et faisons attention. Nous arrivons finalement à 17h50, alors que les premières étoiles sont déjà de la partie. 8h30 après être partis, et après 1 heure de pauses cumulées, nous revoilà au refuge.
Comme hier, nous mangeons, profitons du feu dans la pièce, rencontrons deux américains d'Atlanta avec qui nous discutons un peu, et nous endormons au chaud vers 23h50, exactement dans les
mêmes conditions qu'hier.
dim.
07
juil.
2013
Moment fort de la journée : observer les couleurs du ciel de Patagonie changer au coucher du soleil
Premiers réveillés, dans la guesthouse silencieuse, et déserte, à 7h ce matin. Nous avons rendez-vous à 8h30 à quelques rues d'ici pour aller chercher la voiture, et filer dans le parc pour
commencer à marcher, après avoir pris les infos nécessaires au point d'entrée, appelé "Administracion". Mais en descendant l'escalier, personne n'est là, et le petit déjeuner n'est pas
du tout près. Bon, on fait quoi ? On réveille Paulina, ou on se débrouille ? Allez, deuxième option. Nous fouillons donc un peu partout dans les tiroirs et placards pour trouver notre
bonheur, et manger un peu. Dire que nous voulions prendre un gros petit dej pour ne pas avoir faim trop tôt, et se caler correctement. Next time. En fait, on décide d'aller chercher la
voiture, et de voir en revenant, en espèrant que la maitresse de maison sera levée, ne serait-ce que pour nous donner comme prévu un réchaud à gaz (pour pouvoir faire cuire nos pâtes dans le
parc les prochains jours). On sent déjà que nous allons être en retard. Nous partons à 8h20, arrivons à l'heure, et attendons dix minutes dans la rue déserte, mais sous un ciel dégagé
malgré la température, que notre homme arrive. Un peu plus et nous commencions à avoir peur d'attendre une demi-heure.
La voiture est un 4x4, plus de 200 000km au compteur, dont les portes s'ouvrent en grinçant, la porte du coffre devant être manipulée spécialement pour être ouverte, les sièges usés, et l'intérieur sale et archaïque. Il nous explique comment fonctionne le second levier de vitesses, ainsi que deux ou trois autres choses classiques, nous rappelle ce qui est important pour lui (rétro, phares, accident), après avoir fait le tour du véhicule ensemble. Il nous laisse les clés, et s'en va. La voiture est facile à conduire, automatique, même si la direction est un peu lache, et les freins pas très réactifs. C'est pas du neuf, ça a du en voir de toutes les couleurs, mais ça reste efficace. Et pour ce que nous allons en faire, peu importe. Nous revenons à la guesthouse, où tout le monde dort encore. Bon. Nous fouillons, déjeunons ce que nous trouvons, et regardons près du bureau, en haut de l'armoire et dans une petite pièce à côté pour trouver quelques petites bouteilles de gaz presque vides, une casserole en alu "scout toujours", et un réchaud. On aura mis du temps, quasiment 20 minutes, mais c'est bon, nous avons tout. Il est 9h40, et enfin, nous pouvons partir.
Avant de quitter la ville, nous passons à la station faire le plein. Les premiers vingt kilomètres après avoir suivi les flèches pour prendre la route du parc national, sont goudronnés, et
partent se perdre dans la steppe. En dehors de la ville, il n'y a rien, que la nature. Il fait beau, comme les derniers jours, et les angoisses que nous avions à Puerto Montt à propos
du temps sont clairement dissipées. Nous qui avions peur d'être dans le brouillard ou sous la pluie ici. Le paysage, en tournant pour prendre désormais une piste en gravier, sans aucune
autre voiture autour, ressemble à la Nouvelle-Zélande, mais il y a quelque chose de différent, sans pouvoir dire quoi. Au fond, des montagnes, dont nous nous rapprochons. Plus
près, c'est la steppe. La route est large, mais à 80km/h, la voiture chasse de temps en temps, mais tient la route. Cela nous rappelle un peu l'Australie, et les pistes dans le désert.
Par contre, le vent est fort. Certains panneaux signalent d'ailleurs les mouvements latéraux qu'ils peuvent causer. Nous passons à côté d'un grand lac aux reflets bleutés, et apercevons
un ensemble de pics, groupés, au fond. Nous essayons de trouver les trois "tours", ou sommets, donnant son nom au parc, mais en vain. En revanche, au fond, sur la gauche, nous
apercevons le glacier Grey, qui semble immense (une sorte de mer de glace), où il est apparemment possible d'approcher ses pieds après une longue marche. Le vent est terrible.
Nous arrivons à l'entrée du parc vers 12h, où nous devons payer les 15 euros de droit d'entrée. Torres del Paine, c'est le plus célèbre parc national du pays, voire du continent. Il y a un
mois, l'endroit a d'ailleurs rejoint la cinquième position dans le Top 100 de National Geographic des endroits les plus beaux au monde, et a fait à ce titre la couverture du magazine
(Macchu Picchu, une de nos prochaines étapes, est par exemple à la 53ième place) ! Rien que ça. On vous dira. Nous avons reconnu tout-à-l'heure au moment où nous avons découvert le lac
et les sommets du fond l'endroit où parmi les plus célèbres photos du parc sont prises (comme celle de la couverture de National Geo par exemple). Différentes espèces d'animaux vivent
ici, comme des guanacos (une sorte de lama), des renards, des condors, des flamands roses, des cygnes, des nandus (prononcer "gnandou", une sorte d'autruche) ou encore des pumas (on ne sait
pas trop si nous avons envie d'en rencontrer un cependant). Nous nous garons devant le centre d'information, discutons avec le ranger pour connaitre les marches possibles, organisons nos
trois jours, et déjeunons dans la voiture avant de partir. Seuls deux refuges sont ouverts en ce moment, à cause de la basse saison et de la neige. Et malheureusement, le sentier
permettant de rejoindre le point de vue au pied des trois tours (une autre photo ultra célèbre du parc) est fermé à cause des 50cm de neige tombés il y a trois jours. Mince.
Heureusement, il est possible de voir les "Torres" depuis la route qui fait le tour du parc. Nous apprenons aussi que le trek "W" est ouvert, contrairement à ce que nous avions
entendu. Petite déception pour Fred qui aurait voulu le faire (nous aurions trouvé une tente si nous avions su). Nous en ferons une partie, puisqu'après avoir rejoint ce soir le refuge
"Grande Paine", situé à 17km d'ici, nous irons au bout de la vallée "Francès" demain, dormirons de nouveau au refuge, et reviendrons sur nos pas après-demain matin, pour rejoindre la
voiture en milieu de journée, et aller voir le reste sur les routes ouvertes l'après-midi. En tout, cela fera 48km de marche. C'est un peu moins qu'Abel Tasman en NZ, où nous étions
restés une journée de plus, et nos sacs sont un peu moins lourds (8kg pour Fred et 4 pour Audrey).
Capuches sur la tête, gants et lunettes de soleil sortis, nous commençons la marche. Il ne fait pas très froid, mais un vent de 80km/h fait baisser la température, et fouette notre visage.
Tant pis, pas d'autres choix que d'y aller (nous apprendrons plus tard que les vents atteignent parfois 130 ou 150 km/h dans le parc... mais pas aujourd'hui. Le ranger nous aurait
prévenus sinon). Nous commençons par suivre la route en gravier, dont nous nous séparons rapidement, pour arpenter les herbes jaunes d'un demi-mètre, s'étendant sur toute la plaine,
elle-même entourée de montagnes au loin (dont un joli volcan), et de monts sur notre droite. Pendant deux heures, nous marchons dans ce décor, la tête souvent courbée à cause du vent.
Ce n'est pas très agréable, énervant même au début, et le décor nous lasse un peu. Nous faisons une pause, en en ayant un peu marre. Un peu d'eau, quelques gâteaux, et nous repartons. Il
nous reste environ trois heures, soit 10km, pour arriver, et il est déjà 15h30. La deuxième partie va néanmoins être plus sympa. Après avoir suivi une rivière pendant 30 minutes, nous
passons de l'autre côté d'une colline, et découvrons face à nous un ensemble de sommets à l'allure très particulière, que nous avions dans notre champs de vision depuis un moment,
partiellement caché. Une montagne au sommet glacé, dormant entre 2500 et 3000m d'altitude, descendant en formant un glacier un peu bleuté, accompagne cette formation rocheuse aux flancs
couleur sable, marquée par une séparation chromatique, et très probablement minéralogique, nette entre le sommet et le corps. C'est très étrange, à croire presque que l'homme est intervenu
pour couper net les parois et leur donner cet aspect si particulier. Mais non, tout cela est bien naturel. Après quelques recherches à notre retour, nous
apprendrons que cela est le résultat d'un mouvement tectonique recent de la plaque antarctique (il y a une dizaine de millions d'années), qui a modifié
la composition des roches, puis par une période de glaciation (de -3 millions d'années à il y a 14 000 ans), qui a sculpté la chaîne pour lui donner son allure d'aujourd'hui. C'est assez impressionant, et différent de ce que nous avons pu
voir autre part.
Peu à peu, nous nous rapprochons de cet ensemble, et pouvons apprécier les détails, qui se font plus précis. Nous croisons un groupe de chevaux, probablement sauvages, après une heure supplémentaire. Ils nous regardent tous sans bouger, puis s'enfuient rapidement. Avec cette herbe jaune et la montagne derrière, comme ça, au milieu d'une plaine seulement accessible après plus de trois heures de marche, les voir en liberté proccure une sensation particulière. Parfois, voire souvent, nous devons nous écarter du chemin pour éviter des mini-étangs formés par les dernières pluies, et faire de grand détour pour trouver un passage où l'eau n'arrive qu'aux chevilles. C'est là où nous apprécions d'avoir de bonnes chaussures, bien étanches jusqu'au dessus de ces dernières, permettant de franchir ce genre d'obstacles sans trop de soucis. En revanche, la vase et la boue n'aident pas, et nous obligent à rester léger. La lumière commence à baisser, et, bien que fatigués, nous accélérons un peu le pas. Nous laissons la plaine - enfin - et sommes aux portes de la vallée. Nous traversons une forêt brûlée par un incendie il y a quelques années. Les arbres aux petits troncs blancs et noirs ne sont hauts que de quelques mètres, et bordent un grand lac qui ne s'est découvert qu'il y a peu de temps. Comme nous le savions, ce ne sont jamais les premières heures, et le premier jour de marche qui sont les meilleures. Comme à chaque fois, ce premier jour ne sert qu'à rejoindre le point de départ des choses vraiment intéressantes. Et en cette fin de journée, alors que le ciel devient rose, que nous arrivons au refuge après, au total, quatre heures et demi de marche, nous ne regrettons pas d'être là, car le décor est surperbe. Et clairement, les ciels de Patagonie à cette heure de la journée, en plein crépuscule, ne ressemblent à aucun autre. Les couleurs sont différentes, et le dégradé de rose et d'orange change constamment, minutes après minutes. Au dessus du lac Pehoé, encore un peu bleu, et du massif juste à côté, le refuge niché en contrebas et paraissant minuscule face à cette masse de deux kilomètres de haut, la claque visuelle n'est pas loin, sans parler des pics légèrement excentrés dont nous avons parlé un peu plus haut.
Nous soufflons un bon coup en entrant dans le refuge désert. Ce dernier est grand, pas du tout éclairé, et accueille probablement une cinquantaine de personnes l'été. Nous tombons sur un grand réfectoire désert, frontale sur la tête pour y voir quelque chose, et trouvons la grande cuisine de la cafétéria, où deux autres jeunes sont là. Un homme vient nous voir pour nous accueillir, et nous montre un dortoir désert où nous pourrons poser nos sacs de couchage sur un des matelas des lits superposés à disposition. Nous avons faim, mangeons quelques gâteaux, préparons un thé, puis dînons peu de temps après, en nous installant dans une pièce chauffée par le feu d'un poêle, que l'homme vient d'allumer. Il a aussi allumé le générateur, pour avoir un peu d'électricité jusqu'à 23h. Nous avons l'idée lumineuse de prendre nos matelas pour les mettre dans cette pièce chauffée, et éviter de dormir dans une chambre où la température doit avoisinner six ou sept degrés, après avoir demandé l'autorisation (personne n'avait jamais fait ça ici apparemment). Nous nous endormons donc au coin du feu, que Fred alimentera pendant la nuit, au son des crépitements et de la lumière changeante des flammes plus ou moins excitées. Nous sommes quasiment seuls à des kilomètres à la ronde, au milieu de la nature, dans le noir, dans une vallée lointaine, en Patagonie, et réalisons que nous sommes tout petits, couchés à côté d'un petit feu d'une pièce quasi-vide dont la lumière ne ressemblerait qu'à une petite étoile depuis les hauteurs du glacier que nous irons voir demain.
sam.
06
juil.
2013
Moment fort de la journée : Prendre le pisco sour chez Mimi
Comme hier dans la guesthouse précédente, le petit-déjeuner ce matin est copieux et bien sympa. Et il fait beau, ce qui est une bonne nouvelle. Finalement, pour le moment, nos craintes
météorologiques datant de Puerto Montt s'avèrent fausses. Espérons que cela dure. Nous partons entre dix et onze heures nous promener dans la ville, pour la découvrir un peu plus (la
ville n'est pas très grande, nous avons eu un aperçu hier soir en allant au supermarché) et pour visiter les agences de location de voiture, et comparer les prix. Dans les rues, il n'y
a quasiment personne. C'est désert. Décidemment, au Chili, les horaires sont décalés. Nous tournons à droite, prenons la direction du fjord "Ultima Esperanza", que l'on aperçoit au
fond, derrière un grand lac aux abords de la ville, et trouvons l'office du tourisme, où nous souhaitons nous renseigner sur les autres moyens de rejoindre le parc national. Malheureusement,
nous sommes samedi, et c'est fermé, tout comme demain. Flûte. Zut. Nous remontons une rue, après avoir aperçu le sigle "Hertz", mais découvrons arrivés sur place que l'agence a
changé d'adresse. Et en demandant de l'aide à une personne (une des rares dans le coin... mais ils sont où les 8 500 habitants ?), nous apprenons qu'en plus de celle-ci, l'agence "Avis"
est fermée, car c'est la saison basse. Autrement dit, il n'y a qu'une agence pour louer une voiture. Niveau compétition et concurrence, on repassera. Nous la trouvons, à l'étage d'un
magasin de vêtements, dans un bureau de 10m². L'homme arrive, après avoir été appelé par le propriétaire du magasin d'en bas, et nous explique avec le sourire les conditions.
C'est normalement 75 euros par jour (le prix payé par les américains), mais il nous fait 10% puisque nous la prenons trois jours. La voiture est un 4x4 âgé, et seul le fait de ne pas
abîmer les rétroviseurs et les phares l'intéresse (éviter un accident aussi bien sûr). Pas grave si la voiture est rayée, ou la peinture abîmée par les graviers des routes que nous
allons prendre. C'est assez simple, et clair. L'affaire est conclue. Nous viendrons la chercher demain matin à 8h30 (nous aurions aimé plus tôt, pour arriver et commencer à marcher plus
tôt, mais impossible). Il est 12h.
Avant de rentrer, nous passons au supermarché faire quelques courses. Nous devons emmener tout ce qu'il nous faut pour les trois prochains jours, soit deux dîners, trois déjeuners, et deux petit-déjeuners. Dans les rayons, nous ressortons les notes que nous avions prises pour le trek d'Abel Tasman, en Nouvelle-Zélande, pour récapituler ce que nous avions pris et ce qu'il nous avait manqué. Dans le chariot, nous mettons donc whisky, bières, bonbons... nan, on rigole. C'est plutôt jambon premier prix, pâtes, cream-cheese, pain de mie, brique de jus de fruit, gâteaux secs, et chips. Nous revenons deux heures après être partis. Nous déjeunons, nous occupons du blog, et commençons à préparer le gros sac à dos que nous allons prendre, et le plus petit.
Vers 16h30, une française d'une bonne soixantaine d'années vient rendre visite à Paulina, la propriétaire de la guesthouse, et discute avec nous. Super sympa, nous lui décrivons notre
programme des prochains jours, et elle nous propose de nous accueillir mardi soir, quand nous reviendrons du parc, pour prendre l'apéritif chez elle (et donc boire un pisco maison).
Elle part avec Paulina, et cette dernière revient cinq minutes plus tard, pour nous proposer de venir avec elles, tellement le ciel est beau à cette heure de la journée, et l'observer
depuis la grande baie vitrée chez elle, donnant directement sur la montagne. Inattendu, et très sympa. Nous enfilons nos chaussures, prenons la bouteille de vin achetée tout-à-l'heure, et
partons. Mimi, c'est son surnom, est un personnage. Installée depuis des années ici, elle a quitté son homme pour suivre ses envies. Personnage haut en couleurs, affable, d'excellente
humeur, ayant beaucoup voyagé en mode "sac à dos", très à l'aise et sympathique, elle fait partie de ces gens qui sont bien dans leurs basquettes et aiment la vie. Le courant passe tout
de suite. Le soleil se couche vite, et nous ne profitons des couleurs du ciel que sur le trajet. Pas grave. Chez elle, nous buvons un verre de Pisco maison (il faut qu'on en trouve à
Paris pour vous faire le cocktail), ouvrons la bouteille, refaisons une partie du monde, l'aidons à changer son mot de passe sur son mail qui vient d'être piraté par, d'après elle, un
homme qui ne partage pas ses idées politiques affirmées, et restons tous les quatre à discuter du Chili, des chiliens et de bien d'autres choses, jusqu'à 19h45. Elle nous
raccompagne. Rendez-vous mardi, pour prendre le "Tomar Once".
A la guesthouse, nous retrouvons la française ayant visité le parc aujourd'hui dans un mini-van (elle a adoré, c'est apparement superbe). Nous dînons, montons dans la chambre vers 22h,
mettons un article en ligne, le dernier avant quelques jours, et éteignons vers 23h.
ven.
05
juil.
2013
L'objectif du jour est de remonter vers Puerto Natales, où se trouve le parc national Torres del Paine (prononcer Torres del "Pahiné"), célèbre pour la forme particulière de trois pics rocheux. Un parc incontournable dans la région et connu dans le monde entier, de 2 400 km² (soit grosso modo la taille des Yvelynes...l'un des plus petits départements français), accueillant 150 000 visiteurs chaque année. Un trek de 4 jours est possible : le "W", célèbre itinéraire formant sur une carte un W, et permettant de voir presque la totalité des points remarquables du parc. Nous verrons si nous pouvons le faire, sachant qu'il faudra alors camper, et que tous les chemins intérieurs soient ouverts. Mais pour le moment, il nous faut trouver un bus. Nous sortons donc en fin de matinée pour écumer les trois agences disponibles dans la ville, et acheter notre ticket pour le prochain départ, prévu à 14h. Le bleu du ciel nous incite à nous promener un peu dans la ville. Nous repassons du coup par la place principale, et visitons l'église à côté.
12h30, nous revenons rue Higgins, à la guesthouse, mangeons des empenadas sur le pouce, et partons une grosse heure plus tard, sacs sur le dos, au coin de la rue, où le car est déjà là. Il
part à l'heure. Le trajet n'a rien de particulier. Nous profitons du moment pour regarder un peu plus en détail le Lonely, et les infos sur Puerto Natales et les environs. Nous
réfléchissons aussi à écrire à notre agence à Londres pour décaler notre départ pour les USA, prévu mi août, afin d'avoir un peu plus de temps en Amérique latine, et de pouvoir ainsi
avoir le temps de faire tout ce que nous voulons au Chili, mais aussi en Bolivie et au Pérou. Rajouter 15 jours serait pas mal, le timing risque d'être serré sinon, notamment au regard
des temps pour parcourir tous ces kilomètres, et des différentes rencontres potentielles. Nous mettons trois heures pour arriver à destination.
En arrivant à Puerto Natales, nous découvrons un paysage plus montagneux que les jours d'avant. Nous retrouvons en effet la chaîne des Andes. Le relief explique les précipitations plus
élevées, et donc la neige aux abords de la route, par endroits, que nous n'avions pas en Terre de Feu, où le terrain était beaucoup plus plat. La végétation est toujours la même en
revanche, typique de la steppe, avec de petites touffes d'herbe. Depuis la fenêtre du car, dans une lumière qui diminue doucement, nous remarquons que toutes les marres ou traces d'eau
sont gelées. Le ciel est globalement clair, même si la lumière de fin de journée éclaire quelques nuages au loin, et l'air transparent, caractéristique des températures froides. Nous arrivons à 17h10.
Nous cherchons une guesthouse à l'aide du Lonely, mais celle que nous choisissons est fermée pour travaux. Nous arpentons quelques rues, en configuration "routard" (deux sacs à dos chacun, de tailles différentes, le sac de couchage accroché à l'un d'entre eux, et quelques sacs plastiques à la main), et en trouvons une autre, "Yoganhouse". L'endroit est très sympa. Nous partons faire quelques courses, achetons un peu de vin et du Pisco Sour à la mangue, et discutons en rentrant avec une française étudiant à Santiago, puis avec un couple d'américains revenant de trois jours passés dans le parc national. Ils nous donnent plein d'infos, nous renseignent sur ce qu'il est possible de faire, sur les refuges ouverts (deux seulement le sont). La bonne nouvelle, c'est que le parc est bien ouvert (nous avions peur à cause de la saison et de la neige), qu'il est possible d'y aller par soi-même, même si le fameux "W" est apparemment fermé. Tout cela nous interesse beaucoup, car nous ne souhaitons pas y aller avec d'autres touristes, et être promenés dans un mini-bus pour voir l'essentiel en une journée. Au contraire, nous souhaitons vraiment en profiter, et pas seulement avoir un aperçu du parc, dormir sur place, accéder à des endroits seulement accessibles à pieds, faire des kilomètres, partir randonner tous les deux, être libres, être dans l'effort, retrouver les sensations propres aux marches de plusieurs jours, nous approprier un peu le parc, et pouvoir dire que nous aurons profité de la chance que nous avons d'être là, sachant que le trek "W" de Torres del Paine fait partie des Top 5 des treks mythiques chez les amateurs de grande randonnée. La seule solution pour ce faire est semble-t-il de louer une voiture. Nous pourrions aussi demander aux bus faisant le tour du parc de nous déposer quelque part, mais tous ne veulent pas apparemment, ou encore faire du stop pour y aller. Cette dernière option ne nous enchante pas. Question de timing : il faudra en effet 5h de marche pour rejoindre le premier refuge, depuis le point d'entrée du parc où se trouve le dernier parking. Allez, on verra demain comment faire, et partirons sûrement après-demain.
jeu.
04
juil.
2013
Température de l'air : 4°C
Température de l'eau : 4°C
Moment fort de la journée : voir les manchots royaux à quelques mètres de nous
Réveil avant l'aube, à 6h45, pour être prêts à 7h30, heure à laquelle le mini-bus passe devant la guesthouse pour venir nous chercher. Il fait froid, mais heureusement, nous ne partons pas
le ventre vide, car Alejandro nous a servi un petit déjeuner copieux (et compris dans le prix).
Nous sommes un groupe de huit personnes, dont un couple de français, que nous avions rencontré - tenez vous bien - à Bora Bora, là où nous logions. Même si nous ne leur avions pas beaucoup parlé, c'est quand même trop drôle de se retrouver là aujourd'hui après s'être vu à des milliers de kilomètres il y a un mois. Il fait encore nuit quand nous partons tous vers le nord-est, pour faire un long détour vers la partie la plus étroite du détroit de Magellan, où nous prendrons un bateau un gros quart d'heure pour continuer la route en Terre de feu, rejoindre Porvenir (où nous aurions dû directement arriver depuis Punta Arenas si le ferry avait fonctionné aujourd'hui), et continuer vers le sud, pour être au milieu de cette grande île et voir les manchots rois. Il faut déjà 3 heures pour rejoindre le bateau. Nous avons donc le temps de regarder par la fenêtre le ciel s'éclairer progressivement, faisant rougir le nuage d'altitude au dessus de nous - dont la couche inférieure passe d'un bleu/gris à un rouge vif avant de retrouver sa couleur originelle quand le soleil fait son entrée. Quelle introduction. Nous passons à côté des restes d'un bateau à voile du 17 ième dont seule la silouhette se détache en contre jour. Ensuite, sur des dizaines de kilomètres, nous regardons le sol désert et froid de la Patagonie du Sud défiler. Nous prenons à droite, pour quitter la route goudronnée sur laquelle nous sommes depuis le départ, pour prendre une piste en terre et graviers, nous emmenant jusqu'au navire sur lequel nous allons mettre le mini-bus, pour franchir tout-à-l'heure le détroit de Magellan : la "Ruta del fin del mundo", qui traverse la dernière partie de la Patagonie, jusqu'au bout du continent. Il est 9h. Petit arrêt rapide à la demande de Fred pour photographier le panneau l'indiquant. Le jour s'est levé, mais personne n'est bien réveillé. Le mouvement de la voiture nous berce tous, même si les innombrables trous nous font sauter toutes les trente secondes, d'autant que le conducteur, qui a dû prendre cette route un bon paquet de fois, fonce tout droit, quitte à faire presque chasser le véhicule parfois dans certains tournants. C'est sport, surtout dans ce mini-van pas vraiment 4x4. Après deux heures passées comme cela (c'est long), au milieu de rien, entourés par une steppe aride et verglacée par moments, nous faisons un arrêt près d'une carcasse de bateau, complètement rouillée, échouée depuis un demi-siècle. On se croirait presque sur la mer d'Aral. Puis nous arrivons sur le détroit. Nous attendons une dizaine de minutes que le cargo arrive, en compagnie d'un mouton très calin, qui recherche les carresses à la manière d'un animal de compagnie. Et voilà la bête qui se colle à Audrey sans avoir eu le temps de dire quelque chose. Le bateau arrive, et nous voilà 5km plus tard en Terre de Feu. Le paysage est toujours désertique, désolé, balayé par un vent froid. Nous allons à Porvenir, à 130km de là, dernière grande ville avant la toute dernière, Ushuaïa.
Nous arrivons à 13h, et commençons par une visite du musée, après s'être arrêtés brièvement sur la "place principale" regarder des statues des "Selknam", les habitants originaires de Terre de Feu, une tribu indienne (les "onas") distincte de celles des autres parties de Patagonie. Leur dernier représentant est mort en 1954. Le musée est petit, ce qui est compréhensible vu l'endroit où nous sommes, et raconte la vie et les moeurs de cette tribu. Nous découvrons aussi une momie, sûrement une personne retrouvée piégée dans la glace, et présentant un état de conservation avancé (voir vidéo). Nous passons au restaurant, en fait une pièce avec quelques tables où l'on nous sert un plat chaud, en l'occurence du saumon, pêché dans les eaux du détroit. Cela aurait été top s'il n'avait pas été trop cuit et complètement sec, donc sans saveur. En sortant, nous remarquons quelques panneaux sur les trottoirs, lorsque nous sommes en haut d'une petite colline, légèrement surélevés par rapport aux autres rues : "zone protégée de tsunami". C'est la deuxième fois du voyage que nous voyons des zones protégées ou exposées aux tsunamis. Cela nous fait bizarre, car voilà bien un risque ou un accident naturel dont nous n'avons, en France, pas à nous soucier. Cela est du coup assez étrange de se sentir concerné, et de se dire qu'ici, ces panneaux ne sont pas là pour faire jolis ou amuser les touristes.
14h45. Nous repartons, montons dans le mini-bus, et continuons la route vers le sud, le long d'une piste semblable à celle de la fin de matinée. C'est que nous ne sommes pas arrivés, et que pour voir les manchots, il faut aller loin, et s'enfoncer dans la Terre de Feu. Nous longeons l'eau, et observons quelques animaux : albatros impérial, lamas, et même quelques dauphins, dont la présence est trahie par l'apparition de trois ou quatre nageoires dorsales dans un mouvement caractéristique de dauphins qui jouent à la surface. Notre guide du jour nous confirme que nous ne nous sommes pas trompés. Cela nous fait bizarre de parcourir toutes ces bornes et d'être à cet endroit du monde, même si le décor n'a rien d'incroyable ou de fantastique. Mais quand nous regardons notre position GPS et la carte sur la caméra, c'est assez fou. Sensation d'être sur un des points remarquables du globe. Nous n'avons, et ne serons probablement pas avant longtemps, jamais été aussi au sud que maintenant, par presque 54°Sud. Quelques flamands roses sont là, de temps en temps, les pieds dans l'eau froide d'un étang presque gelé. Ici, l'eau ne fait que quelques degrés.
Nous arrivons à 16h45, après une dernière heure de route à toutes berzingues, le chauffeur traçant pour être sûr de ne pas arriver avant la tombée de la nuit. Nous nous regardons de temps en temps, flippant un peu quand nous ne le voyons pas ralentir sur certaines portions. Mais bon, après tout, il est sur son terrain, et tout se passe bien. Nous descendons du van, et entrons dans la parc à pingouins, où les manchots viennent tous les jours. En fait, ce parc est plus un endroit où trois ou quatre morceaux de bois ont été aménagés pour fabriquer une entrée pas très loin de là où les manchots se trouvent qu'autre chose. De toutes façons, à part cette "porte "extérieure, il n'y a aucune maison ou aménagement. Et personne d'autres. Avantage d'être en basse saison. Nous aurons donc fait toutes ces heures de voiture, et ce détour considérable, pour être là, faire ces trente mètres, et arriver au bord d'une étendue d'eau nous séparant d'une dizaine de manchots royaux. Mais cela valait le coup, car les avoir à dix mètres est un vrai privilège. Ils sont très beaux, avec une couleur blanche parfaite, puis quelques zones orangées au niveau du cou, et un noir profond sur le dos. Ils ne bougent presque pas. Nous en voyons quand même un marcher en se dandinant sur un ou deux mètres, de manière assez drôle, les "bras" collés le long du corps, dans un mouvement balancé de gauche à droite. Encore une fois, nous prenons conscience de là où nous sommes, si loin, si proche du pôle Sud, à regarder des animaux si différents dans leur élément naturel. C'est vraiment super. Nous en aurons vu des animaux différents pendant ce voyage. En repartant vers le mini-bus, après un gros quart d'heure, nous apercevons un renard gris, assez commun dans la région. Nous repartons vers 17h15. Nous refaisons tout le trajet inverse, dans la pénombre du crépuscule, reprenons le bateau une heure et demi plus tard, arrivons sur le continent vers 20h15, faisons un petit arrêt pour boire un verre aux alentours de 20h45, repartons, traversons la steppe éclairée par les phares, et retrouvons finalement Punta Arenas vers 23h15. Nous avons quitté les manchots il y a plus de 6 heures ! C'est donc contents et affamés que nous arrivons à la guesthouse. Nous finissons les restes du poulet d'hier soir en parlant avec le gérant, qui nous donne des conseils sur les choses à voir pour la suite de notre voyage en Patagonie. Le temps d'écrire et de mettre en ligne un article avant de dormir, et il est 1h du matin.
Demain, nous partirons sûrement pour Puerto Natales, une autre grande ville incontournable pour tout voyageur, à 250km plus au nord.
mer.
03
juil.
2013
Nous sommes les premiers levés dans la guesthouse presque vide, et partons vers 9h, après un petit-déjeuner ponctué par les ronflements d'un client situé dans la chambre tout près de la cuisine. Nous marchons jusqu'à la gare routière, où nous prenons l'ETN ("été éné"), c'est-à-dire le bus pour l'aéroport, où nous arrivons vers 10h. Une seule piste, et une aérogare pas très grande, mais moderne. Embarquement à 10h35, et décollage à 11h10. Un repas est servi pendant les deux heures de vol jusqu'à Punta Arenas. En dessous, les Andes côté Argentine. Nous survolons, surtout dans la deuxième moitié du vol, un désert de terre et de neige. Nous nous coupons du monde pour arriver dans un des endroits les plus au sud de la planète, en Patagonie du Sud, à 50km de la Terre de feu (la partie coupée du continent, donc une île, formant la pointe, ou l'extrémité sud), et à une centaine de kilomètres du point de départ des expéditions pour l'Antarctique, Ushuaïa, à 10 heures de bus de notre destination.
Punta Arenas, donnant en plein sur le détroit de Magellan (qui permet de rejoindre en bateau les deux océans en évitant le cap Horn), est la grande ville de cette partie du monde. Ce n'est
d'ailleurs pas un hasard si un aéroport s'y trouve. 130 000 personnes vivent ici. C'est en fait un ancien poste militaire, existant depuis seulement 150 ans. Au delà du tourisme et du pétrole, on
vit ici du commerce de peau de phoques. Les premiers explorateurs européens clamaient à l'époque que ces terres etaient peuplées par des géants. Un territoire qui a inspiré bien des auteurs
(Chatwin en tête) et des aventuriers, ou encore Florent Pagny. Néanmoins, il paraît que la Patagonie argentine est bien plus belle que celle côté Chili. Punta Arenas est la ville par laquelle
arrivent tous les touristes de la région. Ici, nous allons être entourés de fjords, d'immenses glaciers, de sommets enneigés, de lacs, de déserts, et d'innombrables îles formant une mosaïque dans
l'eau froide du détroit, où vient mourrir la cordillère. Pacifique et Atlantique ne sont qu'à une grosse centaine de kilomètres l'un de l'autre. Nous sommes par 53° Sud et 71° Ouest.
A 13h, nous prenons un "collectivo" (bus) pour rejoindre "al fin del mundo", une guesthouse que nous avions vue sur le Lonely. Première surprise, il fait très beau, loin du temps que nous avons
laissé derrière nous. Il fait froid, environ 6°C, mais sec, avec un beau ciel bleu. Deuxième surprise, notre guesthouse est fermée. C'est vrai que nous n'avions pas réservé, l'ayant choisie hier.
Du coup, nous entrons dans le restaurant français du trottoir d'en face pour demander un peu d'aide. Et là, nouvelle surprise, le chef a vécu pendant cinq ans avec sa compagne chilienne en
France, à Montreuil. Incroyable. Du coup, nous nous mettons à discuter, et restons finalement manger un bout. Ils nous aident en passant quelques coups de fils, nous proposent de garder nos sacs
le temps d'aller voir si une autre est ouverte, et nous servent un bout de terrine maison, au "guanaco", le lama local, puis des profiterolles au chocolat. Pas mauvais tout ça. Finalement, ils
nous trouvent une guesthouse pour passer la nuit. Cool. C'est donc vers 16h que nous allons deux blocs plus loin la trouver. Le gérant, Alejandro, à la tête de Pablo Escobar, nous parle des
excursions possible en hiver, dont une en Terre de Feu pour aller voir les manchots rois qui, contrairement aux pingouins d'Otway, ne migrent pas à cette période de l'année pour se reproduire
dans les eaux plus chaudes du Brésil. Nous ne savons en effet pas bien quelles activités sont possibles en ce moment, à cause de la basse saison et de la météo. Sa proposition nous plaît bien,
d'autant qu'Audrey tient absolument à voir ces animaux dans cette région du monde. Il téléphone pour connaître le prochain jour de visite : demain. Par contre, nous passerons un peu plus de temps
dans le mini-bus que prévu, car la liaison en bateau pour traverser le détroit de Magellan sera fermée pour cause de mer trop agitée. Tant pis, nous prenons quand même, car nous ne voulons pas
perdre un jour juste à cause de cela.
Une fois nos affaires posées dans la chambre au lit grand et confortable, nous partons nous promener en ville, rejoignons la Plaza de Armas pour retirer un peu d'argent, et allons régler
l'excursion de demain à l'agence s'en occupant. Sur les murs se trouvent de grandes cartes de la région, nous faisant réaliser où nous sommes sur le globe, nous donnant une sorte de vertige
agréable. Comme Alejandro l'a suggéré, nous aurions pu louer une voiture pour nous rendre par nous-même en Terre de Feu, et pousser un peu plus loin au Sud, après être allé à Porvenir, la
"grande" ville de Terre de Feu. En marchant, nous découvrons une ville plutôt agréable, propre, avec de nombreux magasins de sport, et des rues fréquentées. Paradoxallement, c'est la ville que
nous préférons depuis le début de notre arrivée au Chili. Nous passons à côté de l'office du tourisme, sur le point de fermer, et nous y arrêtons pour en savoir un peu plus sur les bus, les
choses à faire etc... et en fait, il n'y a pas tant d'activités que ça, à part rejoindre d'autres endroits dans les 500km à la ronde. Nous pourrions aller à Ushuaïa, mais les nombreux
commentaires que nous avons récoltés livrent un avis partagé. A part pouvoir dire qu'on y est allé, l'interêt semble limité. Sachant en plus qu'à cette période, les départs ne sont que le
dimanche, et obligent à rester une semaine là-bas suite aux horaires de bus retour, ce sera sans nous. Il est 19h30. Retour à la guesthouse. Nous dînons et mangeons le poulet rôti acheté au
supermarché, en compagnie d'un couple d'anglais d'une soixante d'années, en voyage sur un voilier depuis 2007. Un peu hermites, ils ne parlent pas beaucoup et répondent juste à nos questions. La
guesthouse est sympa, bien qu'un peu vide. Fred attrape une des guitares électriques à disposition, termine le vin, pendant qu'Audrey fait les comptes et le résumé de la journée sur son Iphone
(sa partie du boulot dans l'écriture des articles).
Vers 21h30, nous montons dans la chambre, regardons une série, et lisons un peu les news françaises. On découvre qu'il ne fait pas bon d'être français en Bolivie aujourd'hui. Espèrons que cela
s'arrange d'ici trois semaines, au moment où nous y arriverons...
mar.
02
juil.
2013
Il est 7h30 quand nous arrivons à destination. Nous avons dormi plus ou moins bien, quelquefois réveillés par les quelques arrêts prévus sur la route. Le bus s'est vidé, et il ne reste qu'une petite dizaine de passagers à Puerto Montt. La pluie nous accueille. Pas étonnant, quand on sait qu'il pleut presque 300 jours par an dans cette région du Chili, aux portes de la Patagonie du Nord. Nous nous réfugions à l'intérieur du hall du terminal, un peu perdus, et nous installons pour prendre un café et manger un donut assis autour d'une des trois petites tables disposées autour du café en question, qui ressemble plus à un endroit à emporter plutôt qu'à un véritable café où s'asseoir. Dehors, il pleut à torrent. Le jour est en train de se lever. Contents d'être arrivés, nous sortons le Lonely Planet, regardons nos cartes, et réfléchissons à la suite du programme. Derrière la vitre à laquelle nous tournons le dos se trouve un bras d'eau, un bout l'océan qui a réussi à s'infiltrer entre les nombreuses îles du coin, dont la plus grande et la plus jolie se nomme Chiloé (beaucoup de monde nous conseille de la rejoindre... il paraît que c'est superbe. L'endroit fait partie de la liste des sites classés à l'Unesco). La Patagonie est en effet un bout de terre qui se déchire et se délite en de multiples îles côté ouest, pour former un ensemble de fjords, de réserves naturelles, et de bouts de terre entourés par l'eau refroidie par des courants venants de l'Antarctique.
La question que nous nous posons est de savoir si nous restons là ce soir, si nous allons à Chiloé, ce que cela implique en terme de trajet et d'organisation pour la suite, comment rejoindre à
moindre coût la Patagonie du Sud, à 1300 km d'ici, comment procéder une fois que nous y serons pour voir les différents endroits que nous avons sur notre liste (s'étalant sur 350km), et une fois
terminé, comment rejoindre le nord du Chili, la prochaine grande étape. Beaucoup de questions, mais aussi des contraintes. Une de temps, car nous n'avons que trois semaines pour faire tout cela
(et passer ensuite à la Bolivie), une d'argent, et une autre liée aux lignes de bus disponibles pour parcourir ces 1300km et la pointe Sud du Chili. La bonne nouvelle, c'est que nous avons ici,
au terminal, toutes les compagnies disponibles, et pouvons donc aller poser les questions qu'il faut, connaître les prix, et avoir les infos. Le soucis, ce n'est pas notre espagnol limité, mais
que certaines lignes ne sont ouvertes que certains jours dans la semaine, que d'autres sont fermées, et qu'il va falloir passer par l'Argentine, changer une ou deux fois de bus (sans pouvoir
acheter les tickets à l'avance, il faudra attendre d'être sur place à Bariloche pour savoir quels bus sont disponibles). L'autre soucis, c'est que rejoindre Punta Arenas, la dernière grande ville
de Patagonie de Sud (une destination incontournable pour tout voyageurs dans cette partie du monde... il n'y a pas cinquante points de départ disponibles pour visiter cette région du monde
là-bas), va prendre 35h en bus. Et apparemment, le bus qui part dans quelques heures n'a pas de sièges "semi-cama" : pas possible donc de s'allonger un peu. Bref, inconcevable pour une telle
durée. Il va donc falloir trouver autre chose. Nous envisageons de prendre le Navimag, un cargo descendant là-bas en trois jours. Cela peut être fun, différent, et nous permettre en plus de
passer au milieu des fjords, et traverser toute cette région par la mer. Cela nous tente, mais il faut débourser 300 euros par tête, donc une fortune pour nous et à ce stade du voyage, et d'après
le Lonely, l'expérience peut être difficile en cas de météo capricieuse et de mer agitée. Avec Audrey et son angoisse du mal de mer, nous décidons donc d'abandonner cette idée. Nous ne
connaîtrons donc pas l'ambiance des porte-containers, à côtoyer les marins. Il paraît pourtant que les soirées un peu arrosées, la promiscuité, et l'environnement maritime constituent un cocktail
inoubliable.
Une grosse heure est passée, et nous n'avons pas beaucoup avancé. En fait, on ne sait pas bien comment faire pour résoudre cette équation à plusieurs inconnues. Nous imaginons plusieurs plans,
mais aucun ne nous convainct réellement. Allez, c'est décidé, nous restons la journée ici, allons regarder tout cela cet après-midi, et nous poser un peu. Aller à Chiloé, malgré les opinions des
autres, ne nous semble pas la chose à faire, car cela complique les choses pour nous. Il y a tellement de choses à faire dans toute cette partie du Chili de toutes façons. Et avec le temps qu'il
fait, nous avons peur de ne pas voir grand chose. Il faut bien faire des choix. Sacs sur le dos et sur le torse, protégés chacun par leur cape de pluie individuelle, capuche sur la tête, nous
sortons de la gare routière, et marchons jusqu'à une guesthouse que nous avons repérée sur le Lonely, pas très loin. Nous montons la grande côte un peu glissante, et arrivons sur place, dans une
maison rustique où il n'y a pas grand monde. La personne nous ouvrant est très aimable, nous montre une grande chambre pas très chaude mais qui nous convient, et nous fait visiter la maison, dont
les pièces ressemblent un peu à celles qu'auraient pu avoir notre arrière grand-mère (tableaux aux murs, poêles à bois, tapisseries...). Allez, hop, on prend. Nous passons du coup une grosse
partie de l'après-midi à poursuivre nos recherches, assis sur notre canapé rose à côté du petit radiateur qui chauffe difficilement. Dehors, c'est toujours le déluge. Cela nous inquiète un peu,
car nous imaginons que c'est pareil, ou pire, dans le Sud du pays, et que nous ne verrons pas grand chose des merveilles régionales. L'idée de zapper cette partie nous traverse l'esprit, pour
disparaître aussi vite : pas question d'être si près et de ne pas se donner les moyens de voir les glaciers, la Terre de feu, Torres del Paine (un parc national mythique) et autres... même si le
temps sera mauvais. Nous ne voulons pas avoir de regrets, alors allons voir... et nous verrons bien justement. Mais au moins, nous y serons allés.
Bon, au bout d'une heure, après avoir cherché, nous apprenons qu'il est impossible de rejoindre la Patagonie du Sud sans passer par l'Argentine, car les trajets en bus impliquent de multiples
étapes, dont certaines en bateau, et certains endroits sont bouchés à cause des glaciers, se jetant directement dans la mer. De plus, les nombreux volcans aux alentours peuvent être capricieux,
comme en 2010 lorsqu'ils ont barré et détruit la route. Nous nous rabattons donc sur une option que nous regardons depuis tout-à-l'heure : prendre un vol pour Punta Arenas, et voir plus tard
comment nous ferons. L'avantage, c'est que nous pouvons être demain soir là-bas, pour 120 euros par personne (un peu cher par rapport au bus, mais acceptable, surtout vu le gain de temps). Nous
nous débrouillerons pour remonter en bus sur Santiago, où nous prendrons un vol pour le nord du pays. Nous pourrions prendre un vol sec de l'extrémité sud jusqu'au nord (5000km plus haut !), mais
le prix des billets (400 euros) est trop élevé et surtout, cela impliquerait que nous redescendions les kilomètres faits vers le nord pour nos visites. Impossible par contre de réserver par
Internet le vol pour demain, car le décollage est dans moins de 24h.
La faim nous tiraillant, fatigués par toutes ces recherches et questions (c'est une vraie prise de tête pour être franc), nous partons faire une pause et chercher quelque chose à manger. En
l'occurrence un steackhouse au coin de la rue, indiqué sur le Lonely, que nous ne trouvons pas. Direction du coup le supermarché, pour acheter des empenadas à emporter, que nous avalons sur le
chemin en direction de l'office du tourisme, à quelques blocs de là. Le soleil pointe le bout de son nez alors que nous parcourons les rues de la ville, plutôt fréquentées. Nous faisons part
là-bas de notre difficulté à réserver le vol de demain, mais, coup de bol, l'agence Sky Airlines est juste à côté. Nous nous y rendons, et prenons notre vol de 11h10 de demain. Ca, c'est fait !
Dehors, dans la rue, nous ouvrons grand les yeux pour voir si les influences allemandes dont nous avons entendues parler sont bien présentes, mais, allez savoir, nous ne les reconnaissons pas.
Sur le trajet pour revenir à notre chambre, nous profitons du beau temps pour marcher le long de l'eau, en nous disant que nous allons aller sur l'un de endroits les plus au Sud de la planète, et
que nous ne serons peut-être jamais si proche de l'Antarctique, une destination qui fait rêver Fred. Mais quand on connait les prix, entre 15 000 et 50 000 euros, pour aller sur ce continent
exceptionnel, ce n'est clairement pas pour demain. Nous passons au supermarché, achetons de quoi manger ce soir, dépensons 3,5 euros à deux, et rentrons.
A la guesthouse, soirée calme et reposante, sachant que nous savons où nous serons demain, et ne perdrons pas de temps. Dîner calme malgré un berger allemand qui rentre dans la cuisine pour
fouiller dans les poubelles, petite série regardée sur le PC au fond du lit, et extinction des feux vers minuit. Patagonie, nous voilà.
lun.
01
juil.
2013
Moment fort de la journée : s'asseoir dans un car pour la nuit sans bien savoir vers quoi nous allons
Réveil à 9h, en compagnie de la femme de ménage d'Arnaud, avec qui nous échangeons quelques mots, malgré les efforts réciproques de faire plus. Au Chili, il est fréquent d'avoir du personnel de
maison. Nous nous attardons un peu, en profitons pour suivre le conseil de notre ami audois et lui donner les trois affaires à laver que nous avons, et partons à La Poste pour envoyer quelques
affaires pour la France. Nous longeons un parc municipal, ou plutôt une sorte de place rectangulaire où les arbres manquent un peu, tournons à gauche, et arrivons sur une autre, plus vivante,
coincée entre quatre rues fréquentées. A l'intérieur du bâtiment public, nous n'attendons pas longtemps avant que notre tour arrive, et expliquons notre objectif. C'est assez simple au début,
mais se complique quand on nous explique qu'il faut décrire exactement tout ce que notre paquet contient, ainsi que la valeur unitaire de chaque objet. D'habitude, nous devons effectivement
décrire grossièrement le contenu et lui donner une valeur, mais là, c'est un inventaire complet que nous devons faire. Et sans savoir quels mots utiliser, car tout doit être fait en espagnol. Pas
simple, mais nous le prenons bien, et rigolons en faisant face à une lourdeur administrative qui nous rappelle des souvenirs. Du coup, on fait au pif, sans clairement savoir combien vaut tout ça,
ni connaître exactement par coeur ce que nous envoyons. Peu importe. Pendant ce temps, une classe d'adolescents est arrivée, et attend son tour. Ils nous dévisagent tous, en nous regardant du
coin de l'oeil, curieux et amusés. Ils ont envie de nous parler, nous envoient des sourires timides, sans oser venir vers nous. Nous leur parlons donc, en demandant aux plus proches comment ils
s'appellent. Dès lors, tous les autres arrivent et écoutent, puis se font du coup interroger. Javiera, Daniela, Luis... sont quelques-uns des prénoms que nous avons retenus. Cela nous rappelle
l'école dans laquelle nous étions allés au Népal. Quelque chose qui n'est pas arrivé assez souvent à notre goût. Nous sortons l'Iphone pour prendre une photo tous ensemble et immortaliser cet
instant.
Une fois terminé, et avoir calculé le prix du kilo par avion (7,3 euros/kilo, soit 35% de moins qu'en Nouvelle-Zelande), nous nous arrêtons quelques instants acheter un café et quelque chose à
manger, et nous rendons à la gare routière, un peu plus loin, pour prendre notre ticket de car pour ce soir. Nous apprenons qu'un bus part pour Puerto Montt, notre destination, à 21h30. Tant
mieux, car nous pensions le prendre plus tard, vers minuit. Nous bookons deux places au rez-de-chaussée (il y a un étage dans ce bus, comme souvent pour les longs trajets), et deux sièges
"semi-cama", c'est-à-dire se baissant partiellement, mais pas complètement, pour former un vrai lit et une position horizontale. Cela dépend des bus, et des compagnies. Nous arriverons demain
matin vers 7h, soit après presque 10h de trajet. Nous payons les 12 000 pesos requis, soit 18 euros par personne. Rendez-vous ce soir.
Juste avant l'heure fixée par Arnaud, 12h, nous arrivons chez lui, attendons son retour, puis partons pour aller déjeuner chez son ami "El Pato", à 60km de là, dans une grande hacienda, ou
"campo", au bord des vignes, d'orangers, de cactus (produisant des figues de barbarie, que nous goûterons en fin de journée), ou encore de kakis. L'idée est de gouter plusieurs vins autour d'un
bon morceau de viande. Nous emportons du coup deux bouteilles de Regalona, dont une des dernières de 2007, et l'autre de 2008. En rentrant, nous irons faire un tour à la cave où Arnaud travaille
pour goûter les 2011 et 2012. Nous roulons pendant trois quart d'heure, sortons de la route goudronnée, et empruntons une longue piste en terre perdue dans la campagne, pour arriver finalement à
la propriété. Juste avant, sur la dernière portion, quelques instants après avor refermé la grille en bois derrière nous, Arnaud s'arrête pour nous montrer des cèpes de pins, des champignons
semblables à ceux que nous connaissons, poussant au pied des pins environnants (un grand nombre de pins sont plantés chaque année au Chili, pour l'industrie du bois, appauvrissant au passage les
sols et ne laissant aucune chance aux espèces locales). Excités, nous proposons d'en ramasser, de les ramener chez son ami, et de les manger ce midi avec un peu d'ail. Nous voilà du coup partis
pour une demi-heure de cueillette, en nous servant d'un parapluie comme panier, et en apprenant à distinguer les champignons valables (les petits, dont le dessous du chapeau n'est pas encore trop
jaune ni mousseux) des autres. Une fois la quantité suffisante ramassée, nous repartons et arrivons. Fabrizio (el Pato) est un bon vivant, souriant, avec un faux air de Garcimore (sûrement la
coupe de cheveux...), content de voir Arnaud et de nous rencontrer. Il revient du Sud de la France, où il allait pour la première fois, et s'amuse avec Arnaud à jurer en français dès qu'il peut.
Un truc universel. Du coup, nous apprenons notre premier juron en chilien ("me importa una raja"). La maison est grande, rustique, et nous passons une bonne heure dehors, près d'un des barbecues,
à côté du four en terre, à préparer les champignons. De superbes morceaux de viande attendent d'être mis sur la grille. Ils proviennent de boeufs ayant tirés des embarcations pour les sortir du
port, quand ils ne restaient pas dans les prairies à brouter l'herbe. Autrement dit, des boeufs sains, qui n'ont pas été nourris au grain, et dont la chair est tendre (rien qu'au toucher), et la
graisse peut-être un peu moins saturée. Nous verrons en les mangeant, mais d'aspect, la viande est superbe, locale, et l'énorme entrecôte non découpée sur l'autre table est impressionnante. C'est
clair, nous avons faim. Mais nous commençons par boire, en débutant par la bouteille de 2007, qui a très bien veillie, en épluchant les champignons et en mangeant un peu de saucisson, tous autour
de la table. Cela dure un petit moment. Arnaud les met ensuite à cuire en deux fois dans une casserolle posée sur la grille, les assaisonne, puis rajoute de l'ail. Dommage, nous n'avons pas de
persil. Quelques saucisses grillent pendant tout ce temps, que nous mangeons à la volée. Nous mettons ensuite les morceaux de viande, et nous re-servons du vin. La deuxième bouteille est à ce
moment entamée. Nous rentrons à l'intérieur pour nous mettre à table, et déjeuner. Il est 15h30. Depuis tout-à-l'heure, du Julio Iglesias tourne sans cesse. Arnaud adore, et c'est ici au Chili
que le chanteur a connu parmi ses plus grands succès. L'après-midi passe donc rapidement, dans cette ambiance de bons vivants. La Regalona 2008 est un peu plus puissante que son aînée, et passe
très bien. Nous partons ensuite marcher dans les vignes et vergers d'El Pato, en passant devant d'énormes cactus dont les fruits ne sont autre que des figues de barbarie - que nous goûtons sur le
champs, bien qu'elles soient trop jeunes et amères - des orangers, ou des oliviers, puis en revenant en terminant la boucle de 30 minutes que nous venons d'effectuer. Le soleil se couche et nous
offre un joli ciel, avant qu'il ne fasse complètement nuit, et nous donne le signal du retour.
Le trajet vers Linares se passe sans histoire. Après une heure de route sur la piste en terre non éclairée puis sur l'autoroute, nous arrivons, et passons voir là où Arnaud travaille comme
winemaker. Nous visitons les lieux, saluons le gardien, passons au milieu des cuves de différentes tailles, visitons le bureau d'Arnaud, ainsi que l'endroit où il quantifie certaines
caractéristiques du vin, rempli d'alambics, de pipettes, ou d'instruments de mesure divers. Il est en revanche malheureusement trop tard pour goûter les derniers vins mis en bouteille. Nous avons
en effet trop tardé chez El Pato, même si nous ne regrettons rien. Chez Arnaud, nous faisons nos sacs, bien qu'ils n'aient pas été beaucoup défaits depuis hier, discutons un peu, avant qu'il ne
nous accompagne à la gare routière de la ville, vers 21h15. Au revoir un peu triste, dernières salutations et accolades après ces bons moments et ces quelques jours, et nous voilà à attendre
notre bus, nos gros sacs posés par terre, dans le froid. Tiens, cela faisait longtemps que nous n'avions pas été comme ça, sacs sur le dos, en mode 4x4, à tout transporter. Ce moment marque un
peu le début de notre aventure en Amérique du Sud, car nous sommes désormais seuls, loin du réconfort et des repères inconscients donnés par les grandes villes, à partir dans le sud du pays, dans
un continent que nous ne connaissons abolument pas et sur lequel nous avons entendu bien des histoires. On y pensait avant de partir de France, maintenant, il va falloir faire gaffe à nos
affaires, dans les bus, dans les guesthouses, partout. Ce sentiment un peu spécial est renforcé par le fait que nous n'avons rien préparé quant aux jours à venir. Nous arrivons demain à Puerto
Montt, mais après, c'est le point d'interrogation sur la suite.
Le bus arrive avec un peu de retard, et nous découvrons après avoir mis nos sacs dans la soute (nous avons reçu un ticket en échange, c'est rassurant) que les places 15 et 16, qui sont sensées
être les notres, n'existent pas. Mince. On ressort, on demande de l'aide et des explications, mais non, nous aurons droit à celles à l'étage, numéros 56 et 57, tout à l'arrière. Nous qui voulions
être en bas, endroit toujours plus confortable. Tant pis, nous n'avons pas d'autres choix, sauf prendre le car suivant, à minuit et demi. A l'intérieur, toutes les places sont dejà occupées par
des chiliens - certains dormant dejà (le car vient de Santiago) - sauf les deux du fond qui nous attendent. Bon, heureusement, ces places ne sont pas moins bien que celles que nous avions
réservées, et le dossier se baisse presque complètement, nous permettant d'adopter une position quasi-allongée, comme celle de notre voisin de devant, laissant du coup peu d'espace pour nos
jambes. Mais c'est pas mal. Et étant tout à l'arrière, nous ne craignons pas trop de nous faire voler notre sac (les sacs sont en effet généralement dérobés par les voisins de derrière, qui les
tirent en passant le bras sous votre siège). De toutes façons, c'est, d'après les témoignages que nous avons eus, plutôt en Bolivie et surtout au Pérou qu'il faudra être particulièrement
vigilant. Le car se met à rouler, nous regardons un peu le film diffusé sur les petits écrans disposés à quelques endroits, et nous endormons, sans trouver de sommeil bien profond. Les rideaux
sont tirés. Destination unknown. Un des moments du voyage où nous nous trouvons devant un grand point d'interrogation...
dim.
30
juin
2013
Réveil difficile pour tous les deux, mais surtout pour Audrey qui n'a pas très bien dormi cette nuit, mais debout malgré tout, puisque Arnaud vient nous chercher vers 11h. Nous l'avons décidé hier soir, aujourd'hui, nous partirons avec lui pour Linares, à 300km au Sud de Santiago, pour aller chez lui, et passer la journée de demain dans la propriété de son ami Fabricio, autrement appelé "el Pato", qui travaille avec lui, et est devenu un ami. Nous partirons lundi soir en bus pour descendre 730 km plus au Sud, rejoindre Puerto Montt et commencer le deuxième chapitre de nos aventures chiliennes, celui consacré au Sud du pays (et normalement au froid !). Contrairement à d'autres destinations dans lesquelles nous sommes allés, ici, en Amérique Latine, nous n'avons pas préparé grand chose, même si nous savons ce que nous souhaitons voir. C'est juste que nous n'avons pas vraiment de plan à dérouler. Et c'est donc pour cela que nous avons accepté la proposition d'Arnaud, de l'accompagner, car nous sommes libres de nous organiser comme nous voulons. Et tant pis si nous ne savons pas bien comment nous nous en sortirons pour parvenir à nos fins. Esprit tour du monde quoi. Esprit d'aventure. Allons dans l'inconnu. Au bout de presque 8 mois de voyage, ce n'est pas quelque chose qui nous effraie (enfin, Fred surtout). Super nouvelle donc, qui va nous permettre de passer un peu plus de temps avec "Don" Arnaud (les gens appellent souvent quelqu'un d'un peu important, ou d'agé "Don" ici... on aime bien cette petite touche, on trouve que ça fait classe), de visiter des vignes, de discuter, de mieux se connaître, et de passer un bon moment chez un chilien, amateur de bonne chaire (et qui revient de son premier voyage en France d'ailleurs, en compagnie d'Arnaud, qui lui a fait entre autres visiter l'Aude).
La soirée ayant été longue, et la nuit courte, Arnaud nous prévient par texto qu'il passera finalement vers 12h30. Nous libérons la chambre, et passons une heure et demi dans le salon de la
guesthouse, le dos chauffé par les rayons de cette journée très ensoleillée. A 12h20, nous montons à bord du pick-up. C'est parti pour quelques heures de route, à descendre la Ruta 5 (ou
Carretera Panamericana), autrement dit la seule véritable autoroute du pays, longue - excusez du peu - de plus de 5000 km. Le Chili, ce n'est pas large, mais c'est grand. Cette route, c'est un
peu comme la route 66 aux Etats-Unis, celle qui traverse tout le pays. Sur notre gauche, la cordillère des Andes est bien visible, tout comme les sommets enneigés, excepté celui de l'Aconcagua -
plus haut sommet d'Amérique du Sud, culminant à 6960m - pourtant situé dans les environs de la ville. Mais sur notre droite, alors qu'il devrait y avoir l'océan, même si nous ne le voyons pas
d'ici, se trouve une autre partie de la cordillère. Nous sommes en effet dans la seule partie du Chili où deux cordillères cohabitent, séparées par une grande vallée, avant qu'elles ne se
retrouvent et se rejoignent à un moment, la Ruta 5 passant juste au milieu, avant que les montagnes n'occupent plus que la partie Est. Nous arrivons après quelques temps dans la vallée Santa
Cruz, une des meilleures régions viticoles du pays, puis continuons, après deux heures de route, sur des domaines réputés comme l'Apostole, ou les vignobles Viu Manent, non sans avoir failli
écraser un ou deux chiens depuis tout-à-l'heure, tellement ils sont nombreux, et en liberté, au Chili, sans parler de l'absence de grillages ou de protection en général. En Australie, nous
voyions souvent des kangourous morts sur la route. Ici, ce sont des chiens. A chacun son style, ou ses spécificités. Nous passons par l'un des domaines les plus grands au monde en surface (mais
dont certains vignobles sont répartis autre part au Chili ou à l'étranger). Arnaud nous montre aussi une zone où il a acheté ses raisins (car ici, vous n'êtes pas obligé d'avoir de la vigne pour
faire votre vin, vous achetez généralement des raisins pour faire le votre). Deux autres grands producteurs de vins, Santa Rita et San Pedro, sont installés ici et ont des domaines un peu
partout. Au bout d'un moment, tard pour nous mais à l'horaire habituel au Chili - donc vers 15h - nous nous arrêtons pour trouver un restaurant, après avoir passé Rancagua, une grande ville du
coin. Arnaud en a un en tête depuis le début. Un restaurant péruvien, mais qui est en fait fermé, comme la plupart des restaurants aujourd'hui, pour cause d'élections primaires pour la
présidentielle de Novembre (nous avions vu les affiches à Santiago). Incroyable, surtout que nous allons apprendre que la participation s'élève à seulement 10%. Nous nous arrêtons finalement dans
un restaurant situé dans un hôtel façon "Relais et Châteaux", où nous ne pouvons commander de vin, pour la même raison. Arnaud n'y croit pas. Nous mangeons un joli morceaux de viande, une sorte
d'entrecôte (le "lomo vetado") cuite au barbecue, délicieuse. Il fait toujours aussi beau, mais un peu frais.
Nous repartons, et profitons de la belle lumière pour faire un détour et visiter quelques vignes, voir des pieds centenaires, des cultures en pergola (que nous n'avons jamais vues en
France), en parlant du terroir chilien et de la qualité des terres du pays. "Tout pousse ici, la terre est fantastique", nous dit Arnaud. "Et le nombre de terrains non exploités est
hallucinant...c'est fou, mais c'est fou ce qu'il y a comme place" rajoute-t-il avec l'accent du Sud-Ouest. On sent le potentiel. Nous ne sommes pas en Chine, mais nous comprenons que les
opportunités sont énormes ici, en tous cas dans l'agriculture et les industries liées. Près d'un domaine, nous nous rapprochons des eucalyptus géant (à la taille des arbres, nous comprenons en
effet que beaucoup de choses poussent, et vite, pour atteindre une taille que nous n'avions pas rencontrée en Australie), et Arnaud nous montre les colibris faire du sur-place pour picorer la
fleur d'eucalyptus : ils sont tout petits, assez hauts, et parfois difficile à voir. On dirait de gros insectes, restant immobiles, puis se déplaçant rapidement pas très loin, pour fuir
finalement vers un autre arbre. Une première pour nous.
Après avoir repris la route, et observé, en quittant la piste en terre bordant les propriétés, les arbres protégés laissés au milieu des vignes (interdiction de couper ces deux espèces
d'arbres), nous roulons une demi-heure, et arrivons chez Don Santiago, l'ancien employeur d'Arnaud, qui l'a aidé à s'installer au Chili et lui a donné sa chance. Un gros propriétaire de
70 ans, qui nous accueille très gentiment, et nous invite à table pour prendre le "tomar te" ou "tomar once", une sorte d'aftenoon tea que les chiliens ont l'habitude de prendre entre
le déjeuner et le dîner, aux alentours de 17/18h (qu'est ce qu'ils mangent tard ces chiliens, c'est l'exact opposé des polynésiens). Arnaud ouvre une bouteille de Toro de Piedra Gran
Reserva 2010 du domaine, qui, après s'être ouverte un peu, donne un vin fin, rond, et assez long en bouche. La première bouche n'attaque pas trop, et monte progressivement, comme Fred aime.
Don Santiago et sa femme, eux, sont au thé, et se préparent des tartines de pain-beurre-confiture de mûres, tous assis dans la cuisine de cette grande maison, cette hacienda, qui
ressemble presque à un ranch. Nous partons en sachant que nous pouvons les appeler si nous avons un problème au chili, et en les saluant poliment.
C'est ensuite une longue heure et demi de piste et d'autoroute dans la nuit pour rejoindre la maison d'Arnaud, en passant par la plus grande zone viticole du pays, pour arriver à Linares vers 21h30, discuter un peu, et nous coucher, après qu'il nous ait montré où envoyer demain quelques affaires en France, et acheter nos tickets pour le bus de nuit que nous prendrons en fin de soirée pour descendre à Puerto Montt.
sam.
29
juin
2013
Allez, zou, back to Santiago. C'est qu'on a un rendez-vous. Arnaud est un ami d'une amie d'Audrey, originaire de l'Aude, ayant émigré au Chili il y a deux ans, pour y faire ce que sa famille a toujours su faire... du vin. Après un lever matinal, une heure et demi de bus pour rejoindre la capitale du pays, quelques stations de métro, et avoir retrouvé la guesthouse d'il y a deux jours, nous reprenons nos sacs, les installons dans notre nouvelle chambre d'un jour, et sommes juste prêts quand Arnaud débarque pour venir nous chercher. Nous avions en effet convenu de procéder comme cela, sur son conseil, par mail. Il est 11h20. Il est tout de suite très sympa, et sa voix chante l'accent du Sud, ce qui fait drôle à 10 000 km du pays cathare. Aujourd'hui, tout s'annonce bien, et la meilleure preuve est le beau temps, qui permet de voir la chaîne andine dès que nous quittons le centre ville, pour retrouver une amie à lui, Maria-Jose ("Marrria Rosé"). Nous grimpons dans son pick-up, et lui racontons notre périple. Le contact se crée dès les premières minutes. Fred est ravi de cette rencontre, car c'est l'occasion rêvée d'en apprendre plus sur le vin chilien, et ce qui tourne autour. Car Arnaud travaille pour un gros domaine (200 000 hectolitres de cuves) comme "winemaker" (celui qui élabore les assemblages, contrôle la qualité, et permet d'obtenir le vin vendu en bouteille), mais fait aussi son propre vin.
Nous partons rencontrer Maria-Jose, qui vient de rentrer au Chili il y a quelques mois, après avoir vécu 12 ans en Californie, à San Diego. Nous la rencontrons chez elle, restons un petit moment, puis partons tous les quatre visiter un peu la ville, et manger un bout. Nous évitons les quartiers dans lesquels nous sommes dejà allés, et allons voir une église typique du pays, et de son histoire hispanique. A côté, un marché artisanal vend de nombreuses choses, mais pendant les 20 minutes pendant lesquelles nous marchons dans les petites allées, nous ne prêtons en fait que peu d'attention à ce qu'il y a autour de nous, pris dans nos conversations. Arnaud et Fred accrochent tout de suite, surtout quand ils commencent à parler de nourriture, de produits de bouche et de cuisine. Arnaud lui raconte qu'il connait un grand propriétaire agricole dans le Sud de la région, qui engrassait autrefois des boeufs Wagyu, lui explique comment cet homme travaille sa terre pour qu'elle donne une herbe de qualité, comment les bêtes sont déplacées fréquemment pour qu'elles puissent nourrir et fertiliser la terre, lui raconte que les chiliens ne connaissent pas du tout les produits comme le foie gras, mais surtout les patés, les saucissons, ou tous les produits un peu finis issus du porc ou du boeuf, et se contentent généralement de vendre de la viande brute, sans la travailler pour lui apporter plus de valeur. Fred n'en croit pas ses oreilles, notamment quand il apprend que ce grand propriétaire a toujours cherché à s'y mettre, sans trouver les relations et contacts qu'il faut. Au fur et à mesure qu'Arnaud lui raconte tout ça, et rajoute bien d'autres détails interessants et qui veulent dire beaucoup, il comprend qu'il y a beaucoup de choses à faire ici. Il lui raconte son expérience du Wagyu au Japon, la différence avec celui vendu à l'étranger, ou encore son ressenti par rapport à l'absence de subtilité dans les plats/produits qu'il a trouvés chez les bouchers, fromagers, ou traiteurs du monde par rapport à ce qui existe en France. Puis ils parlent tous les deux de vins, de la manière dont Arnaud travaille (c'est-à-dire traditionnellement), de son parcours etc... compte rendu dans la rubrique "bouffe". Audrey discute pendant tout ce temps avec Maria-Jose des différentes cultures et de l'artisanat chilien, et nous voilà tous à n'avoir envie que d'une chose : un plat bon et chaud.
Nous partons donc dans un restaurant situé dans les beaux quartiers de Santiago, qui n'a rien de très huppé mais a une excellente réputation auprès des chiliens, chez Dona Tina. Il y a pas mal de monde, aucun touriste, mais nous nous asseyons sans mal à une table. Pisco Sour de rigueur, puis bouteille de vin, et plats. Arnaud et Maria nous expliquent certains plats chiliens comme le "Humitas con tomate" ou le "Pastel de Choclo". Le premier est un mélange de maïs haché et de fromage de chèvre, avec du basilic, du cumin, du piment (un plat que l'on trouve aussi beaucoup dans le nord de l'Argentine) et enveloppé dans des feuilles de maïs, et le second une sorte de parmentier de viande couvert d'une crème de maïs parfumée au basilic. Nous nous contenterons d'une bonne viande, puisque ces plats ne sont disponibles que l'été. Le vin est doux, peu tannique, pas très puissant, loin des bordeaux ou de certains vins du Sud qui sont parfois un peu trop agressifs, notamment quand ils sont jeunes. Décidément, les vins chiliens brillent par leur suavité, à la différence des vins australiens par exemple.
Une fois terminé, nous rentrons chez Maria José, le regard posé sur les montagnes pendant le trajet (nous songeons d'ailleurs peut-être à faire du ski au Chili, car la saison et la région s'y prêtent), passons une petite heure, et emmenons ses enfants chez leur grand-mère. Nous passons ensuite au supermarché faire quelques courses, car ce soir, Fred cuisinera chez Maria, où nous passerons la soirée. Le supermarché est grand, il y a énormément de monde, et le rayon vin est peut-être celui qui dispose de la plus grande place. Trois linéaires y sont consacrés, alors que ceux des produits frais n'en ont presque pas autant, en tout cas en surface. Nous parcourons les rayons, à la recherche de langoustines, qui ne sont pas disponibles, ni de gambas fraîches, nous obligeant à prendre celles surgelées. La crème fraiche est en conserve. Le carpaccio de langoustine que Fred aime faire découvrir à ses hôtes sera donc loin de celui de chez Passard, mais l'intention y sera. Nous prenons aussi des champignons, de la moutarde (de la vraie, de Dijon, de chez Maille... car "moutarde de Dijon" veut tout et rien dire en dehors de la France, comme en Australie, ici, ou aux USA... il faut donc faire attention si l'on veut retrouver le goût de notre moutarde), et des filets de poulet pour le plat principal. Arnaud s'occupera bien sûr du vin, et nous servira sa "Régalonade", autrement dit le vin qu'il produit à son compte. Une fois sortis des quelques embouteillages, nous arrivons chez elle, et nous mettons au travail, pendant qu'elle et Arnaud nous servent un Pisco Sour bien frais, et commentent notre temps de préparation (un peu long il est vrai, les gambas n'étant pas bien décongelées, et prenant du temps à préparer). On s'amuse, on rigole, on déconne, puis on goûte le vin d'Arnaud, et passons à table. La soirée est excellente, à entendre l'accent du Sud en permanence, à faire les cons, à regarder quelques vidéos de nos aventures, à se connaître, et en fait... à s'apprécier. Un peu tard pour nous raccompagner, et pas forcément une idée très prudente, nous prenons un taxi, et montons sans faire de bruit les escaliers de la guesthouse vers 3h du matin. Quelle soirée !
ven.
28
juin
2013
Avant que le réveil ne sonne, nous sommes déja réveillés par la pluie, qui n'arrête pas de tomber. Pas pressés, nous repoussons l'alarme jusqu'à 10h, et nous servons de ce pretexte pour dormir un peu plus longtemps. Vina del Mar, où nous allons aujourd'hui, est en effet bien moins interessante à visiter s'il ne fait pas beau. C'est apparemment une station balnéaire aux grandes avenues propres et luxueuses, bordées de palmiers, avec une longue plage de sable. Mais sous la pluie, c'est une histoire moins attirante. Cependant, en prenant notre thé, quelques rayons parviennent à traverser la couche nuageuse et nous rendent légèrement optimistes.
11h est l'heure du départ, à la recherche en centre ville, soit en bas de la rue, d'un bus allant là-bas. Il paraît qu'il y en a tout le temps. Vina, ville de 320 000 habitants, n'est qu'à un gros quart d'heure de Valpa. Les deux villes sont voisines. Tant mieux, cela nous facilite les choses. Nous tournons un peu avant de finalement monter dans un bus vert, recevant des indications différentes des personnes à qui nous demandons notre chemin, après avoir parcouru une centaine de mètres vers le port (et aperçu quelques tankers ou porte-containers, ou une énorme barge de déchargement), puis être revenus sur nos pas et quasiment à notre point de départ. Enfin, nous nous asseyons sur un siège ayant fait son temps, pas très loin du chauffeur, et regardons le paysage dans ce bus ressemblant à certains des pays de l'Est. Nous arrivons à Vina del Mar, sans bien savoir quand descendre. Nous avions regardé un plan de la ville, et retenu un restaurant de bord de mer où aller ce midi, mais ne savons pas où nous sommes à ce moment, ni où la mer se trouve pour la prendre comme repère. C'est donc une sorte de balade en bus que nous faisons, les yeux ouverts sur les rues, les gens, les habitudes locales. Bref, nous découvrons le Chili, et sommes curieux. Nous sommes un peu surpris, car en fait, nous nous étions fait de la ville une image plus luxueuse que celle que nous découvrons. Tant mieux d'un côté, car l'important n'est pas d'être dans un endroit luxueux ou pauvre, mais d'être confronté à nos idées, aux images que l'on se fait des choses en en entendant parler ou en lisant, et d'être sur place pour savoir. En ayant l'impression d'aller un peu trop loin et d'avoir loupé notre arrêt, nous demandons conseil au chauffeur du bus, qui nous fait signe de prendre la prochaine sortie, c'est-à-dire dans quinze mètres. C'est du coup à pieds que nous rebroussons chemin, pour rattraper la rue principale, et trouver l'office du tourisme, là aussi après avoir demandé à un passant. Nous obtenons une carte de la ville, plus précise que celle du Lonely Planet, avec les endroits où se trouvent le musée, et un ou deux autres points d'intérets. Sachant qu'il est déjà 12h30, nous nous dirigeons vers le bord de mer, en direction du casino, pour nous rapprocher du restaurant "Enjoy del Mar" où nous souhaitons aller. Nous passons le pont enjambant la rivière, dont l'eau semble chargée de sable d'après sa couleur, et remontons son lit, le long d'une avenue pas très entretenue bordée de palmiers, et arriver finalement à bon port. On aperçoit en face le quartier Castillo, qui comme son nom l'indique, contient 3 ou 4 châteaux, dont le "Castillo Wulff", à la pointe Ouest de la ville, construit par un businessman de Valparaiso au début du 20ieme siècle. Nous nous arrêtons déjeuner, presque face à la mer et aux vagues puissantes elles aussi couleur sable, et prenons un plat à partager à deux, composé de calamars frits, de morceaux de boeuf, d'empanadas, de tempuras de crevettes, et de deux sauces maisons. Accompagné d'un verre de blanc, cet assortiment nous va bien et nous redonne l'énergie qu'il faut pour continuer notre balade. Car la bonne nouvelle du jour, c'est qu'il ne pleut pas. Nous pouvons donc tranquillement nous promener le long de la plage, en passant par la rue qui y mène, mais en marchant de l'autre côté du trottoir pour ne pas se prendre les grosses éclaboussures liées aux vagues venant se crasher contre la paroi en béton, avant d'arriver au bord d'une grande plage à côté d'immeubles, un peu à la brésilienne. Le temps reste quand même maussade, et pour être franc, nous ne trouvons pas la ville très intéressante. Nous continuons à marcher par ici pour aller voir un peu plus loin, mais pas parce que la balade est fantastique. Question d'ambiance on dirait, et surement de météo, car Vina est la plus grande station balnéaire du Chili. Pas grave, vers 15h, nous retournons vers le centre ville, parcourons les quelques blocs nous menant jusqu'au musée d'histoire et d'archéologie Francisco Fonck, où est exposé à l'entrée un Moai. Nous hésitons à rentrer, et préférons finalement revenir là où le bus nous a laissé ce midi, pour en reprendre un retournant à Valparaiso. Il est 16h30, peut-être 17h, quand nous descendons les petites marches, à Valpa, et passons au supermarché faire quelques courses, et acheter cette fois-ci une bouteille de vin.
Retour à la guesthouse, où nous travaillons un peu, et retrouvons nos amis espagnols. Ils sortent les verres, ouvrons une bouteille, et prenons un apéritif dans la bonne humeur. Un couple de français est là aussi (lui travaille à Santiago depuis 3 mois). Nous faisons connaissance, et nous mettons tous à raconter nos expériences de voyage. Le temps passe, et se sont finalement trois bouteilles de vins qui sont vides, après avoir écouté la balade dans la jungle de Benjamin (le français), sa pêche aux piranhas (un truc qui donne des idées à Fred en Bolivie), sa balade de nuit pour écouter les animaux (assez flippant apparemment... ça aussi une idée qui lui plairait, comme à un lecteur du site - fan d'expériences différentes - qui se reconnaitra sûrement), son goût pour l'Inde, puis leur avoir montré quelques vidéos, notamment celles du Japon, et refait une partie du monde, en tous cas celle que nous connaissons un peu mieux désormais. C'est donc une excellente soirée pleine de partage et d'aventures, alimentée par du jus de raisin, que nous passons, même si d'autres français présents dans la maison brillent par leur absence ou leur isolement, malgré nos solicitations. Echange d'adresses mails, et direction la chambre.
jeu.
27
juin
2013
Réveil un peu difficile ce matin, à 8h. L'envie est grande de décaler l'alarme de l'Iphone, et de se rendormir pour une demi-heure, voire une heure, mais non, nous nous forçons, prenons le petit déjeuner dans la salle commune, où nous retrouvons certains de nos compères d'hier soir, puis montons faire nos affaires, réglons nos deux nuits, et rangeons nos gros sacs dans la locker's room de la guesthouse. Nos petits sacs à dos sont suffisants pour les trois affaires dont nous avons besoin pour aller à Valparaiso, une ville de 280 000 habitants, dont tout le monde nous a parlé, située à une grosse heure de bus de Santiago. Sachant qu'il y a des départs tous les quarts d'heure, nous n'avons pas pris la peine de réserver, et allons au terminal routier, à sept ou huit stations de métro d'ici, pour prendre notre ticket et nous asseoir dans un bus à moitié vide, partant à 10h30. Oui, c'est vrai, c'est une heure plus tard que ce que nous nous étions dits hier en y pensant. Nous reviendrons dans deux jours. Pendant la grosse heure qui suit, nous regardons le paysage, les environs de Santiago (petites maisons basses plus ou moins bien entretenues, terrains vagues, quelques grandes tours style années 70, et tout près, la chaîne de montagnes), et dormons un peu, bercés par la route. Au réveil, il pleut, et on ne voit pas grand chose. Nous sortons d'ailleurs le parapluie dès la sortie du bus. L'ambiance est un peu triste, et la ville - pour ce que nous en voyons de prime abord - pas très engageante, notamment à cause de regards parfois insitants, qui mettent Audrey presque mal à l'aise. En gros, ça mate sans gêne, et les sourires, hommes comme femmes, sont rares. Il pleut toujours beaucoup, mais nous trouvons la rue de Casa Verde Lemon, la guesthouse où se trouve notre chambre, au bout d'une rue très pentue. "Valpa", c'est essentiellement ça : des rues en pentes, car la ville est construite sur le flanc d'une colline, aux maisons très colorées, souvent peintes en jaune, rouge, violet ou bleu. Cela donne du coup un arc-en-ciel de couleurs parsemant tout le côté de celle-ci, avec en face, l'océan. Mais aujourd'hui, les couleurs sont ternes à cause du ciel gris et très nuageux, du système d'évacuation des eaux archaïque (dans les rues pentues, c'est un immense torrent qui coule sur la chaussée, sans parler de flaques d'eau de deux mètres de diamètre dans lesquelles passent les voitures...), et la mer, quand la pluie ne bouche pas la vue et permet de l'apercevoir, se confond avec le ciel à cause de sa couleur. Nous aurons vu Valparaiso, mais clairement pas sous son meilleur profil. Nous posons nos affaires vers 13h15, après avoir un peu attendu l'arrivée de la trentenaire qui tient les lieux, puis décidons malgré le mauvais temps d'aller se promener, car aujourd'hui est notre unique chance. Demain, nous irons à Vina, et ensuite, nous partirons pour un autre coin du pays. Le vieux quartier de la ville, dans lequel nous sommes, est classé à l'Unesco, mais ne nous fait pas une très grande impression. C'est vrai que les couleurs des maisons (maximum deux étages) forment une palette variée, que les "ascenseurs" authentiques (permettant de rejoindre une zone située un peu plus haut en entrant dans une cage en bois de quelques mètres carrés, datant pour le plus vieux de 1883) donnent du cachet à l'ensemble, mais nous sommes surpris par la saleté de certains endroits, et la vétusté de plusieurs bâtiments. Au delà du temps, dont nous essayons de nous détacher, nous ne trouvons pas la ville si jolie, et avons un sentiment mitigé. En revanche, le coin dans lequel nous déambulons est bourré de petits restaurants qui ont pour la plupart l'air sympathique. Celui dans lequel nous nous arrêtons est plutôt classe, permet d'accueillir une quinzaine de clients, et vraiment bon. Les plats du jour (soupe de légumes, chair de poisson et fromage fondu, fettucinis bolognaises...) sont frais, au goût présent, sans que rien n'ait l'air surgelé. Par exemple, la soupe vient d'être faîte au mixeur, ou la sauce bolognaise préparée ce matin par le cuisinier. Une bonne surprise, d'autant que le verre de vin est généreux (mais le vin moyen, un peu terne, sans grand relief), et l'addition légère (environ 15 euros par personne). Du coup, le temps ayant passé, il est plus de 15h, ce qui signifie que nous n'irons pas faire le tour de la ville gratuit semblable à celui d'avant-hier à Santiago. Audrey est un peu déçue. Pendant le déjeuner, nous avons travaillé un peu notre espagnol, dont notre niveau ne permet que de progresser, grâce à une application qu'elle a sur son téléphone. Il reste quand même beaucoup de boulot, mais la volonté est bien là. Fred est intéressé, et a envie de connaitre cette langue qu'il n'avait jusqu'à présent jamais eu envie d'apprendre, malgré les 7 ou 8 ans de cours à l'école.
Il pleut toujours vivement quand nous partons, mais décidons de continuer à nous promener, même si les rues sont plutôt désertes. Nous descendons et quittons cette zone colorée au fort dénivelé pour rejoindre le port, puis pour prendre l'ascenseur "Concepcion", le plus vieux de la ville, datant de 1883. Le trajet ne dure que trente secondes, permet de monter d'une vingtaine de mètres en longeant une rue pentue et en suivant une trajectoire oblique, mais nous y serons allés. Nous marchons dans les quartiers "concepcion" et "allegre", tout près. Nous retrouvons les maisons colorées, et découvrons de nombreux graffitis artistiques, eux aussi plein de couleurs, parsemant les rues. Nous apprenons même que leur auteur a exposé ses oeuvres à Paris l'année dernière, comme celui représentant une vue de la ville par beau temps (voir photo). Hésitant à rentrer, ayant un peu fait le tour du coin, nous décidons en fait de prendre un bus pour aller visiter la maison de Pablo Neruda, San Sebastiana (sur les trois qu'il a eues au Chili). 5 étages la composent et normalement il y a une vue imprenable sur le port et l'océan. Mais pas aujourd'hui. A l'intérieur de cette maison-musée, il y a beaucoup d'objets divers. Neruda, écrivain et ambassadeur entre autre du Chili en France, était un grand collectionneur (cheval de carrousel français en bois, divers tableaux, objets du monde...). Par exemple, nous restons plusieurs minutes à regarder d'anciennes cartes du monde (datant du 18ième... c'est drôle de voir comment la géographie du continent sud-américain était représentée, ou encore le nom des pays, les anotations diverses). Une chose est sûre, c'est que les pièces, souvent colorées, excentriques, ne se ressemblent pas. Le temps étant mauvais, nous n'avons pas le loisir d'apprécier la superbe vue qui s'offrait normalement à l'auteur depuis sa chambre, donnant directement sur le port et la mer.
Nous rentrons par le bus local, qui s'arrête à chaque fois que quelqu'un veut monter ou descendre. Ici, pas d'arrêts fixes ou de chauffeurs qui refusent de vous laisser descendre 50m avant
l'arrêt parce qu'il ne veulent pas prendre la responsabilité d'appuyer sur un bouton pour vous rendre service. La lumière commence à diminuer, et après un trajet de 15 minutes et une
petite marche à l'abri sous le parapluie et nos capuches, nous revoilà à la guesthouse. A l'intérieur, il fait froid, car au Chili, le chauffage est rare, et dans la plupart des
maisons, c'est sur un poêle ou un chauffage d'appoint qu'il faut compter. Heureusement, il y en a deux, au gaz, dans la grande pièce principale. Bien installés dans un canapé,
nous travaillons sur le blog, et retrouvons un couple d'espagnol rencontré avant-hier dans la guesthouse de Santiago, Pau et Sofia, en tour du monde eux aussi. Par contre, ils sont
partis depuis moins longtemps, et rentreront après nous. Le parcours/profil de notre ami catalan est similaire à celui de Fred. Cela nous fait drôle, car il n'y a pas si longtemps,
c'est nous qui débutions notre voyage et écoutions les autres nous raconter le leur, dont la fin se rapprochait. Aujourd'hui, les rôles sont inversés. C'est relatif bien sûr, car il
nous reste plus de 4 mois, mais à l'echelle d'une année, c'est presque la dernière partie. Une question d'échelle. Nous dînons tous les quatre, et profitons génereusement du vin
chilien qu'ils ont acheté, servis dans des verres à pieds qu'ils ont aussi acquis récemment. Quand nous regardons l'heure pour nous coucher, les deux aiguilles se rejoignent et se
confondent, parfaitement alignées verticalement et pointant vers le haut.
mer.
26
juin
2013
Dans le même esprit qu'hier, avec le tour de la ville, nous partons en fin de matinée au marché central de Santiago, où un tour gratuit est animé par un étudiant tous les matins. Préférant être libre de s'arrêter quand nous voulons et de flâner, nous décidons en revanche de pas nous joindre à d'autres touristes et de rester tous les deux. Nous arrivons sur place vers 11h, après avoir rejoint l'endroit à pied en une demi-heure, et être passés par la grande place proche de la guesthouse, et avoir longé un bout du parc municipal. Il fait froid, et beaucoup moins beau qu'hier. Le ciel est gris, et nous ne distinguons pas les montagnes autour de la ville.
Le marché est en fait assez petit, pour ce que nous découvrons de prime abord. C'est une halle, avec une dizaine de poissoniers installés en carré, aux étalages plutôt rikikis, vendant du
thon, des oursins, et quelques autres poissons. En fait, c'est assez décevant. Il n'y a pas de crustacés, hormis un que nous ne connaissons pas, une sorte de bulot, avec deux espèces de
crochets, dans une coquille collée à d'autres, pour former un bloc aux multiples ouvertures d'où l'on aperçoit la chose bouger doucement. Les regards des gens sont parfois un peu intrusifs,
ou étranges, ce qui nous surprend car nous ne nous sentons pas si différents des gens d'ici. En Inde ou en Asie, ok, nos têtes ne faisaient pas couleur locale, mais ici, c'est un peu
inattendu. Nous sommes à l'aise, mais l'ambiance en général n'est pas très joyeuse, et les visages ne sont pas très ouverts ou souriants. Dommage. Une discussion avec un poissonier fait
mentir cette remarque, mais c'est plutôt une exception. Pas question de généraliser quoique ce soit, cela ne fait que deux jours que nous sommes là, et nous verrons bien ce qu'il en est
dans les prochaines semaines. Dans cette halle se trouvent également de multiples restaurants, bistrots, abrités sous une grande voute vitrée, aux couleurs rouges et blanches. C'est
assez avenant, et des rabatteurs sont là pour faire en sorte de vous attirer dans l'un plutôt que l'autre. Nous apercevons d'ailleurs celui que Felipe nous a conseillé hier. Nous irons
probablement tout-à-l'heure, car nous n'avons pas très faim pour le moment.
Nous sortons des lieux après ce tour plus rapide que prévu, et traversons la rivière Mapocho pour rejoindre le marché aux fruits et légumes, bien plus grand. Il se met à pleuvoir. Sur les stands, on trouve un peu de tout, comme des croquettes pour chien dans de grands bacs à disposition pour se servir et aller peser tout ça, ou bien des produits ménagers, ou encore quelques voitures européennes de milieu de gamme exposées à côté d'un grand étalage de fruits. C'est assez folklorique, nous aimons bien. Sur tous les étalages, un poste de télévision retransmet en direct le match de football Chili-Angleterre, que tout le monde regarde assidûment. Les bouchers, nombreux, vendent tous des pièces de viande grossièrement découpées, sans chercher à les mettre en valeur, contrairement à nos boucheries françaises. Nous apprendrons dans quelques jours qu'il n'y a pas une grande culture gastronomique, à la différence du voisin argentin par exemple, même si saucissons, patés et autres produits de bouche n'existent pas beaucoup là-bas non plus. Sur les étalages de fruits et légumes, nous remarquons les multiples espèces d'avocats, et notamment certains très petits, en version miniature, bien mûrs. En fait, c'est un peu la spécialité du Chili. Des avocatiers, il y en a jusque dans la rue. Au bout d'un moment, nous revenons sur nos pas, et sortons pour retrouver le pont et la halle du marché central. Nous décidons d'aller nous poser dans le restaurant recommandé par Felipe. Surprise, le couple d'australiens rencontré hier pendant le tour est assis à une table. Ils nous invitent à se joindre à eux, et nous voilà réunis un verre de "pisco sour" à la main dans la minute qui suit. Le pisco, autrement dit l'alcool qui compose ce cocktail national, est fait à partir de muscadet. Fred commande un ceviche (une composition de poissons crus et de légumes), et Audrey un "Chupe de Jaibas", un plat chaud mélangeant chair de crabe et fromage gratiné. Respectivement, les plats sont mauvais et très bon. Nous discutons des élections en Australie, de la situation en Europe et en France, ou de comédies musicales. Moment sympa, même s'il fait un peu froid. Une heure après, nous sortons, faisons un bout de chemin tous ensemble, puis nous quittons, en sachant que nous pouvons retourner dans la banlieue de Sydney quand nous souhaitons. Il est 15h.
N'étant pas très motivés pour monter voir la Vierge qui domine la ville sur la colline San Cristobal et regarder le panorama, qui ne doit pas être terrible aujourd'hui à cause des nuages,
nous marchons jusqu'à la guesthouse, où nous nous connectons pour réserver notre hotel pour demain sur Valparaiso, la ville multicolore située à une centaine de bornes de Santiago. Nous
y passerons deux nuits, afin de pouvoir aller à Vina del Mar, une station balnéaire voisine, et rentrerons samedi matin, pour être de retour vers 10h30. Nous avons en effet rendez-vous
avec un ami d'une amie d'Audrey, viticulteur en France et s'étant installé il y a deux ans pour faire du vin ici au Chili. Une rencontre intéressante s'il en est, et qui pourra sûrement
nous faire visiter la ville. Il habite à 300km au Sud de la capitale chilienne, mais sera dans le coin ce week-end. Et puis c'est toujours agréable d'avoir un contact dans un pays que vous
ne connaissez pas. Avant de rentrer, nous avons fait un détour par le supermarché, pour acheter de quoi manger ce soir, mais sans prendre de vin. Une grosse erreur que nous
regretterons, car nous passerons la soirée avec d'autres voyageurs, mélangeant des nationalités aussi diverses que Néo-zélandaise, anglaises, ou des canadiennes originaires de
Hong-Kong. Nous les avions presque tous rencontrés rapidement ce matin au petit-déjeuner, et les revoyons quand nous nous installons dans le salon de la maison pour "travailler" (Fred
commence à regarder des sites pour s'informer sur les Galapagos par exemple, Audrey planifie un peu les semaines à venir et comment rejoindre le sud du Chili puis la frontière bolivienne),
pendant qu'ils regardent un film sur l'écran plasma installé sur le mur. C'est au moment de diner, ou de prendre l'apéritif, que l'ambiance change, et que tout le monde se met à
discuter. La sauce prend, et l'ambiance est joyeuse. Aaron, le néo-zélandais de 40 ans, dont le métier est d'emmener des clients fortunés pêcher à la mouche dans son pays (ça paye
apparemment, car il ne travaille que 5 mois sur 12 et voyage le reste du temps), ouvre même sa bouteille de crème de vanille rapportée de Mendoza, en Argentine, quand les
deux bouteilles de vins qu'il a partagée avec un couple d'anglais sont terminées. Nous proposons un jeu de groupe, dont Audrey a le secret et a pratiqué régulièrement lors des longs
trajets en bus pendant ses tournées, puis un autre, et encore un troisième, avant que des anglais prennent le relai. Bref, nous nous amusons bien, surtout quand trois canadiennes se
joignent à nous. L'une d'elle adore la bouffe, connait bien San Francisco, et veut nous donner des adresses en apprenant que nous y allons en septembre. Les pizzas sont digérées depuis
longtemps quand nous montons tous nous coucher vers 2h du matin, après cette soirée mélangeant des voyageurs d'horizons divers, et dont les chemins se sont croisés ce soir, avant
que chacun ne poursuive son tour du monde ou d'Amérique du sud...
mar.
25
juin
2013
Hola
Ca y est, nous y sommes. Après être arrivés hier soir sous le brouillard, une température au sol de 8°C, avoir trouvé notre guesthouse, "El Castillo Surfista Hostel" (située en plein centre,
à côté de Bellavista, le quartier étudiant et des restaurants), avoir fait quelques courses dans le supermarché juste à côté, et pris possession de la grande chambre à l'étage, nous
voilà frais et dispo pour notre premier jour ici. Premier constat, il fait froid, mais le temps est magnifique. Cela ne devrait apparemment pas durer : c'est bien le début de l'hiver
dans cette partie du monde.
Notre petit-déjeuner s'éternise en discutant avec d'autres personnes arrivées cette nuit, elles aussi en tour du monde. Nous retrouvons aussi - enfin - une connexion Internet correcte, un gros changement depuis plusieurs mois. Départ à 12h, écharpe sur le cou, main dans les poches, à la découverte de la ville. Une ville peuplée, car parmi les 17 millions de chiliens, 7 millions vivent ici. Et le Chili, c'est une fois et demi la taille de la France. Ca fait donc un grand territoire pas très peuplé, notamment à cause de la chaîne montagneuse du coin, qu'on appelle Les Andes.
Etant dans le centre, pas besoin de prendre de bus ou de métro, nous pouvons nous balader à pied. L'idée est de rejoindre une grande place pour assister au "Free Tour" destiné aux touristes, où un étudiant vous présente la ville et vous balade pendant deux-trois heures, en vous donnant tout un tas d'explications. Nous passons le grand rond-point, qui nous fait un peu penser à celui de la place de la Nation à Paris (en moins joli cependant), prenons une grande avenue (Libertador B. O'Higgins), et nous arrêtons dans un grand magasin acheter un disque dur pour remplacer celui qui commence à battre de l'aile depuis quelques semaines et renvoyer ce dernier en France avec toutes nos photos et vidéos (ce sera au moins ça de sauvé si nous avions un problème avec notre sac ou notre ordinateur sur ce continent un peu moins sûr que les autres). La ville est assez urbanisée, avec des bâtiments récents, quelques parcs, des rues plutôt propres, mais sans véritable agencement architectural, ce qui rend les choses un peu désordonnées, sans grande cohérence. Mais depuis nos premiers contacts hier soir, nous nous sentons plutôt bien. Les gens n'ont pas l'air extrèmement gais en revanche.
Nous tournons à droite pour emprunter une longue rue piétonne, "el pasea estado", bien plus fréquentée, et bordée de magasins moyenne gamme. C'est l'heure du déjeuner, et les hommes d'affaires se mêlent aux autres touristes ou étudiants des alentours (qui préparent une manifestation pour demain). Nous tombons sur une église, dans laquelle nous rentrons. Le monument est beau, et l'intérieur richement décoré. 4 messes sont données par jour. On ne plaisante pas avec la religion en Amérique du Sud. D'ailleurs, nous reverrons dans les prochains jours des statues de la Vierge un peu partout, comme dans un supermarché par exemple. Ayant faim, et suivant l'avis du Lonely Planet (Fred n'a pas pris le temps dernièrement de regarder de son côté les bonnes adresses recommandées du coin), nous trouvons le "Bar Nacionàl", un bistrot un peu parisien, avec serveurs habillés et service qui dépote, dans lequel nous mangeons un bout, assis sur une petite table à côté d'un homme agé qui nous parle sans que nous saisissions la plupart de ses propos. Pas grave, on ne demande qu'à progresser, et souhaitons profiter des deux mois que nous allons passer sous cette partie de l'équateur pour améliorer notre espagnol. Bonne surprise, Fred commande un verre de vin rouge et voit un grand verre à pied très rempli arriver sur la table. Le vin, pour un vin de table sans prétention, est assez bon, plutôt doux. Ca change des autres fois, où les verres coutaient parfois les yeux de la tête, et le vin était très fort ou trop puissant. Au moment de payer, notre carte bleue nous remercie, car les prix sont à des années lumières de ceux de Polynésie, de NZ ou encore d'Australie. Disons-le autrement, cela fait quatre mois que nous étions dans des pays à haut niveau de vie. Contents nous sommes, car en ayant fait les comptes il y a quelques jours, clairement, la Polynésie a coûté cher. Allez, on ne vit qu'une fois, et voilà bien une destination qu'à priori, nous ne sommes pas prêts de revoir. Bref, ce "Bar Nacionàl", c'est une bonne surprise, qui nous plaît par son ambiance de bistrot et nous donne l'impression d'être plongés dans la vie locale, assis à côté de plusieurs hommes d'affaires ou habitués. En sortant, nous rejoignons la place centrale où nous avons rendez-vous pour la visite.
Mais auparavant, puisque nous avons une vingtaine de minutes d'avance, nous faisons un tour sur la (grande) Plaza de Armas (le coeur symbolique de la ville depuis sa fondation en 1541), regardons les stands des artistes locaux, passons au milieu de palmiers, et nous approchons de la cathédrale de la ville, néoclassique, construite entre 1748 et 1800, dont la façade nous attire (voir photo). A l'intérieur, c'est superbe. les peintures ornent le plafond, des sculptures sont disposées partout autour de la nef, et c'est grand. Peut-être la plus belle église que nous ayons vue depuis notre départ de France. Nous en faisons le tour en marchant doucement, puis ressortons, et rencontrons Felipe, qui va nous emmener nous et les dix autres touristes à la découverte de différents quartiers, et nous raconter l'histoire de la ville, ainsi que quelques anecdotes, dans un anglais de bon niveau mais à l'accent prononcé. Nous passons ainsi devant la mairie, la poste (un ancien palais), le musée des arts pré-colombiens, l'ancien congrès (déplacé depuis quelques années dans une autre ville afin de diviser un peu la population), la court suprême (à l'architecture un peu française), "el palacio de la moneda" et son centre culturel (où Allende a trouvé la mort en 1973 dans des conditions obscures, alors que Pinochet s'apprêtait à prendre le pouvoir), la bourse (sur New-York Street, avec une inscription "Nueva York", dans une rue qui rappelle celle de la bourse américaine), l'opéra (endommagé par le dernier grand tremblement de terre il y a deux ans), et enfin la colline Santa Lucia, d'où l'on peut apparemment depuis le sommet apercevoir l'ensemble de la ville. La balade est très sympa, et les commentaires de Felipe ni trop longs ni trop courts. Nous sympathisons pendant ce temps avec un couple de sexagénaires néo-zélandais, et un autre australien, du nord de Sydney. C'est sympa de pouvoir dire que nous connaissons leur pays et y étions il y a deux mois. Une pause est prévue dans un bar d'un quartier propre et légèrement branché, très sympa, où nous découvrons l'apéritif local, le "pisco sour" (un mélange de pisco, citron, glace, sucre, blanc d'oeuf), qui n'est pas mauvais. Après cet arrêt d'une petite demi-heure, nous repartons tous et empruntons le parc "forrestal" (où les chiens sont rois, avec des niches un peu partout pour éviter qu'ils errent partout), puis traversons la "plaza italia", qui est en fait l'ancienne frontière entre les quartiers riches de l'Est et les plus pauvres à l'Ouest, passons au dessus de la rivière Mapocho (tout petite, qui nous rappelle celle de Kathmandou), pour arriver dans le quartier de Bellavista, où se trouvent les restaurants, bars, et boîtes de nuit. Au fond, se détachant des montagnes aux sommets enneigés en arrière-plan, nous apercevons la colline San Cristobal, avec tout en haut, une statue de la vierge. Enfin, pour terminer, nous nous arrêtons devant "la Chascona", la maison de Santiago du poète chilien Pablo Neruda. Il est 18h, et la nuit est presque tombée.
Plutôt que de rentrer, nous allons boire un verre avec les deux couples que nous avons rencontrés, et qui ont pas mal voyagé. Ils nous encouragent d'ailleurs à continuer, et trouvent notre
voyage formidable. Leur devise : "rentrez sans un sou en poche" ! On y réfléchira...mais ils ont l'air de savoir de quoi ils parlent. Il y a des gens comme ça, qui ont le goût du voyage
et de l'aventure. Nous restons à discuter tous ensemble, et boire un autre "pisco sour" jusqu'à 19h30. Nous rentrons vers 20h, après être passés au supermarché faire quelques courses.
Nous préparons nos steacks, et discutons avec un couple d'espagnols de notre âge, eux aussi en tour du monde. Nous ne nous éternisons pas trop, car la fatigue nous gagne peu de temps
après. Nous allons rester une nuit de plus demain soir, avant d'aller visiter les villes de Valparaiso et Vina del Mar, à une centaine de kilomètres de Santiago. Un ami d'une amie d'Audrey
vivant dans la grande banlieue de la ville est dans le coin ce week-end. Nous reviendrons du coup ici samedi pour le rencontrer. Ensuite, nous descendrons dans le sud du pays, à
plusieurs milliers de kilomètres d'ici (sans véritablement savoir encore comment ni dans quel ordre procéder par rapport aux villes où nous aimerions aller), puis prendrons soit un
avion (plus cher mais plus rapide), soit un bus pour rejoindre le nord du pays, et nous rapprocher de la frontière bolivienne (soit quand même plus de 50h de bus pour ce trajet qui
traverse tout le pays, soit - excusez du peu - 5300km).